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    1. MANICHÉISME##


MANICHÉISME, OR IGINES

ÎSÎIO

Il est certain que Mani connaissait les Écritures de l’Ancien Testament ; mais c'était pour les rejeter comme l'œuvre do diable, Titus de Bostra, c<> ira nan., m. '>. P. C, t. wm. col. 1221. A certains » n enseignement est une protestation contra le Judaïsme, religion essentiellement mauvaise et corruptrice. Dans nos livres, ilit An-Nadim, il traitait Irrespectueusement tous les prophètes ; il les accusait de mensonge et soutenait que les démons s'étalent empares d’eux et parlaient par leur bouche ; en quelques passages de ses écrits, il les qualifiait même de démons.. Flûgel, Mani, p. 100. Les Acta Artktiai complètent ces renseignements. « Voici ce qu’enseigne Mânes au sujet des prophètes : Rn eux réside l’esprit d’impiété et d’iniquité des Ténèbres

qui se sont soulevés au début. Aussi ont-ils été

trompes et trompeurs. L’Archonte > aveuglé leur -entendement. Si quelqu’un se lie à leurs paroles, il mourra pour toujours et sert voué au globe de feu pour n’avoir pas appris la gnose du Paraclet… D’après lui. c’esl le prince des Ténèbres qui a parlé avec M <iM les Juifs et les prêtres : le Dieu de ees gens

est donc le même que celui des chrétiens et des gen

tils : il les a séduits dans sa eoneupiseence. parce qu’il n’est pas le vrai Dieu. Quiconque espère en cette divinité sera comme elle livre aux chaînes pour n’avoir pas uii> son espoir dans le Dieu véritable. » .VrLi ArcheL, Il et 12, p. 18, I. 13, p. 20, I. 13.

Plus loin, le même ouvrage place dans la bouche même de Mani des reproches plus précis : C’est 'an. est censé « lire le reformateur, qu’on doit attribuer les enseignements de la Loi et des prophètes « '.'est lui qui a parlé par l’intermédiaire de ces derniers. Il leur a fait attribuer à Dieu toutes sortes d’ignorances, de tentations et de désirs mauvais : il le leur a fait présenter comme a ide de chair et de sang, s’efforçant ainsi de rejeter sur le l'ère du Christ les caractères de Satan et de ses prophètes… La loi renferme un ministère de mort organisé. File est le voile mis sur le visage de Moïse pour en faire disparaître l'éclat. De peut sans danger, lui adjoindre le Nouveau unent comme si celui-ci venait du même Maître. En elTet, elle est usée, décrépite, et proche de la mort, tandis que l’enseignement du Sauveur se renouvelle de jour en jour. Lorsqu’un arbre a un tronc vieilli et que ses branches ne portent plus de fruit, on le coupe. Quand les membres du corps sont corrompus, on les ampute. Sans cela, le mal qui a causé leur corruption se répandrait dans l’organisme entier. De mène, le maintien de la loi, issue de l’ignorance, aérait la perte de l'âme. La Loi et les prophètes jnt jusqu'à Jean Baptiste. Après lui vient la loi de la vérité, la loi de la promesse, la loi des cieux, la loi nouvelle donnée au genre humain. » Acta Archel., lô, p. 2°..

Grâce surtout aux écrits de saint Augustin, et principalement au De Genesi contra manichœos, au Contra Adimantum et au Contra Faustum, nous connaissons bien le détail des objections que faisaient Mani et ses disciples à l’Ancien Testament. Ils lui reprochaient avant tout sa barbarie et la cruauté, l’immoralité d’un certain nombre de ses récils, l’invraisemblance de tel ou tel détail historique, le caractère grossier de sa législation. Ils se plaisaient aussi i l’opposer au Nouveau Testament et à faire voir les contradictions existantes entre la doctrine de Moïse et des prophètes et les enseignements du Sauveur.

Ces objections n'étaient pas nouvelles, et Mani n’avait pas euà les inventer. Tout naturellement, nous rapprochons Mani d’autres adversaires bien connus -de l’Ancien Testament, qui rejetaient la loi juive pour des raisons semblables aux siennes. Ceux (i sont les gnostiques, Hasilide, Yalentin, et particu lièrement Marclon. Dans un ouvrage, auquel il avait

donné le titre significatif d’Antithèses, Marclon

s'était attaché à faire re880rtlr les oppositions des

deOX Testaments de manière a prouver que les deux recueils ne pou aient pas élrc l’uiivrc d’un seul et même Dieu. Au Dieu juste, au Créateur du ciel et de la terre, il attribuait l’Ancien 'Testament : il

voyait, au contraire, dans le Nouveau l’ouvrage

achevé et définitivement parfait de la bonté de l’un Les noms de Mani et de Mareion ont été de très bonne heure rapprochés l’un de l’autre. Saint F.phrcm, par exemple, a combattu ensemble ces deux adversaires, en même temps que liardesane. 'Toutefois. Mani était autre chose qu’un disciple de Mareion, et il allait plus loin que lui dans la négation : il le prenait même personnellement à partie dans un chapitre du Trésor. Au lieu d’attribuer les Écritures Juives a

un Dieu inférieur. Mani y voyait l’ouvre du diable. De la sorte, il était impossible de conserver quoi que ce lut de l’Ancien Testament.

Le Nouveau Testament était mieux traité par Mani, bien qu’il fût, lui aussi, soumis à une critique sévère. C’est que les livres qui le constituent nous instruisent sur le Christ, et que celui ci tient une place des plus Importantes dans le système mani Chéen. Aussi ancien que le monde, engendré par l’Homme primitif avec qui il peut être identifié, Jésus est le Fils de Dieu et le Sauveur. Il apparut d’abord à Adam, pour l’instruire de ses devoirs et le prémunir contre la séduction d’Eve. II lui montra < sa propre personne exposée à tout, aux dents de la panthère et aux dents de l'éléphant, dévorée par les voraces. engloutie par les gloutons, mangée par les chiens. » 'Théodore Har-Khôni, dans F. Cumont, Recherches sur le manichéisme, fasc. 1, p. 48. I)ès lors, il continue à vivre dans le monde, toujours attaché à la croix de lumière, et souffrant de son union avec la matière ; mais poursuivant aussi l'œuvre du salut.

De telles doctrines, sans doute, ne figurent pas dans les livres authentiques du Nouveau Testament. Mais les manichéens, fidèles ici encore à l’exemple de Mareion, n’hésitaient pas à faire la critique du Nouveau Testament, gardant les parties qui leur plaisaient et rejetant impitoyablement tout le reste. A certains égards, la critique de Mani était moins destructrice que celle de Mareion. car, celui-ci ne conservait que l'Évangile de saint Luc, tandis que les manichéens n’hésitaient pas à se servir des quatre évangiles. Mais ils n’en acceptaient pas le texte traditionnel. Ils y faisaient des coupures ; Ils supprimaient en particulier tous les passages dans lesquels Jésus présentait sa doctrine comme l’accomplissement de l’ancienne alliance, ceux qui renfermaient un éloge des Juifs. Ils rejetaient encore toul ce qui regardait l’enfance de N’ot re-Seigneur. Les récits relatifs à la conception virginale leur déplaisaient entre tous. < Je me garderai bien, fait dire à.Mani l’auteur des Acta Archelai, d’admettre que Noire-Seigneur soit descendu dans le sein d’une femme… Il y a une quantité de témoignages qui montrent qu’il est venu parmi nous sans naître comme nous… Le Fils de Dieu est descendu tout formé et il s’est complètement trans formé en homme. Comme dit Paul, il s’est trouvé extérieurement semblable à un homme… Puis, quand il avoulu.il a donnée cettehumanité la forme et l’aspect du soleil. » Acta Archet., 59, p. 86 sq.

Les récits relatifs à la passion n'étaient pas moins violemment attaqués par les manichéens. Car Mani ne pouvait admettre que Jésus fut véritablement mort sur la croix. L’n passage de VÉpître du fondement, cité par Fvode, affirme que ce ne fût pas le Fils de Dieu, mais un suppôt du diable qui fut crucifié : » L’ennemi écrit Mani, espérait bien avoir mis en