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il, passer une partie de l’hiver dans un petit ermitage appelé Monrion, au pied de Lausanne, à l’abri du cruel vent du nord. » Il eut aussi une demeure à la ville (rue du Chêne, 6), il s’y plaisait infiniment, et voici comment il la décrit : « Je me suis arrangé une maison à Lausanne qu’on appelerait palais en Italie : quinze croisées de face en cintre donnent sur le lac à droite, à gauche et par devant ; cent jardins sont au dessous de mon jardin, le grand miroir du lac les baigne ; je vois toute la Savoie au delà de cette petite mer, et par delà la Savoie, les Alpes qui s’élèvent en amphithéâtre et sur lesquelles les rayons du soleil forment mille accidents de lumière. » Dans un autre endroit il dit à ses amis : « Je voudrais vous tenir dans cette maison délicieuse, il n’est point de plus bel aspect dans le monde. La pointe du sérail de Constantinople n’a pas une plus belle vue, je ne puis me lasser de vingt lieues de ce beau lac, des campagnes de la Savoie, et des Alpes qui les couronnent dans le lointain ; mais il faudrait avoir un estomac, cela vaudrait mieux que l’aspect de Constantinople. » Cette lettre n’est point un modèle de style, tu le vois, et j’aurais pu me dispenser de souligner des répétitions qui sautent aux yeux ; peut-être me trouveras-tu bien osé de critiquer Voltaire, j’en ai le droit tant que je ne m’attaque pas à ses chefs-d’œuvre. Ce dernier membre de phrase : mais il faudrait avoir un estomac, est démenti par ceci que je