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LUTHER. ŒUVRES ET COLLECTIONS DE DOCUMENTS


catholiques, a toutes les profondeurs et toute l’énergique beauté de l’Ame alsacienne. Suso était de la Souabe, l’auteur de la Théologie germanique était de Francfort ou du moins c’est là qu’il vécut. Ainsi, ce qu’avant tout prêchera Luther, ce sera le sentiment profond d’une union intime avec Dieu.

Le revêtement même de cette philosophie et théologie reflétera les caractéristiques de l’âme allemande.

Peu apte aux idées générales, mû par des impulsions venant de points variés de l’horizon, l’Allemand aime à tracer dans sa philosophie le tableau d’antinomies irréductibles. Ainsi la philosophie et la théologie de Luther sont-elles remplies de contradictions. Le 27 juillet 1530, il écrivait à Mélanchthon : « Nos adversaires, me dites-vous, font collection de contradictions tirées de mes ouvrages. En réalité, ce à quoi ils visent avant tout, c’est à faire étalage de leur sagesse. Mais comment ces ânes jugeraient-ils des contradictions de notre doctrine, eux qui n’entendent rien aux contradictions ? Du reste, que peut être notre doctrine aux yeux des impies, sinon un recueil de pures contradictions, puisque, à la fois, elle exige les[œuvres et qu’elle les condamne, qu’elle abolit les cérémonies et qu’elle les rétablit, qu’elle vénère les pouvoirs publics et qu’elle s’élève contre eux, qu’elle affirme le péché et qu’elle le nie ! Mais je porte de l’eau à la mer. » Enders, t. viii, p. 137.

Homme d’impulsion et de passion plutôt qu’homme d’idée, l’Allemand portera, je ne dis pas dans sa vie privée, mais dans sa vie de citoyen, une insineérité allant jusqu’à la candeur, jusqu’à l’inconscience. Il saura de même façonner l’histoire à son profit, selon ses besoins. Ainsi, philosophie, dogme, Bible, histoire, Luther déformera tout, fera tout servir à ses fins avec une insincérité déconcertante.

Dominé par ses impulsions et ses sensations, l’Allemand ne sait ni composer un ouvrage ni condenser sa pensée. Ainsi les écrits de Luther se présentent à nous sans plan ni ordre, avec des redites infinies. Souvent ils font l’effet d’alluvions ; mieux encore, ils rappellent ces contrées tourmentées où des cataclysmes ont charrié des montagnes dans le lit des torrents.

Enfin, les conceptions allemandes sur Dieu et sur l’homme croissent souvent dans un fond de tristesse et d’amertume ; l’Allemand est pessimiste. Dur, fruste et violent dans son fond originel, dominé par une nature inclémente, l’Allemand du Nord-Est, le "Wende, avait façonné des divinités à son Image. Wotan ou Odin y était devenu le dieu des tempêtes, de la guerre et de la destruction. Les légendes proprement germaniques montrent l’homme se débattant contre des inimitiés insondables et farouches. Ainsi, en face du Dieu de la révélation, il y a chez Luther un Dieu plus ancien, le Dieu caché. Il est tout différent du Dieu révélé, tout différent du Dieu du Xatrr Père, différent même du Dieu de l’Ancien Testament, qui aimait à répandre ses bienfaits sur Israël. Ce Dieu caché est terrible : c’est un Dieu qui gaiement prédestine à l’enfer. Dans l’Évangile, il nous a donc trompes sur sa véritable nature. Pourtant, c’est lui qui fixe le sort éternel de l’homme. C’est sur la farouche antinomie entre sou Dieu cache et son Dieu révélé que Luther fonde toute sa doctrine de la pr< destination, C’est-à-dire toute sa théologie du salut. Chez lui, le chrétien nous prêche lyriquement la confiance au Dieu révélé : aux volontés du Dieu caché, le Wende nous recommande avec effroi une résignation farouche.

Beaucoup plus véritablement que l’opuscule du custode de Francfort, la théologie du grand Allemand est une Théologie allemande.

Les abréviation ! placée ! avant le titre des ouvrages sont eellei qui ont été employées pour les désigner au cours des deux articles précédents sur Li nranel la Théolooib im la men

I. — ŒUVRES ET COLLECTIONS DE DOCU MENTS. — I. Luther. — 1° Qùwres manuscrites. — Commentaire sur l’Épttre aux Hébreux, Pâques 1517-Pâques 1518 : Bibl. Vat., Cod. Pal. lat 1825, 1° 45-132 ; J. Ficker en a donné des extraits dans Luther 1517, 1918, p. 14 sq. (n.130 de la collection Schri/ten des V’erei’ns fur Reformationsgeschichle), et il en prépare la publication. Cà et là, il doit encore se trouver aussi des notes inédites, prises aux cours de Luther et surtout à ses innombrables sermons.

2° Œuvres imprimées. — Il y a eu sept éditions de ses œuvres complètes : — 1. Wiltenberg, 19 vol. in-fol., 12 en allemand, 1539-1559 ; 7 en latin, 1545-1558 ; reproduite à Wittenberg, 1558 sq. — 2. léna, 12 vol. in-fol., 8 en allemand, 4 en latin, 1555-1558 ; plusieurs l’ois reproduite.

— 3. Altenburg, 10 vol. in-fol., en allemand, 1661-1664. — 4. Reproduite à Leipzig, mais avec de nombreux documents du temps de Luther, 23 vol., in-fol., 1729-17 10. — 5. Walch, 24 vol. in-4°, en allemand, publiée par G. Walch, à Malle, 1740-1753. — 6. [Ed.] Erlangen-Francfort, 67 vol. in-12 en allemand, à Erlangen, 1826-1857 ; 2— êdit. des vol. 1-20 ; 24-26 (1862-1885) ; et 38 vol. in-12 en latin, à Erlangen et à Francfort-sur-le-Mein, sous 3 rubriques : Excgeticu opéra laiina, 28 vol., à Erlangen et à Francfort, 1829-1886 ; Commentarium in Epislolam S. Pauli ad Galoias, 3 vol., à Erlangen, 1843-1844 ; Opéra latina varii arguments ad Reformationis historiam imprimis pertinentia, 7 vol., à Erlangen et à Francfort, 1846-1873. A cette édition est jointe celle de la correspondance de Luther : [Enders] E. L. Enders, puis G. Kawerau, puis P. Flemming, Dr Martin Luthers Briefwechsel, 17 vol. in-12, 1884-1920. Pour les lettres allemandes, malheureusement, les tomes i à xi, renvoient aux éditions antérieures de De Wette (1825-1856 et d’Erlangen, t. liii-lvi. — 7. [W. | Weimar : Dr Martin Luthers Werke, édition commencée en 1883, grand in-S", encore inachevée, elle est rendue au t. i.m ; mais des tomes antérieurs n’ont pas encore paru : t.xvii, 2* part., t. xxi-xxii. ete ; plusieurs tomes sont sectionnés, le t. x comprend 4 volumes : t. x, l re parti ?, l re moitié, 2e moitié (parue en 192.">), etc. — La Bible (Die deutsehe Bibel), 1906-1921 (5 vol. parus), et les Propos de table (Tischreden : T. R.) en 6 volumes. 1912-1921, ont leurtomaison à part. En tout, il y aura de 70 à 80 volumes.

Aucune de ces éditions n’est vraiment convenable. I >e l’avis général, la dernière, celle de Weimar, a elle-même de nombreux et importants défauts. On y avait promis l’ordre chronologique ; or, ce n’est que de très loin qu’elle le suit. Souvent le texte n’a pas été établi avec soin ; les citations ne sont presque Jamais Identifiées, etc. Espérons que de bonnes tables corrigeront en partie ces défauts. Dans cette édition, la collection des Propos de table est peut-être la partie la mieux conduite ; ils y sont disposés dans Tordre chronologique, avec des concordances et des tables très soi Les Propos de table en ont acquis beaucoup de valeur. Ce résultat est d’autant plus à apprécier que Jusque-là les publications de ces Propos avaient présenté un chaos inabordable. Cette publication fait très grand honneur à son directeur, le D r Kroker.

Malgré les lacunes de l’édition de Weimar, c’est d’après elle qvie désormais l’on cite Luther ; si l’œuvre citée n’est pas encore publiée, on remonte a l’édition d’I.rlangen. Cependant les cinq premières éditions, qui vont île 1539 à 1753, sont encore assez souvent citées dans des OUV1 français. C’est que les auteurs ont pris ces références dans les traductions françaises de La Symbolique, de Moehler, et de La Réforme, de Doelllnger. D’autres s’attardent atpsj ;, citer l’édition d’Erlangen, alors même que les œuvres auxquelles ils se réfèrent ont paru depuis longtemps dans ledit, de WCimar ; c’est qu’ils reproduisent les indications d’ouvrages allemands remontant à une t rentable d’années, ou

plus souvent les traductions françaises de Janssen et de Denlfle. Dans les ouvrages français, même sérieux, e’esl presque toujours de deuxième et de troisième main que Luther est cité De là souvent des méprises curieuses. Celui qui, en ce sens, est peut-être allé le plus loin i Si M. Andlci, professeur de littérature allemande à la Sor bonne, et qui y a professe des cours sur Luther. En fis,

il faisait un article sur l’esprit citnseri’alenr rt l’esprit

révolutionnaire dans ir luthéranisme, dans iirnur de métaphysique et dt nuinilr, 1918, i’924 956 Sur se., .u/e premières références, il y en a dix de complètement fausses, on ; ce qui revient au même, d’absolument Insuffisante ! et incontrôlables ; une seul. ( si :, peu prés eXBCtl toutefois avec trois défaut I clinquants Voir J l’.npnei.