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— Ah ! monseigneur, dit-il, ignore à quel homme il l’a arraché ; il est vrai qu’il l’a laissé mourir, et sous ce rapport on n’a pas à se plaindre ; mais enfin il était l’agent de la conjuration : c’était son fils.

— Dites-vous la vérité ? dit le Cardinal d’un air sévère ; oui, car vous n’oseriez pas mentir avec moi. Comment l’avez-vous su ?

— Par les gens de sa suite, monseigneur ; voici leurs rapports ; ils comparaîtront.

Le Cardinal examina ces papiers nouveaux et ajouta :

— Donc nous allons l’employer encore à juger nos conjurés, et ensuite vous en ferez ce que vous voudrez, je vous le donne.

Joseph, joyeux, reprit ses précieuses dénonciations et continua :

— Son Éminence parle de juger des hommes encore armés et à cheval ?

Ils n’y sont pas tous. Lis cette lettre de Monsieur à Chavigny ; il demande grâce, il en a assez. Il n’osait même pas s’adresser à moi le premier jour, et n’élevait pas sa prière plus haut que les genoux d’un de mes serviteurs[1].

  1. copie textuelle de la correspondance de monsieur et du cardinal de richelieu.

    À Monsieur de Chavigny.

    « Monsieur de Chavigny,

    « Encore que je croie que vous n’êtes pas satisfait de moy, et que véritablement vous en ayez sujet, je ne laisse pas de vous prier de travailler à mon accommodement avec Son Éminence, et d’attendre cet effet de la véritable affection que vous avez pour moy, qui, je crois, sera encore plus grande que votre colère. Vous sçavez le besoin que j’ai que vous me tiriez de la peine où je suis. Vous l’avez déjà fait