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Au village d’Esserenex j’ai remarqué une petite église portant cette inscription :

Pèlerinage à Saint-Symphorien.

Puis, après avoir traversé des prairies sablonneuses, grisâtres, en pente, ombragées ça et là de touffus châtaigniers sombres, j’ai atteint Yvoire à la tombée de la nuit.

L’extérieur de cet endroit m’a plu et m’a reporté aux temps féodaux, j’ai vu une muraille d’enceinte haute, brunie, crevassée, rude, où serpentent de vieux lierres et deux tours-portes carrées, sourcilleuses, béantes, aux faîtes ruinées, l’une regardant Douvaine, l’autre Thonon.

C’est par celle-ci que je suis entré dans ce vieux bourg qui n’a peut-être pas son pareil.

Figure-toi un ramassis de laides cahutes élevées sur un terrain en pente, tourmenté, rocailleux, qui descend au lac ; les rues, — si l’on peut donner ce nom à des passages nauséabonds, à peu près impraticables, — servent de rigoles à l’eau des fumiers ; les plus apparentes de ces masures ressemblent à des loges à porcs, la fumée en sort par des portes basses ; bêtes et gens vivent pêle-mêle, mangent et boivent au même pot, grouillent dans d’étroits et fétides réduits ; là toute chose est repoussante, difforme, et pue la misère, — c’est un cloaque de malingreux et de crétins.