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obligé de fouiller les archives cantonnales, de consulter les vieux catalogues des libraires locaux, de lire, de compiler, de rendre des visites intéressées aux bibliophiles et bibliomanes, de quêter des documents, de remuer la poussière des bouquins, et je le déclare, mon bon ami, que je n’en ai pas la force, que je ne m’en sens point le courage, que cette besogne préparatoire, chanceuse, incertaine, quant aux résultats, austère, absorbante, m’effraie souverainement, me répugne invinciblement.

Je me suis rendu en Suisse non pour fatiguer mon intellect, le bourrer d’aliments indigestes dont son tempérament ne peut faire un incessant usage, mais pour le récréer, lui procurer du repos, de la liberté, du délassement, et interrompre les labeurs du littérateur et du bibliothécaire.

Ne mériterais-je pas le nom de fou, je te le demande, si j’entreprenais un voyage de plus de cent vingt lieues, — moi qui ai le bonheur d’être encore jeune, d’avoir encore le cœur chaud et la tête ardente, moi qui ai le malheur de rester à Paris dix mois sur douze, — pour feuilleter avec la froide patience d’un vieil érudit des in-folios et des in-quartos doublement pesants. Autant vaudrait ne pas être sorti de l’enceinte de la Bibliothèque Sainte-Geneviève, autant vaudrait passer mes trop courtes vacances dans ce sombre et délabré bâtiment de Montaigu qui fut tour à tour collége. — Calvin, je crois, y étudia la dialec-