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LUCAR. DOCTR [NE

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considère le droit absolu divin, dans sa justice, si l’on considère le droit légal. Dieu est en effet miséricordieux et juste ». C. m.

4° Jésus-Christ Médiateur, Chef de l’Église. Culte des sdinls. Jésus-Christ intercède pour nous auprès

du Père ; il fait seul l’office de vrai et légitime Pontife et Médiateur ; en conséquence, il est seul à prendre soin des siens et à être Chef de l’Église qu’il orne et féconde de bénédictions diverses. » C. viii. Lorsqu’il professe que Jésus-Christ est le seul Médiateur, Lucar entend-il exclure l’intercession des saints ? Il semble que oui, au sentiment des membres du Synode de 1638 ; ceux-ci l’anathématisent même pour cette erreur « obscurément et perfidement » insinuée. En tout cas, en 1618, dans une lettre adressée à Marc-Antoine de Dominis, il rejetait formellement cette intercession et il avouait un état d’âme étrange : « Comment les invocations des saints offusquent la gloire du Christ, c’est ce que je ne comprenais pas auparavant ; bien plutôt je les défendais obstinément contre le docte Marcus Fuxius de Transylvanie. Mais cet homme, dans sa réponse, a si bien réfuté mes arguments que je n’ai plus eu besoin, à partir de ce moment, d’aucune autre étude pour reconnaître mon erreur, et je prends Dieu à témoin qu’en récitant les offices publics, c’est avec la plus grande douleur que j’entends invoquer les saints en tant d’occasions et que je vois Jésus-Christ mis de côté. Je m’aperçois bien qu’une pareille manière de faire exerce une très fâcheuse influence sur les âmes. » Cf. Neale, op. cit., t. ii, p. 394. On remarquera aussi que Lucar a tenu à mettre en évidence la souveraineté du Christ sur son Église ; à ses yeux, les chefs d’Églises particulières ne sont rien auprès de Celui qui est la tête du corps. Au sujet de la question de la primauté romaine ; son opinion n’a rien de surprenant : « Nous en avons fini, écrit-il, avec le pontife romain, désormais le Christ sera le chef de son Église. » Lettre de 1618 à Marc-Antoine de Dominis. Cf. Neale, loc. cit.

La notion d’Église.

L’Église catholique pour

Cyrille Lucar, c’est l’universalité de ceux qui sont fidèles dans le Christ, qu’ils soient morts ou vivants. L’organisation de cette Église à peine effleurée précédemment se précise au chap. x. « Comme d’aucune façon un homme mortel ne peut être le chef de l’Église, c’est NotreSeigneur Jésus-Christ lui-même et lui seul qui est ce chef, et c’est lui qui tient en main le pouvoir de la gouverner. Cependant, ici-bas, il y a des Églises particulières qui sont visibles ; chacune a quelqu’un qui est le premier en ordre ; mais celui-là ne doit pas être appelé à proprement parler le chef -de cette Église particulière, on ne l’appelle ainsi que d’une façon impropre, car c’est dans cette Église le membre principal. » La hiérarchie n’est donc que nominale. La lettre de 1613 adressée à Wtenbogært révèle en Cyrille un partisan d’une administration aristocratique : « L’aristocratie des évêques, c’est ce que nous préférons. Nous avons des preuves certaines que c’était là l’ordre établi par Dieu dans l’Église des Israélites ; Moïse était bien le chef de cette Église, mais elle était cependant gouvernée par une aristocratie. Il me semble que c’est là le gouvernement qui convient aux Églises ; si actuellement nous ne ie suivons pas exactement, la cause en est la tyrannie des infidèles. » Cf. E. Legrand, Bibl. hell, t. iv, p. 302. L’Église est enseignée et sanctifiée par le Saint-Esprit ; il peut lui arriver d’errer ; de cette erreur peuvent seules nous délivrer la lumière et la doctrine de l’Esprit-Saint, non la lumière et la doctrine d’un homme mortel ; cependant cela est possible aussi par l’entremise de ceux qui remplissent fidèlement leur ministère dans l’Église, tûv tuotojç SiaxovoûvTMv C. xii. Ainsi, pas d’infaillibilité papale possible ; aucun

mortel ne peut être gratifié d’un pareil privilège. En outre, si 1 infaillibilité est accordée à l’ensemble des ministres, encore faut-il que ceux-ci soient fidèles. Cyrille a ajouté le mot 7uaTÔ>ç dans l’édition de 1633. L’indignité des ministres invaliderait donc leur ministère. Sous la plume patriarcale les hérésies s’accumulent à plaisir.

La justification.

« L’homme est justifié par la

foi et non par les œuvres ; quand nous disons la foi, nous voulons entendre le corrélatif de la foi, c’est-à-dire ia justice du Christ, tô t7, ç rriaTîoiç vooû(tev àvaçoptxOv, 6 ::sp saTtv 7) S’.xaioaûvrç toû Xpia-roû, c. xiii, que la foi saisit et nous applique pour le salut. L’application de la justice du Christ, à ceux qui se repentent, tel est le seul principe, qui justifie et sauve le fidèle, q Se -où Xpiaroû Sixaioaûvi, toïç u.s-ravooôa :. 7rpoaa/0eîaa xal 7Tpoacpxeia>6sïaa fzôvr) Sixaioî xal aa>Çei tov mfffov. Ibid. Ce n’est pas à dire que les bonnes œuvres soient négligeables ; elles sont au contraire des moyens nécessaires, [izesx àvayxaïa, non, il est vrai, pour nous sauver car elles ne peuvent être présentées au tribunal du Christ comme suffisant d’elles-mêmes à nous valoir le salut ex condigno, mais pour manifester notre foi et affermir notre vocation. » Ibid. Les thèses calvinistes de la justification par l’imputation de la justice du Christ se retrouvent ici dans toute leur gravité.

Le libre arbitre.

 Sur ce point, Lucar ne se

montre pas moins audacieux. Il professe « que le libre arbitre est mort dans les non-régénérés, ceux-ci étant absolument incapables de faire le bien, et que tout ce qu’ils font est péché. Dans les régénérés, il revient à la vie par un effet de la grâce du Saint-Esprit, et il opère, mais non sans le secours de la grâce. Ainsi, pour que l’homme fasse le bien, il faut que la grâce prévienne le libre arbitre, lequel sans la grâce est blessé, tel cet homme tombé aux mains des voleurs et qui descendait de Jérusalem, en sorte que de lui-même le libre arbitre ne peut et ne fait rien. » C. xiv.

Les sacrements.

Il y a dans l’Église des sacrements

et ce sont ceux que le Seigneur a institués dans l’Évangile. Leur nombre est de deux ; il n’y en a pas davantage car Celui qui les a institués n’en a pas transmis d’autres, xàxsïva S’jo eïvai, -roaaÔTa yàp y)[àïv TrapeSôÔT), xal ô vou.o6é-r/ ; aaç où 7tXetw TrapéScoxsv. C. x v. Ces deux sacrements sont le baptême et l’eucharistie.

L’eucharistie.

 Dans l’eucharistie, écrit Cyrille, « nous croyons et confessons la présence vraie et réelle

de N.-S. J.-C, -rîjv àXï)09j xal Pe6atav 7rapoi><jiav toù x’jpîou r)(iûv’I. X. ou.oXoyoiju.sv xal TUOTeûojxev. C. xvii. Mais il s’agit de la présence que nous procure la foi, et non de celle qui a été imaginée sous le nom de transsubstantiation, jASTOualwaiç. Nous croyons en effet que les fidèles mangent Je corps du Christ, non pas en le broyant matériellement avec les dents, mais en le recevant avec les facultés de leur âme, car le corps du Christ nest pas ce qui, dans le sacrement, est perçu par nos yeux ou mangé, ma’s bien ce que la Foi saisit spirituellement et nous donne, tô yàp aâ>[i.a toù xupîou oùx ëo-riv Ôrcep èv Tcji u.uo"rr, ptco toïç ocpOaXuoïç ôpxTaî te xal Xa[i.6âve~ai, àXX’Ô7rsp uvsofi.a-n.xax ; r tiicttiç Xa60ûaa ^jùv 7rapiaTàvsi ts xal yapîsETat.. Ibid : Il en résulte, à la vérité, que si nous croyons, nous participons au corps et au sang du Christ, tandis que nous n’en retirons aucun bénéfice si nous ne croyons pas. » Ibid. Déjà, en 1619, Lucar avait formulé les mêmes hérésies en écrivant ces lignes à son ami David Leleu de Wilhelm : « Notre opinion est celle qui admet la figure dans ce mystère et un mode de parler sacramentel, tout de même que nous croyons à une manducation spirituelle, en sorte que celui qui s’approche avec foi de la table