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1 i CAR. ŒUVRES


son concurrent, le plus loin possible de Constantinople ; avec l’aide de Schmid, il le fit déporter à Rhodes ; De manières hautaines, maladroit envers les partisans de Lucar, Imprudent dans ses démarches, le nouveau patriarche s’arrangea pour s’aliéner tous les esprits ; en juin 1C36, après une lutte de quelques semaines contre le Synode, il dut abandonner la partie et céder la place à Néophyte d’Héraclée, « nourrisson du vénérable vieillard » Lucar, comme l’écrivait Antoine Léger. Cyrille de Berrhée fut exilé à Rhodes par le même bateau qui devait en ramener Lucar.

Néophyte III d’Héraclée n’était pas un homme dangereux ; au rapport de Schmid, il gouverne « avec l’aide de l’ambassadeur de Hollande et du vieil hérétique Cyrille qui ne le quitte pas un instant ». Son inexpérience des affaires et son peu d’aptitude au gouvernement patriarcal le déterminent bientôt à démissionner. La place étant vide, c’est Lucar qui l’occupe aussitôt et le mois de mars 1637 voit l’inauguration de son septième patriarcat. La joie est grande dans les milieux calvinistes. Un événement vint la troubler, le retour de Cyrille de Berrhée dans la capitale. En vain Cyrille se cache au fond de Stamboul, près des Sept-Tours ; on le surveille de près ; on le redoute surtout ; on essaie de gagner son silence en lui offrant une nouvelle métropole à gros revenus. A ces avances intéressées, il répond qu’il ne se désistera point tant que Lucar « n’aura pas rétracté publiquement, du haut de la chaire patriarcale, ses opinions calvinistes et ses traités imprimés, et qu’il ne sera pas revenu à la vraie foi orthodoxe ». Sur les conseils de Schmid, il écrit au pape et à l’empereur pour leur demander des secours ; il obtient 4 000 thalers. Il monte ensuite un complot contre Lucar et l’accuse auprès du Grand Seigneur d’abuser de son autorité et de son influence pour exciter les Grecs à la révolte ; il prétend même que les Cosaques se sont emparés de la ville d’Azov à l’instigation du traître. Cyrille Lucar est perdu dans l’esprit du sultan ; il se voit déposé et emprisonné le 20 juin 1638. Cyrille de Berrhée remonte pour la troisième fois sur le trône patriarcal. Mais il lui faut se débarrasser de son rival d’une manière définitive. L’exil de 1636 n’a servi de rien ; c’est la mort qui s’impose. L’attentat est combiné entre Cyrille, un pacha, du nom de Bayram et un pope grec appelé Lamerno. Une barque vient prendre Lucar le 27 juin ; elle vogue à destination de San Stéfano où un navire, déclare-t-on au prisonnier, doit le transporter dans une île de l’Archipel. Mais, en route, les soldats turcs passent au cou du condamné le cordon fatal ; ils l’étranglent et lancent son cadavre à la mer ; les restes sont rejetés par les flots ; des amis les ensevelissent en secret ; trois ans plus tard, sous le patriarcat de Parthénios II, on les transporte à l’église patriarcale, puis on les dépose dans le sanctuaire de la Panagia à Halki, une des îles des Princes. Tels sont les faits qui marquent la fin de Lucar. Ils démolissent une légende calomnieuse lancée par les grecs, colportée par les huguenots de tous pays, et suivant laquelle il faudrait imputer aux jésuites la mort tragique du patriarche. En 1639, quand le Synode déposa Cyrille de Berrhée, ses membres déclaraient condamner un intrus « qui avait infligé une mort pénible et ignominieuse, tout le monde le savait, au vieux patriarche Cyrille qui, pendant plus de quarante ans, avait administré les sièges d’Alexandrie et de Constantinople ». Pour ces signataires, l’auteur de la mort de Lucar, c’était donc bien Cyrille de Berrhée.

Ainsi Lucar était monté sept fois sur le trône patriarcal : 1. en janvier-février 1612 ; 2. du 4 novembre 1620 à la seconde moitié d’avril 1623 ; 3. du 2 octobre 1623 à mai 1630 ; 4. de mai 1630 au 4 octobre 1633 ; 5. du Il octobre 1633 à mars 1634 ; 6. d’a vril 1634 à mars 1635 ; 7. de mars 1637 au 20 juin 1638. Le concile de Jérusalem de 1672 était donc mal informé lorsque, dans son cinquième décret, il constatait que Cyrille était remonté trois fois sur le siège de Constantinople. Il l’était beaucoup mieux lorsqu’il refusait d’en faire un saint et un martyr et qu’il le jugeait « atteint de la maladie de Lucifer, suivant l’expression de Basile le Grand, c’est-à-dire du désir immodéré de la prélature ».

II. Œuvres. — 1° La Confession. — De toutes les œuvres de Cyrille, c’est la plus célèbre. Elle parut pour la première fois en latin, en 1629, sous le titre suivant : Confessio fîdei Reverendissimi Domini Cyrilli Patriarchse Constantinopolilani nomine et consensu Patriarcharum Alexandrini et Hierosolymitani, aliorumque Ecclesiarum Orientalium Antistitum scripla, Constant inopoli, Mense Marlio Anni MDCXXIX, in-8° de 8 pages (n° 23 998 de la Mazarine). Le mot Constanlinopoli indique le lieu où la Confession a été écrite, non celui où elle a été imprimée ; mais une des éditions latines a été presque certainement imprimée à Genève. A la page 8 de l’édition que nous citons ici on lit l’importante déclaration suivante : Descripta fuit hœc copia ex aulographo quod propria Reverendissimi Domini Cyrilli manu, quam optime cognos(o, scriptum pênes me manet, et per me facta collatione, eam cum hoc ipso de verbo ad verbum convenire atteslor. Cornélius Haga, Confedœratarum Belgic. Provinciarum pro lempore apud Portam Otlomanici Imperatoris Orator. Voir les traductions françaises et anglaise dans E. Legrand, Bibliographie hellén. du xrw s., t. i, p. 270 sq. Pour répondre aux attaques dont son œuvre était l’objet, Lucar la traduisit en grec au mois de janvier 1631, en la faisant suivre d’un appendice de quatre questions et réponses. Il la fit imprimer à Genève, en 1633, en lui adjoignant le texte latin primitif. L’exemplaire de la Nationale (D 10) porte le titre suivant : KupEXXoo naTpiàp-/o’j KwvaravTtvou 716Xe6>ç ôfzoXoYÎa T7jç /piaTiavixr.ç ma-ztùc, , Cyrilli Palriarchse Constantinopolitani Confessio Christianæ fîdei, Genevæ, Excudebat Iohannes de Tournes, Anno MDCXXXIJI. La bibliothèque publique de Genève possède l’original grec écrit de la main même de Lucar. Signalons également l’édition gréco-latine de la Confession accompagnée des censures synodales portées par Cyrille de Berrhée et par Parthénios ; celle que nous avons entre les mains est intitulée : Cyrilli Lucaris Patriarches Constantinopolilani confessio christianæ fîdei, cui adjuncla est gemina ejusdem confessionis censura synodalis una a Cyrillo Berrhœensi, altéra a Parthenio Patriarchis itidem Constantinopolitanis promulgata. Omnia Grœce et Latine, MDCXLV ; pas d’indication de lieu, mais, à en juger par les particularités externes, le livre a dû paraître en Hollande. La plupart des grecs qui ont écrit et écrivent sur Lucar, mis en présence de cette Confession fort grave, on le verra plus loin. n"ont voulu y voir qu’une pièce forgée par les calvinistes. Ils en ont nié l’authenticité avec la plus triste désinvolture, et sans apporter le moindre argument à l’appui de leur thèse. — 2° En 1909. dans la Néa Siwv, janvierfévrier, p. 17-35. l’archimandrite Chrysostome Papadopoulos de Jérusalem, a publié une Apologie de Cyrille, qu’il avait découverte en 1904 dans un document resté jusqu’alors inédit et appartenant à la Bibliothèque de Genève. Ce document serait une copie authentique de l’Apologie adressée par Lucar en 1634 à la paroisse de la Vierge, à Léontopol (Petite-Russie). Le patriarche s’y proclame orthodoxe. Voir dans la Revue internationale de théologie, 1906, t. xiv, p. 327-330, la traduction française de cette pièce. — 3° Écrit contre les juifs, imprimé à Constantinople, en 1627, par les soins de N’icodème Métaxas. Voir E. Le-