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luxuriante et soignée, tout respire l’aisance, la paix agreste, le bonheur.

Vers midi nous sommes arrivés ici avec une faim toute helvétique, la mienne était aiguisée par l’eau de Prilly, mais rien à offrir à son tranchant, pas la plus mince auberge dans ce village épars sur la croupe d’un coteau empanaché de hauts noyers.

Nous sommes entrés sans façon dans une maison de paysan, et là nous avons exposé de même notre cas à une femme dont la figure est honnête et la mise fort propre ; vite elle nous a fait monter dans sa chambre, a étendu une nappe à côtes sur sa table de chêne, cirée et brillante, puis elle nous a servi un jambonneau entouré de choux et du fromage de chèvre pour dessert.

Cet endroit était autrefois une seigneurie ; j’ai lu je ne sais où l’ingénieux expédient dont Guillaume d’Écublens, évêque de Lausanne au xiiie siècle, se servit pour affranchir ses domaines et sa ville épiscopale de l’autorité temporelle : Il assembla dans les plaines d’Écublens les chanoines de la cathédrale, qui est, je te l’ai dit, sous l’invocation de Notre-Dame, et les principaux habitants de Lausanne, puis il leur fit élire pour seule souveraine..... devine qui ?..... la Sainte Vierge ! Ce choix judicieux permit au prélat rusé de prendre en main les rênes de l’administration comme représentant de la mère du Christ.