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« Les baillis et échevins s’y conformeront. Ce 18 juin de l’an de grâce 1639. »

À peine eut-il fini cette lecture, qu’un bruit discordant de trompettes partit avant la dernière syllabe de ses paroles, et couvrit, quoique imparfaitement, les murmures qui le poursuivaient ; il pressa la marche de la procession, qui entra précipitamment dans le grand bâtiment qui tenait à l’église, ancien couvent dont les étages étaient tous tombés en ruine, et qui ne formait plus qu’une seule et immense salle propre à l’usage qu’on en voulait faire. Laubardemont ne se crut en sûreté que lorsqu’il y fut entré, et qu’il entendit les lourdes et doubles portes se refermer en criant sur la foule qui hurlait encore.


CHAPITRE III

Le bon prêtre


L’homme de paix me parla ainsi.
Vicaire Savoyard


À présent que la procession diabolique est entrée dans la salle de son spectacle, et tandis qu’elle arrange sa sanglante représentation, voyons ce qu’avait fait Cinq-Mars au milieu des spectateurs en émoi. Il était naturellement doué de beaucoup de tact, et sentit qu’il ne parviendrait pas facilement à son but de trouver l’abbé Quillet dans un moment où la fermentation des esprits était à son comble. Il resta donc à cheval avec ses quatre domestiques dans une petite rue fort obscure qui donnait dans la grande, et d’où il put voir facilement tout ce qui s’était passé. Personne ne fit d’abord attention à lui ; mais, lorsque la curiosité