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LUCIEN D’ANTIOCHE (SAINT). ECRITS DE LUCIEN


tion de l’Histoire ecclésiastique d’Eusèbe le discours soi-disant prononcé par Lucien devant ses juges, H. E., IX, vi, 3, édit. Mommsen, p. 813 sq. ; par Phi-Iostorge, dans son Histoire ecclésiastique, II, 12, édit. Bidez, p. 24, 25 ; P. G., t. xlv, col. 476 CD ; par saint Jean Chrysostome, qui prononça en l’honneur de Lucien un panégyrique construit selon toutes les règles du genre. P. G., t. l, col. 519-526.

Quelle représentation ces divers documents permettent-ils de donner de la vie de S. Lucien ? La Vita Constantini, Suidas, Métaphraste font naître Lucien à Samosate, d’une famille distinguée. Le synaxaire de Constantinople lui attribue une origine antiochienne. Il est vraisemblable que cette dernière opinion doit être préférée. Le nom de Samosate aura été suggéré à l’hagiographe par le souvenir du célèbre satirique Lucien qui était originaire de cette ville, peut-être aussi par le souvenir de Paul dont on a fait le maître de Lucien, conformément aux données d’Alexandre d’Alexandrie.

La légende continue en racontant que, dans sa jeunesse, Lucien alla à Édesse étudier auprès d’un certain Macaire qui y expliquait les livres saints. « Le narrateur paraît s’être plus inspiré de la célébrité de l’école d’Édesse au ve siècle que d’une tradition sérieuse. » L. Duchesne, Hist. anc. de l’Église, t. i, p. 498.

Nous sommes plus assurés de la présence de Lucien à Antioche, dans les derniers decennia du iiie siècle. Lucien était alors prêtre dans la métropole syrienne et y enseignait. Nous connaissons les noms de deux autres prêtres, qui vers la même époque, tenaient aussi école à Antioche. Malchion, Eusèbe, H. E., VII, xxix, 2, P. G., t. xx, col. 708 C, et Dorothée, Eusèbe, VII, xxxii, 2-3, col. 721 B. Il n’y a, dès lors, rien d’étonnant à ce que Lucien ait été, comme eux, chef d’une école chrétienne. Pour autant que nous pouvons en juger, Lucien s’occupa surtout de travaux scripturaires pendant les années fécondes de sa carrière. « Voyant, dit son hagiographe, que les livres saints avaient été grandement corrompus, soit parce que le temps avait souillé la pureté du texte original, soit parce que des hommes très méchants, imbus de l’hellénisme, avaient voulu changer l’esprit de ces livres et y introduire leurs erreurs, Lucien reprit toutes les Écritures et les revisa entièrement d’après l’hébreu, langue qu’il connaissait à la perfection : il se donna un mal considérable pour faire cette correction. » Vita Luciani, 4, édit. Bidez, p. 187.

Seul, Alexandre d’Alexandrie, dans le texte cité plus haut, fait de Lucien un disciple de Paul de Samosate, et prétend que le savant exégète demeura excommunie sous trois évêques que l’on identifie, par hypothèse, avec les trois successeurs du Samosatéen, Domnus, limée et Cyrille. Ce dernier, en 303, fut enlevé ; i son Eglise et condamné à travailler dans les carrières de Pannonie où il mourut après trois ans de captivité, Passio quatuor Coronat., dans les Acta Sanctorum, novembre, t. iii, Bruxelles, 1910, p. 769. Son remplaçant Tyrannus aurait réconcilié Lucien. Il parait difficile d’admettre, en s’appuyant sur les données imprécises d’Alexandre, une telle série d’hypothèses. Suivant les vraisemblances, Lucien resta à Antioche, Bdèle à la grande Lglise jusqu’au temps de la persécution de Maximin.

Peut-être, sous Dioclétien, avait-il passé quelque temps à Nicomédie. Un fragment d’une lettre de lui, dressée aux Antiochiens, est précisément relatif au martyre de l’évêque de leur ville, Anthime, mort le ptembre’.', "2. Kn tout cas, après ledit de Maxi min, Lucien fut arrêté à Antioche, et transféré à Nicomédie. La légende a embelli le récit de ses der DICT. DE TIIT.OL. CATHOL.

niers jours. Condamné à mourir de faim, il aurait eu encore le courage de célébrer l’eucharistie dans sa prison avec ses disciples, la veille de sa mort. Il rendit le témoignage suprême le 7 janvier 312. Cf. sur cette date E. Schwartz, Zur Geschichte des Athanasius, dans les Nachrichten der K. Akademie der Wissensch. zu Gôttingen, 1904, p. 529, n. 4. « Son corps fut transporté à Drépanum, dont Constantin changea le nom en celui d’Hélénopolis, en l’honneur de sa mère. Eusèbe ne nous renseigne pas sur la sépulture de Lucien ; et, en parlant d’Hélénopolis, il mentionne bien la basilique des martyrs, mais sans prononcer aucun nom. C’est Jérôme, le premier qui nous apprend où se trouvait son tombeau : sepultusque est in Helenopoli Bithynise. Rien n’indique que les reliques de saint Lucien aient d’abord été enterrées à Nicomédie, pour être ensuite amenée sa Drépanum. L’époque des translations n’est pas connue, et l’on doit supposer que le saint corps, pour être soustrait à la profanation, ou pour toute autre raison que nous ignorons, a été aussitôt transporté par des amis de l’autre côté du détroit. Une translation solennelle aurait laissé un souvenir, et la légende n’aurait pas expliqué la présence d’un martyr de Nicomédie à Htlénopolis par le prodige classique du dauphin. » H. Delehaye, Les origines du culte des martyrs, Bruxelles, 1912, p. 182 sq.

II. Écrits de Lucien.

Saint Jérôme attribue à

Lucien des Libelli de fide et brèves ad nonnullos epistolse. De vir. ill., 77, P. L., t. xxiii, col. 685 C. Il est d’ailleurs le seul auteur ancien qui nous fasse connaître l’activité littéraire de Lucien.

1° Des lettres, un seul fragment très bref, relatif au martyre de saint Anthime de Nicomédie, nous a été conservé par le Chronicon Paschale, 2, ad ann. 303, P. G., t. xen, col. 689 B.

2° Nous ignorons ce que saint Jérôme veut désigner sous le nom de libelli de fide. On pourrait voir là soit une allusion au discours apologétique que Ru fin prête à Lucien, lorsqu’il comparaît devant ses juges ; soit une mention d’un symbole de foi attribué au martyr dès le temps du concile de Séleucie et même, plus probablement, dès 341, par le Concile de la Dédicace a Antioche.

1. Le discours rapporté par Rufin, H. E., IX, vi, 3, édit. Mommsen, p. 813 sq., et intitulé par lui oratio de fide, est une brève apologie du christianisme : on y retrouve les arguments classiques en faveur de l’unité de Dieu et contre les idoles, puis la preuve de la divinité de Notre-Seigneur. La première partie s’inspire surtout des apologistes, en particulier, de Tertullien et de Minucius Félix ; la seconde, dans laquelle l’orateur fait valoir surtout les rochers fendus du Golgotha et l’obscurité produite au moment de la Passion, est peut-être plus originale, mais suffit a révéler le caractère tardif de cette composition. Au reste, Rufin lui-même ne paraît pas très assuré de son authenticité, car il rapporte cette pièce avec la vague formule d’introduction : dicitur.

2. L’historien Sozomène nous apprend que les évêques, réunis en 341 a Antioche à l’occasion de la dédicace de l’église d’or, avaient trouve un symbole de Lucien qu’ils adoptèrent, et qui fut dès lors considéré comme la profession de foi authentique de leur concile. H. E., iii, 5, P. G., t. lxvii, col. 1044 B. Des quatre symboles qui nous sont parvenus sous le nom du concile de la Dédicace, c’esl le second qui est visé par le texte de Sozomène ; et, à partir de 359, ce symbole jouit, dans le parti homœouslen, d’une grande faveur ; acclamé en 359 au concile de Séleucie, Socrate, II. E., ii, 39, P. G., t. i.xvii, col. 336 B, il est repris à I.ampsaque en 364, Sozomène, II. E, VI, 7, P. (L, t. r.xvii, col 1312 B ; puis dans un synode de Carie, en 367, Sozomène, vi, 12, col. 1322." Dans le

IX.