Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 9.2.djvu/519

Cette page n’a pas encore été corrigée
2443
2444
MARIE, CULTE AUQUEL ELLE A DROIT


tiques considèrent comme authentique et dans laquelle le saint évoque loue la virginité perpétuelle de Marie, Sermo in nutivilatem Christi, 8, 13, 14, 15, 16, dans Analecta sacra du cardinal Pitra, t. iv, p. 386 sq. Suivant la conclusion récemment émise comme probable par le P../ugie, le ive siècle, peutêtre dès sa première moitié] nous offre un autre exemple de cette union du culte de Marie à celui de Notre-Seigneur, dans une fête mariale établie dès cette époque en Orient, en l’honneur de la maternité divine de Marie, et faisant partie d’une période liturgique préparatoire à la fête de Noël. La première fêle mariale en Orient et en Occident, l’Anent primitif. Échos d’Orient, avril-juin 1923, p. 130 sq.

5. De ces faits et de ces considérations ne doit-on pas conclure, au moins avec une très grande probabilité, qu’il y avait pendant cette première époque, avant la fin du premier tiers du IVe siècle, quelque pratique d’un culte religieux envers Marie, bien que l’on n’ait point de documents certains en faveur d’un culte explicite d’invocation directe ?

A des présomptions si fondées on ne peut opposer le seul manque de documents positifs. C’est un principe certain, plusieurs fois rappelé, voir Dogme, t. IV, col. 1643 sq., que surtout à une époque où les documents sont très rares, et sur un point où il n’y avait aucune nécessité particulière d’affirmer ou de défendre une doctrine ou une pratique, la simple absence de documents explicites ne peut être, par elle-même, une raison suffisante de nier cette pratique ou cette doctrine. L’assertion est encore plus vraie quand il s’agit d’une pratique ou d’une doctrine attestée, peu de temps après, d’une manière très claire. Comment un tel fait pourrait-il être expliqué si cette doctrine ou cette pratique n’avait point existé auparavant ?

Dans le cas présent, tout ceci s’est pleinement réalisé. Aussitôt après cette première époque, la pratique du culte envers Marie apparaît avec un caractère très manifeste, que l’on ne pourrait expliquer si rien n’avait existé auparavant. Il est très évident aussi qu’il n’y avait alors aucune nécessité de défendre la pratique du culte envers Marie, ni contre les accusations des païens, dont on ne voit aucun indice sur ce point, ni contre quelque erreur alors existante. Aucune n’apparaît jusqu'à celle des collyridiens qui, vers la fin du iv e siècle, voulurent rendre à Marie un culte d’adoration.

En ce qui concerne la liturgie de l'Église, l’absence de documents explicites serait facilement expliquée, si l’on admettait l’hypothèse assez fondée, indiquée plus haut, attribuant à la liturgie antérieure à la fin du iv° siècle une sorte de culte seulement concomitant, ou implicite, rendu à Marie en même temps qu'à Notre-Seigneur.

On peut dire aussi que les mêmes raisons de prudence qui empêchèrent pendant toute cette période, le culte manifeste de la croix, si ce n’est sous des signes symboliques, comme l’ancre et ses diverses formes, purent conseiller aussi de ne pas rendre trop évident le culte envers la très sainte Vierge. On pouvait craindre qu’il ne fût pas bien compris par les catéchumènes tant que, dans toute la société où se mouvait le christianisme, les pratiques païennes avaient encore l’ascendant. En attendant que ce culte pût être plus explicite, il suffisait d’insérer, dans le symbole chrétien, les glorieuses prérogatives de Marie et de les expliquer aux fidèles et aux catéchumènes, comme nous l’avons constaté dans les homélies d’Origène. Le culte de Marie devait en résulter comme spontanément, d’abord voilé et comme implicitement compris dans le culte envers son div’n Fils, pour apparaître ensuite, sous une forme distincte et très explicite, dès que le paganisme aurait perdu son emprise sur le monde romain.

6. Aux faits cités viennent se joindre, à partir de la seconde moitié du iv siècle, quelques affirmations en faveur d’un culte direct envers la Mère de Dieu.

Saint Épiphane réprouve expressément, dans la secte des collyridiens, le culte d’adoration et de sacrifice qu’ils voulaient rendre à Marie, voir Collyridiens, t. iii, col. 369 sq. Ce culte est réprouvé parce que Marie, toute excellente qu’elle est, et si honorée qu’elle ait été par sa formation et la présence du Fils de Dieu dans son sein, n’a point la nature divine. Uœres., lxxix, /'. G., t. xli, col. 749, 751. En même temps que l'évêque de Salamine exclut l’adoration qui ne peut être rendue qu'à Dieu, il affirme que Marie est très digne d'être honorée, et qu’elle doit l'être, col. 751, et il demande qu’elle le soit, col. 753. Le culte légitime envers Marie était donc alors en possession certaine, puisque le saint docteur se contente de le justifier et de demander qu’on le pratique, plutôt comme une chose à continuer qu'à commencer.

Saint Grégoire de Nazianze, dans son panégyrique de saint Cyprien, cite le recours d’une vierge chrétienne à la protection de Marie. Elle prie la mère de Dieu de défendre sa virginité, et sa céleste protectrice lui donne une prompte assistance. Oral., xxiv, in laudem S. Cypriani, xi, P. G., t. xxxv, col. 1181. Quelles que soient les critiques que l’on puisse faire, au point de vue historique, relativement aux circonstances du fait tel qu’il est rapporté par le panégyriste, qui y confond plusieurs noms et détails historiques, il est certain que l'événement cité aux auditeurs de saint Grégoire comme un fait courant et habituel, démontre la pratique alors authentique de la prière à Marie. H. Delehaye, Les origines du culte des martyrs, Bruxelles, 1912, p. 134.

Saint Ambroise vers la fin du ive siècle, en propesant Marie comme le modèle que doivent suivre les vierges chrétiennes, leur dit que c’est d’elle qu’elles doivent recevoir la grâce divine : Excipile itaque ex hac Moabitide olla gratiæ cœlestis unguentum, nec vereamini ne defleiat. De institutione virginis, xiii, 83, P. L., t. xvi, col. 325. Ce qui, selon la doctrine du saint docteur, suppose la prière à Marie pour obtenir cette grâce, puisque c’est par la prière que la grâce nous est donnée : Ubi adest oratio, adest Verbum, fugatur cupiditas, libido discedit. De viduis, x, 63, col. 253. Que l’on se rappelle aussi les hymnes déjà mentionnées, dans lesquelles le saint docteur joint la louange à Marie à celle qui est rendue à Notre-Seigneur. L’n témoignage indiscutable est encore fourni par les Actes de sainte Marie égyptienne, tenus comme authentiques par les bollandistes. C’est par la prière fréquente à Marie, que cette illustre pénitente obtint la grâce de la conversion, puis le secours constant contre toutes les tentations dont elle fut assaillie dans ledésert. Acta sanctorum, Paris, 1866, t. x, p. 81 sq. : voir fa vie, P. G., t. Lxxxviii c, col. 3714.

A côté de ces documents bien authentiques, une mention est due aux écrits attribués à saint Éphrem et à saint Nil, malgré quelque incertitude sur leur parfaite authenticité. Dans les onze prières à Marie, attribuées à saint Éphrem († 378) dans l'édition d’Assémani, mais dont l’authenticité ne peut être démontrée avec certitude, voir Éphrem (saint), t. v, col. 190, le saint docteur loue le pouvoir d’intercession de la Mère de Dieu, avec une puissance d’expression que l’on rencontre en Occident seulement à partir du xii° siècle.

Dans une lettre attribuée à saint Nil († 430), Marie est appelée heureuse dans le monde entier, conformément à la prophétie qu’elle avait faite elle-même. Bienheureuse dans le monde entier, Marie l’est en vérité puisqu’elle est universellement louée, célébrée et