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Je ne sais pas trop pourquoi je suis revenu dans ce bourg d’assez bonne mine, qui doit sa prospérité à Voltaire, à la route de Paris qui le traverse et au voisinage de Genève.

Avant que l’auteur de Zaïre n’eût acquis cette terre, Ferney n’était qu’un hameau misérable dans un petit vallon marécageux. Des chemins furent percés et le trop plein de l’industrie genevoise, c’est-à-dire de l’horlogerie, s’épancha dans le village qui ne tarda pas à s’accroître.

La Restauration n’a pas voulu que Ferney fût compris dans les villages livrés aux Genevois.

De ce côté notre frontière n’est qu’à une lieue de la Rome protestante.

À peu de distance de ce bourg dont le nom véritable est Fernex, en tirant vers le canton de Vaud, on trouve le village de Bossy, que l’on ne visite guère. Rousseau y passa quelque temps, dans son enfance, chez le pasteur du lieu, comme il le dit dans ses Confessions.

Ainsi Jean-Jacques, encore imberbe et insoucieux de l’avenir, habita tout près de l’endroit où Voltaire, vieux, décrépit, morose et malade, devait se retirer.

Ce rapprochement et celui que j’ai fait à propos de Genthod et de Prégny, — la contrée des naturalistes, — me font presque croire qu’il y a des localités prédestinées à certaines classes de grands hommes.