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LUDOLPIIE DE SAXE

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Bien que l’auteur ait surtout en vue le cas de l’Empire, le fond de son système vaut pour tous les États en général. Il admet que les papes en puissent disposer d’autorité ex causa et rappelle qu’ils l’ont fait prout exigebant mérita dominorum et status incotumis regionis. Car, à son sens, liquido apparet ex plenitudinc potestatis ponti/icalis omnia dependere, in cujus manu sunt omnes fines terrae… tanquam vices Dei gerentis. Ibid. 14-15, p. 32-33.

De cette thèse d’ensemble un petit point particulier est repris dans le traité De origine ac translatione et statu Romani Imperii. L’auteur y montre comment c’est la papauté qui présida aux diverses translations de l’Empire et en tire la conclusion qu’elle pourrait, aujourd’hui encore, l’enlever aux Germains, s’ils se montrent récalcitrants. Cet opuscule aurait servi de base à celui, plus anciennement connu, de Landulphe Colonna sur le même sujet. Voir t. viii, col. 2557-2558.

Quel qu’en soit l’auteur, la Determinatio compendiosa est une des manifestations les plus fermes et les mieux raiSonnées de la tendance qui, au début du xive siècle, poussait théologiens et canonistes à faire de la papauté la source du pouvoir politique tout autant que du pouvoir spirituel. Son succès fut considérable. On a pu supposer que c’est elle que visaient les opposants tels que Dante ou Jean de Paris. Elle est certainement remployée dans la Summa d’Agostino Trionfo, cf. Krammer, p. xxx, et il en existe une nouvelle édition, revue et augmentée (août 1342), en vue de défendre les droits du Saint-Siège contre les prétentions de Louis de Bavière. R. Scholz, Unbekannte kirchenpolitische Schriften aus der Zeit Ludwigs des Bayern, Rome, 1911 et 1914, 1. 1, p. 3, 125-126, 243-248, et t. ii, p. 520-541.

Tout porte à croire qu’il faut vraiment l’ajouter à l’héritage littéraire de Toloméo de Lucques. Mais déjà les œuvres incontestables de celui-ci suffisent à le classer parmi les théoriciens les plus résolus, et aussi les plus excessifs, du droit pontifical.

Pour la vie et les œuvres de Toloméo, on consultera les anciens bibliographes, tels que J. A. Fabricius, Biblioiheca lalina mediie et infimæ aetatis, édition de Hambourg, 1746, t. vi, p. 55-58, et Quétif-Echard, Scripiores ordinis prædicatorum, Paris, 1719, t. i, p. 541-544, mais à condition de les compléter et contrôler par les résultats de l’érudition moderne, consignés dans Documenii di sloria italiana, t. vi, Florence, 1875, introduction par C. Mmutoli, p. 5-34, et dans la préface mise par Mario Krammer en tête de son édition dp la Determinatio compendiosa de jarisdictione Imperii, Hanovre et Leipzig, 1909, p. v-xliii. — Monographies anciennes, mais toujours précieuses, par K. Kriiger, Des Ptolemàus Lucensis Leben und Werke, Gœttingue, 1874, et D. Kônig, Toloméo von Lucca, Harbourg, 1878. — Notices dans Kirchenlexicon, t. xi, 1899, col. 1872-1874, et Hurter, Xomenclalor, 3e édit., t. ii, col. 569-572. — Les doctrines politicothéologiques sont spécialement étudiées dans J. Zeiller, L’idée de l’Étal dans saint Thomas d’Aquin, Paris, 1910 (qui ne connaît pas encore la Determinatio compendiosa) et J. Rivière, Le problème de l’Église et de l’État au temps de Philippe le Bel, Louvain, 1926.

J. Rivière.

    1. LUDOLPHE DE SAXE##


LUDOLPHE DE SAXE, d’abord dominicain, puis chartreux (1295-1377). — Il naquit vers 1295 ; à l’âge de dix-huit ans, il entra dans l’ordre des frères prêcheurs, et selon quelques auteurs y demeura 26 ans environ, ou 30 suivant le sentiment d’autres écrivains. Il s’y distingua par sa doctrine et sa piété. En 1340, il passa au noviciat des chartreux de Strasbourg, où il fit profession et demeura jusqu’en 1343, époque de son élection au priorat de la chartreuse de Coblentz. Désirant vivre dans la vie tranquille et recueillie du cloître, il se démit en 1348 et se retira à la maison de Mayence, qu’il quitta ensuite pour retourner à la chartreuse de Strasbourg, où il décéda le 10 avril 1377 (et non pas 1378), comme il est marqué dans la chronique de ce monastère. Le chapitre général de 1378

témoigna l’estime que l’ordre des chartreux faisait de Ludolphe en lui accordant le rare bénéfice d’un tricenaire particulier. Il mourut avec la réputation de sainteté.

On a de lui : 1. Vita Domini nostri Jésus Cliristi ex quatuor evungeliis ; ouvrage célèbre qui a immortalisé le nom de Ludolphe. — 2. Kxpositio in Psalterium Dauidis, tirée des commentaires de saint Jérôme et de saint Augustin, ainsi que de Cassiodore et de Pierre Lombard, parue d’abord à Paris, 1491, et à Spire, la même année ; très souvent rééditée, en dernier lieu a Montreuil-sur-Mer, 1891. — 3. Super III et IV Senteniiarum, ouvrage ms. in-fol., conservé à la bibliothèque de l’Université de Bâle, B. V. 25. Ce ms. fait présumer que Ludolphe a écrit aussi des commentaires sur les deux premiers livres des Sentences, mais on ignore si son travail existe quelque part. — 4. Ludolphe laissa des sermons et quelques traités ascétiques conservés religieusement à la chartreuse de Strasbourg, jusqu’au commencement du xviie siècle, et ensuite dans la maison des chartreux de Molsheim, en Alsace. Il y a à Florence, à la Bibl. Laurentienne, un ms. in-4°, de 1428, comprenant quelques sermons de Ludolphe, sur le Magnificat, sur les morts, sur la Conception de la T. S. Vierge, etc. Cf. Migne, Dict. des mss., col. 502, n. 7.

— 5. De remediis contra lenlationes spiriluales novissimi temporis. Ouvrage probablement perdu, dont il existe une traduction allemande publiée vers 1570, in-8°, dans un recueil d’opuscules de divers auteurs et traduits par A. Valasser. — 6. Dans plusieurs bibliothèques publiques, on rencontre divers traités ascétiques, en latin ou en langue vulgaire, attribués à Ludolphe, mais le plus souvent ces prétendus traités ne sont que des extraits de la YitaChristi. — L’opinion de plusieurs écrivains qui mettent Ludolphe au nombre des auteurs présumés de l’Imitation de Jésus-Christ, n’a pas de fondement sérieux. Cf. Puyol. L’Auteur du livre de Imitatione Christi, Paris, 1899, in-8°, p. 327 sq. — Echard, traitant de Ludolphe. dans le Scriptores O. P., 1. 1, p. 568. signalait un opuscule latin sur la messe faite par un chartreux pour un de ses confrères, Documenta circa missæ officium. digne de pouvoir être attribué à Ludolphe et ajouté à la suite du 1. 1 de la Vita Christi conservé dans la Bibl. Coislin. Un traité semblable intitulé : Ludolphus Carthus. Expositio super canonem missæ, se trouve dans un ms. du xve siècle appartenant aujourd’hui à la chartreuse de Parkminster, dans le comté de Sussex, en Angleterre ; confronté avec un autre ms. du même siècle conservé également dans les archives de cette maison, il permet de dire que les copistes ont attribué à Ludolphe, les méditations sur le canon de la messe composées par dom Jean von Braunschweig, t 1401, qui fut prieur de la maison de Strasbourg en 1381.

Ludolphe est justement célèbre’par sa grande Vie de Jésus-Christ, qui demeure encore comme le meilleur commentaire des saints Évangiles coordonnés et fondus dans un seul récit. La vogue de cet ouvrage est immense. Avant même l’invention de l’imprimerie, il était répandu partout et fournissait aux prêtres et aux pieux fidèles une mine précieuse et surabondante d’instructions et de méditations spirituelles basées sur l’Écriture et sur les Pères.

Imprimée pour la première fois par les soins des chartreux de Strasbourg, possesseurs du texte autographe, dans l’enclos de leur monastère, en 1474, elle a été rééditée depuis dans les principales villes de l’Europe, et toujours avec succès. L’ne bibliographie du texte intégral depuis l’édition princeps jusqu’à la dernière parue à Paris, en 1880, chez Palmé, en 4 volumes, in-8°, n’en compte pas moins de quatre-vingt-huit éditions, en divers formats. Hain, Repertorium, n. 10 302, 10 303, marque deux éditions d’un abrégé