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MANICHÉISME, SOURCES MANICHÉENNES

de sentences et de vies des Pères du désert. P. G., t. xxxiv, col. 13-15. On n’oserait affirmer que ce fût le même personnage que celui qui est visé par les auteurs antimanichéens.

Aphthonius vivait en Égypte au ive siècle. Selon Philostorge, H. E., iii, 15, édit. Bidez, p. 46-47, Aèce d’Antioche alla un jour à Alexandrie pour engager avec lui une conférence contradictoire.

Nous ne savons rien des commentaires que ces exégètes auraient composés des écrits de Mani ; et il est permis de se demander si véritablement nous avons ici affaire avec des manichéens, ou si plutôt les auteurs grecs qui les mentionnent ne se sont pas trompés à leur sujet.

8. D’autres disciples de Mani, Sisinnius, son successeur, Zarouas, Gabriabius, Hilarius, Olympius, Salmaius, Innaius, Paapis, Barajas, sont également mentionnés dans la seconde formule grecque d’abjuration ; il n’y a pas lieu d’insister ici sur ces personnages qui ne sont pas connus autrement. On peut identifier Sisinnius avec Sis dont parle An-Nadim, Flügel, Mani, p. 103 ; Zarouas avec Zakouas que signale saint Épiphane, Salmaius avec Salam, le destinataire de la LXIXe lettre de Mani, Flügel, Mani, p. 105, etc. Ces identifications ne dépassent pas les bornes de la simple possibilité. Cf. P. Alfaric, op. cit., p. 115-118.

9. Nous retrouvons un témoin plus solide en arrivant à Fauste de Milève. Celui-ci, originaire de Milève en Numidie, était un contemporain un peu plus âgé de saint Augustin ; et il jouissait à la fin du ive siècle d’une solide réputation parmi les manichéens d’Afrique. Il avait écrit un ouvrage important que saint Augustin se crut obligé de réfuter par le détail aussitôt qu’il en eut pris connaissance. Le Contra Faustum manichæum, P. L., t. LXII, col. 209-518, édit. Zycha, dans le Corpus de Vienne, t. xxv, 1891, comprend 33 livres, et il reproduit l’ouvrage à peu près entier de Fauste, au fur et à mesure qu’il avance dans sa réfutation. Cf. A. Bruckner, Faustus von Mileve. Ein Beitrag zur Geschichte des abendländischen Manichäismus, Bâle, 1901 ; P. Monceaux, Le manichéen Faustus de Milev ; restitution de ses capitula, Paris, 1924.

10. Il faut également rappeler pour mémoire Secundinus, un manichéen de Rome, dont nous connaissons par la réponse de saint Augustin, Contra Secundinum manichæum, P. L., t. XLII, col. 571-602, une lettre adressée à l’évêque d’Hippone en 405.

On voit par la liste précédente combien nous sommes mal renseignés sur la littérature manichéenne par les auteurs occidentaux. De l’abondante production de cette littérature, c’est à peine si quelques noms ont survécu à l’oubli. Les seules œuvres authentiques que nous en possédions ont été transmises dans les réfutations de saint Augustin à qui nous devons la lettre de Secundinus, les opuscula de Fauste, les disputationes d’Adimante, pour ne plus parler de l’Epistola fundamenti de Mani lui-même.

3o Les manuscrits découverts en Mongolie. Mais nous avons déjà dû signaler certains fragments de cette littérature qui nous ont été rendus récemment par des trouvailles faites dans l’Asie centrale. Il faut maintenant revenir sur ces importantes découvertes. Cf. H. Cordier, Les fouilles en Asie centrale, dans le Journal des Savants, 1910, p. 210-224, 241-252.

À la fin du xixe siècle, des voyageurs qui passaient par la région de Tourfan avaient été frappés de l’abondance des vieux papiers qui y sortaient de terre. On savait d’autre part que, au nord de Tourfan, s’était élevée jadis la ville de Kao-Tschang, ou Kouchan, capitale d’un royaume ouigour. On décida d’y entreprendre des fouilles. Les travaux furent commencés de 1893 à 1895 au nom de la Société de géographie de Saint-Pétersbourg ; ils furent continués en 1898 par les soins de l’Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg, puis, à partir de 1902, par une Association internationale pour l’exploration historique, archéologique linguistique et ethnographique de l’Asie centrale et de l’Extrême-Orient. En même temps, l’Académie des Sciences de Munich (1902-1903), puis celle de Berlin (1904-1905 ; 1905-1907) envoyèrent à Tourfan des missions dirigées par Grünwedel et von Le Coq.

Vers le même temps, des fouilles considérables étaient entreprises à Touen-houang, dans le Turkestan chinois. À 20 kilomètres environ au S.-E. de cette ville se trouvent de très nombreuses grottes, appelées en chinois les grottes des mille Bouddhas. Un moine taoïste découvrit, par hasard, en 1900, dans une de ces grottes une cachette qui contenait un nombre considérable de manuscrits anciens. Un savant anglais, M. Aurel Stein, ayant appris cette découverte, alla le premier à Touen-houang et y acheta environ 5 000 manuscrits qu’il fit envoyer à Londres. En 1908, M. P. Pelliot fut envoyé à son tour par le gouvernement français, en Asie centrale ; il parvint à se faire céder un grand nombre de manuscrits qui furent déposés à la Bibliothèque nationale de Paris. Les manuscrits restants furent envoyés à Pékin. Cf. P. Pelliot, Une bibliothèque médiévale retrouvée au Kan-sou, dans le Bulletin de l’école française d’Extrême-Orient, t. viii, 1908, p. 501-529, Rapport de M. P. Pelliot sur sa mission au Turkestan chinois (1906-1909), dans les Comptes rendus de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 1910, p. 58-68 ; P. Pelliot, Les grottes de Touen-Houang, 6 atlas, Paris, 1914.

Toutes ces fouilles ont abouti à d’importants résultats. Un bon nombre parmi les manuscrits retrouvés, renferment des œuvres manichéennes. Nous sommes ainsi entrés en possession de documents précieux pour la connaissance de l’histoire, de la doctrine, de la liturgie manichéennes. Toutefois, il ne faudrait pas s’exagérer la valeur des documents en question. « La plupart, écrit P. Alfaric, sont très incomplets, et consistent en feuillets épars, plus ou moins déchirés et à peine lisibles. Ils se trouvent écrits en langues peu connues que les philologues ont peine à déchiffrer, et ils sont d’une intelligence d’autant plus difficile qu’ils se présentent comme de simples versions très littérales et peu adaptées à l’esprit de la langue, faites d’ailleurs, en certains cas, sur d’autres versions également défectueuses. Aussi leurs récents éditeurs ont-ils soin de faire remarquer que la traduction qu’ils en donnent est, sur bien des points, hypothétique et provisoire. D’ailleurs, les textes les plus clairs et les mieux conservés demeurent encore sujets à caution. Leur origine est peu connue, et on peut se demander avec inquiétude si tous sont authentiques. » P. Alfaric, op. cit., t. 1, p. 137. Somme toute, ces documents orientaux confirment et complètent ce que nous savons par ailleurs du manichéisme, ce que nous en apprennent les autres témoignages ; ils ne remplacent pas ces témoignages. Sous ces réserves, les plus importants des textes orientaux sont les suivants :

1. Le Kouastouanift est un formulaire de confession manichéenne, rédigé en vieux turc. Cet ouvrage a été retrouvé presque complet dans un manuscrit de Touen-houang ; des fragments importants, et en particulier le début qui fait défaut dans le ms. de Touen-houang, ont encore été découverts à Tourfan. Cf. W. Radloff Chuastuanit, Das Bussgebet der Manichäer, Saint-Pétersbourg, 1909 ; Nachträge zum Chuastuanit, dans les Comptes rendus de l’Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg, 1911, p. 867-896 ; A. von Le Coq, Chuastuanift, eine Sünder bekenntnis der manichäischen Auditores, gefunden in Turfan, dans les Abhandlungen de l’Académie des Sciences de Berlin,