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l’alarme aux Genevois endormis et se fiant à la foi des traités.

Arrivés presque sous les murs de Genève comme des gens qui vont faire un mauvais coup, comme des voleurs qui, à la faveur des ténèbres, envahissent le domaine d’autrui, nos Savoyards, superstitieux comme on l’est dans tous les pays d’ignorance, dérangèrent un pauvre lièvre qui dut faire de savantes évolutions pour sortir de leurs rangs et regagner les bois. Ils regardèrent cela comme un fâcheux présage. Plus loin des pieux plantés en terre leur causèrent une certaine frayeur, et ils craignirent d’avoir donné dans une embuscade ; enfin, lorsque munis de claies et protégés par une nuit fort sombre ils se disposaient à franchir les fossés de la Corraterie pour appliquer des échelles, assez habilement préparées, contre les murailles, une grosse volée de canards s’éleva à leur approche, mais ces oiseaux ne furent point aussi utiles à Genève que les oies l’avaient été à Rome, — comme le fait remarquer une histoire locale, où l’on trouve parfois des aperçus ingénieux et des réflexions piquantes. — Ils ne réveillèrent aucune sentinelle et ne dérangèrent nullement l’escalade[1].

  1. Le bastion sous lequel étaient alors les assaillants se nommait Bastion de l’Oie. Tu verras par Ia suite de ce récit que de là partit le boulet qui acheva la délivrance de Genève.