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très satisfait et des acteurs et des actrices... Mais il faut laisser parler Voltaire : « Je fais le bonhomme Lusignan... cela me convient fort. — Je vous avertis sans vanité que je suis le meilleur vieux fou qu’il y ait dans aucune troupe. — Nous avons un bel Orosmane, un fils du général Constant... un très beau et très bon Orosmane, un Nérestan excellent, un joli théâtre, une assemblée qui fondait en larmes. — Madame d’Hermenches a très bien joué Énide, et que dirons-nous de la belle-fille du marquis de Langalerie, belle comme le jour ? Elle devient actrice. Son mari se forme, tout le monde joue avec chaleur, vos acteurs de Paris sont à la glace. — Je voudrais que vous eussiez passé l’hiver avec moi à Lausanne, vous y verriez des pièces nouvelles exécutées par des acteurs excellents ; les étrangers accourir de trente lieues à la ronde, et mon pays roman, mes beaux rivages du lac Léman devenus l’asile des arts, des plaisirs et du goût. — On croit chez les badauds de Paris que toute la Suisse est un pays sauvage : on serait bien étonné si on voyait jouer Zaïre, à Lausanne, mieux qu’on ne la joue à Paris ; on serait plus surpris encore de voir deux cents spectateurs aussi bons juges qu’il y ait en Europe... J’ai fait couler des larmes de tous les yeux suisses... Les acteurs se sont formés en un an ; ce sont des fruits que les Alpes et le Mont-Jura n’avaient point encore portés. César ne prévoyait pas, quand il vint ravager ce petit