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LUC (SAINT) CHRISTOLOGIE

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Luc l’historien de la mansuétude du Christ, scriba mansuetudinis Christi, cité dans J. Huby, Saint Luc, brochure de l’Action populaire, p. 16.

La divinité de Jésus-Christ.

1. Jesus-Christ

Seigneur. — Il faut noter d’abord comme caractéristique du troisième évangile l’emploi de xûpioç, Seigneur, dans la narration pour désigner Jésus. Dans les trois synoptiques, on trouve plusieurs fois le vocatif Xupisl’appellation honorifique « Seigneur » y est en effet avec celle de « Maître », l’une des plus fréquemment employées par les interlocuteurs de Jésus, en s’adressant à lui. Dans un autre cas, rapporté également dans les trois synoptiques, Matth., xxi, 3 ; Marc, xi, 3 ; Luc, xix, 31, Jésus lui-même se désigne par ce nom. Nulle part ailleurs dans le premier et le second évangile (sauf pour celui-ci, xvi, 19, 20, mais l’emploi de xupioç en cet endroit pourrait être un indice de plus que la finale actuelle de saint Marc n’appartenait pas au texte primitif de cet évangile), xùpioç n’est employé par l’évangéliste pour désigner Jésus, tandis que saint Luc se sert seize fois de cette expression, vii, 13, 19 ; x, 1, 3, 9 41 etc.’Ce’procédé de saint Luc se rattache évidemment à l’usage qui s’était répandu chez les chrétiens du ie siècle de nommer Jésus-Christ « le Seigneur », usage atteste par les Actes des Apôtres, i, 21 ; ii, 36 ; x, 36, où cette expression est mise dans la bouche de saint Pierre, et surtout par les épîtres de saint Paul, où l’Apôtre parle constamment du Seigneur Jésus.

Ce titre de xûpioç exprime la croyance des fidèles au caractère divin du Christ, car, d’une part il est dans la Bible grecque un nom divin, puisque dans les Septante il est la traduction ordinaire de Jahvé, nom hébreu du Dieu d’Israël, et d’autre part, dans l’usage hellénique, il servait d’épithète aux dieux du paganisme ou aux empereurs divinisés. Il faut noter que ce qualificatif ajouté au titre de Messie, xpiaxôç xûpioç, est employé par l’ange pour faire connaître aux bergers de Bethléem ce qu’est le Sauveur qu’il leur annonce, Luc, ii, 11. D’après le P. Lagrange (commentaire in h. 1.), saint Luc aurait ici supprime l’article devant xûpioç et placé ce mot après xptoxôç, contrairement à l’usage ordinaire, pour indiquer que le Christ est le seul Seigneur.

2. Jésus-Messie.

a) Le nom de Christ, équivalent grec de l’hébreu Messie, qui, dans la langue de saint Paul, est un nom propre, synonyme de Jésus, ne figure pas de cette façon dans le troisième évangile, où yptaxéç appliqué à Jésus, ne se rencontre qu’assez rarement, et les deux premiers chapitres mis à part, a peu près uniquement dans les cas où saint Marc l’emploie, Luc, iv, 41, Marc, i, 34 ; Luc, ix, 20, Marc, viii, 29 ; Luc, xxii, 67, Marc, xiv, 61 ; Luc, xxiii, 35-39, Marc, xv, 32. C’est pour se conformer à la vente historique que saint Luc, comme saint Marc et saint Matthieu, n’a pas mis dans la bouche de Jésus un titre que celui-ci, tout en se sachant le Messie, ne voulut jamais s’appliquer directement, sans doute parce que, dans les espérances juives, il désignait le roi temporel qui devait rétablir la gloire d’Israël, et pouvait tromper les auditeurs du Sauveur sur le véritable caractère de sa mission. Jésus fait taire les démons, qui proclament sa royauté messianique, Luc, iv, 41 ; il ne coni à être reconnu Messie que par les Apôtres dans la confession de Pierre, ix, 20, — encore leur enjoint-il le silence — et, durant son procès, xxii, 67-71, en ondanl a la question précise des autorités qui lent bien compris, comme l’avait compris la foule qui, à son entrée à Jérusalem, avail acclamé Jésus roi, mie le roi envoyé de Dieu, mx, : ’.x, que toute son’ion avait un caractère nettement messianique. I >ani les deux premiers chapitres du troisième évangile, Jésus CSl ioésenté nettement comme le Messie

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par l’ange de Bethléem, ii, 11, et reconnu comme tel par Siméon, ii, 26. Noter dans ce dernier passage l’expression : Christ du Seigneur ; en deux autres endroits, ix, 20 et xxiii, 35, saint Luc emploie la forme Christ de Dieu, au lieu du simple /piOTOÇ qu’on lit aux endroits parallèles du second évangile.

b) Le titre par lequel Jésus se désigne lui-même le plus souvent dans le troisième évangile, comme dans les deux autres synoptiques, est celui de Fils de l’homme (25 fois dans saint Luc), et, pour saint Luc’comme pour saint Marc et saint Matthieu, il semble bien que ce soit dans la plupart des cas un vocable à portée discrètement messianique, en rapport avec le Fils de l’homme de la prophétie de Daniel, et du livre d’Hénoch. Les passages entièrement propres à saint Luc où figure cette expression, xvii, 22 ; xviii, 8 ; xix, 10 ; xxi, 36 ; xxiv, 7, ne font ressortir aucune divergence de sens avec le premier et le second évan gile, et n’appellent aucune observation particulière.

3. Jésus Fils de Dieu.

Le terme de Fils de Dieu n’implique pas nécessairement par lui-même une filiation naturelle supposant une participation à la nature divine, il peut être une pure métaphore comme dans Luc, vi, 35, où Jésus dit de ceux qui aimeront leurs ennemis qu’ils seront les fils du Très-Haut, viioL’Yi|hotou. Il a aussi dans certains textes évangéliques une signification simplement messianique. C’est dans ce sens que le diable, dans la scène de la tentation, iv, 3, 9, et les démons que Jésus chasse du corps des possédés, iv, 41 ; viii, 29, donnent au Sauveur le nom de Fils de Dieu : l’équivalence dans ce cas des deux titres, de Fils de Dieu et de Messie ressort nettement de l’explication que donne saint Luc du silence imposé par Jésus aux démons, « parce qu’ils savaient qu’il était le Christ ». iv, 41.

Beaucoup de critiques se refusent à admettre que dans les synoptiques l’expression « Fils de Dieu » ait, au moins en certains passages, une signification plus haute et plus profonde que celle de Messie. Sur cette question, cf. les articles Fils de Dieu, t. v, col. 22912295, et Jésus-Christ, t. viii, col. 1205-1206. Il suffit de signaler ici quelques particularités de l’emploi de Fils de Dieu dans le troisième évangile.

a) Il faut noter d’abord que, dans la confession de saint Pierre, la déclaration du chef des apôtres porte seulement, dans saint Luc ix, 20, comme dans saint Marc : « Tu es le Christ de Dieu », tandis que saint Matthieu ajoute : « le fils du Dieu béni ».

6) Dans la scène de la Transfiguration, lorsque la voix céleste se fait entendre, proclamant Jésus Fils de Dieu, ix, 35, le sens transcendant de cette filiation divine est moins nettement marqué dans le troisième évangile que dans saint Matthieu et dans saint Marc, si la véritable leçon est ici, non pas comme dans le texte reçu, influencé sans doute par les deux autres synoptiques : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, <£ya7n]T6ç, mais : « Celui-ci est mon Fils élu.èxXeXeYuivoç » ! oltt est en effet une appellation désignant le Messie dans les paraboles d’Hénoch, et saint Luc, xxiii, 35, la met, comme équivalent de Christ, dans la bouche des magistrats juifs qui insultent le Sauveur crucifié. Il semble donc que, dans saint Luc, la voix céleste proclame surtout la mission divine du Sauveur. Au baptême de Jésus par contre, la voix céleste dit : « mon Fils bien-aimé », dans saint Luc, iii, 22, comme dans les deux autres synoptiques.

c) Dans l’interrogatoire de Jésus par le sanhédrin, xxii. B8-71, la distinction est plus nettement mai

,, ., , galnl Luc que par saint Matthieu et par saint

Marc entre les deux expressions 4e Christ et de Fils

, i, . i ueu. < mi demande d’abord a Jésus s’il est LeChrist, Puis, quand il a déclaré que le Fils del’homrm

à la droite de la puissance de Dieu, les sanhr.lii-