Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 9.2.djvu/152

Cette page n’a pas encore été corrigée

M M IBARE S in il-. INITIATIY1 S DE NOBILI

1710

Uvement arrêtés. Esprit très souple, très curieux, très o b s erva teur, il pris d’abord conseil de l’expérience, s.ins vouloir mettre sur pied un système. Sur plusieurs points, il a varie, ne serait oe que sur la question ilu port, pour lui-même, du cordon brahmanique. Voir Bertrand, La mission ilu Modulé, t. D, p. 110. L'étude du passé, l’observation du présent lui ont inspire plusieurs ims des changements. En particulier il a dû, pour se livrer à un apostolat plus efficace, renoncer a partir d’un certain moment au genre de vie îles uutiassis. Ou jour pourtant oiï

méthodes d’apostolat seront contestées, il va

être amené a présenter sous forme de théorie OU de

ne ses vues relatives au meilleur mode d'évan al ion de l’Inde. Il va sans dire qu’avant de

incrétlser sous la forme du Mémoire dont nous

allons parler, les principes généraux du système

lent plus ou moins consciemment élaborés dans

l’esprit du missionnaire.

En répons^ ; i diverses accusations sur l’histoire

desquelles nous aurons à revenir. Nohili envoya i

Home un justificatif. Celui-ci n’est malheu reusement pas pubtté au complet et dans l’original latin. L’essentiel se trouve, avec des coupures, dans la traduction française donnée par.1. Bertrand. La mission du MadurcA. a, p. loi sq. ; quelques fragments du latin dans P. Dahmen, (" ; i jésuite brahme, p. 43. On a conjecture, non sans raison, que Nohili avait déjà lii, quand il le composa, l’ouvrage de Mathieu Ricci, qui avait Bxé en Chine, depuis quelques années, la doctrine de « raccommodât ion ». Inspirés par des circonstances analogues, les deux écrits ont en tout an air de parenté. Celui de Nohili par sa vigueur dialectique fait dès l’abord une profonde impression.

1. Le point de départ est excellent : christianiser ce n’est pas européaniser : le plus grave ennemi de l’apostolat chrétien, c’est la tendance si naturelle au missionnaire de ne concevoir le christianisme que sous la forme qu’il a revêtue dans son pays d’origine. de vouloir dès lors imposer à d’autres contrées toutes les hahitudes de l’Europe chrétienne et de rejeter toutes les coutumes indigènes qui ne s’y peuvent raccorder. De ces coutumes, au contraire, le véritable apôtre devra, pour réussir dans sa tâche, conserver tout l’essentiel. Il ne s’agit pas de faire du néophyte indigène un individu isolé dans son monde, incapable

xercer aucune action, en marge de la vie sociale. Il ne faut couper aucune des racines qui unissent profondément le converti a la société d’où il sort. — Mais cette i ciété est toute païenne. Ne risque-t-on pas en laissant le néophyte pratiquer, comme avant son baptême, tous les usages de son inonde de l’exposer à la superstition ? Son christianisme ne risquet-il pas de devenir un amalgame OÙ se retrouveront, I doses plus moins variables, les idées et les coutumes du paganisme voisinant avec les doctrines et les pratiques chrétienni

2. Distinctions et précisions. Il est trop évident que de toutes les habitudes anciennes on ne peut permettre la conservation. Il en est qui, de toute nécessité, doivent être supprimées : d’autres qu’il sera peut-être possible de maintenir. Pour cette discrimination, on se réglera par le principe suivant : Ne rien interdire aux néophytes qui ne suit certainement défendu : ne rien leur imposer qui ne soit certainement exigé. — Cela posé, on établira la fameuse distinction entre « coutumes proprement religieuses et coutumes civiles >. Sont coutumes religieuses celles où apparaît clairement l’intention de rendre un culte à la divinité : aller à la pagode, prendre part aux cérémonies sacrées, faire, soit a la maison, soit au temple, les sacrifices grands ou petits prescrits par le rituel. Les autres actes sont de prime abord réputés civils et dès lors

Indifférants ; ils ne sont pas, d’ailleurs, pour autant

autorisés en bloc : OCflU in/ideliuni, ils risquent de

participera l’infidélité de ceux qui les posent ou bien parce que ceux-ci sont Infidèles, ou bien parce qu’ils distinguent extérieurement fidèles et Infidèles, ou bien enfin parce qu’ils les distinguent religieusement,

et cela encore de deux manières : tout en ayant de

soi un autre usage simplement profane, ou en n’ayanl

pas de soi cet tisane la el étant religieux par eoiien tion. ('.elle dernière catégorie est évidemment prohibée, elle revient en somme a ci Ile des ailes proprement religieux. On n’en peut dire autant, sous ce] laines restrictions, des deux premières, Restent les usages a double Bu si l’on peut dire : avant caractère religieux mais en même temps caractère civil. Un exemple fera comprendre la question : Les gens

de castes ont l’habitude de fréquentes ablutions ; on peut dire que de sui cet usage a un objet purement

profane propreté, rafraîchissement ; en tait, les blindons le considèrent aussi comme distinguant les

gens de castes, et ils lui attribuent en même temps

un effet religieux (purification de l’Ame). Que fera

le chrétien '.' Il pourra conserver l’usage en lui même : il est de soi indifférent ; mais il aura soin d'éliminer tous les éléments superstitieux, soit extérieurs, soit intérieurs. Intérieurement, il dirige son intention, protestant qu’il ne prend pas ce bain pour la purilication de son àme : extérieurement, il s’abstiendra des multiples observances qui donnent à l’acte un caractère religieux. Autant en dira-t-on de l’imposition du santal sur le front ou sur le corps, de la prise du cordon, insigne des brahmes et, pour anticiper, de l’usage d’imposer aux jeunes épouses le tahj ou joyau nuptial.

On peut aller plus loin, darder le rite, lui conserver sa signification religieuse, mais en la redressant. Au début du carême, l'Église catholique impose les cendres à ses fidèles. L’Indien aime à se marquer le front d’un mélange de cendres et de santal ; qui nous empêche, dira Nobili, de bénir nous-mêmes et d’imposer ces cendres, non plus seulement une fois dans l’année, mais beaucoup plus souvent ; qui empêche nos fidèles d’emporter ces cendres à la maison et de s’en orner le front, pour ne point se singulariser parmi les gens de leur caste ? Ainsi, distinction des rites religieux d’avec les coutumes civiles ; purification de ces dernières, s’il est besoin. par l'élimination des éléments supersîiiieux et par la direction d’intention ; remplacement de certaines coutumes païennes par des pratiques nettement chrétiennes, tels sont les grands principes qui dirigent la pratique de Nobili.

3. Retour au sens [irirnilil des pratiques. — A creuser plus profond, on s’aperçoit qu’ils dérivent d’une idée, qui n’est pas toujours exacte, de l'évolution des sociétés. Ricci, quand il s’efforçait de faire la théorie des rites chinois et des appellations divines, partait du principe de la conservation, dans les croyances et les pratiques religieuses de la Chine, de la révélation primitive. La même idée guida-t-elle Nobili ? On la retrouve en tout cas chez plusieurs de ses successeurs. Le brahmanisme sous sa forme la plus pure, pensent-ils, n’est en définitive qu’une des formes de la religion révélée, telle que l’a pratiquée la première humanité. Essayant de raccorder les plus folles théories des brahmes aux données de l’histoire sainte, ils enseigneront que la caste brabmine, selon toute vraisemblance, dérive des sept premiers pénitents, petits-fils de Noé. Voir dans les Lettres édifiantes, t. vi, p. 211-213, une lettre du I'. Bouchet, à Huct, évoque d’Avranches, sur les Indiscutables parentés qu’il y a entre l’hindouisme et le christianisme. Au cours des âges de multiples