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LITURGIE. LE MAGISTÈRE DE L’ÉGLISE SUR LA LITURGIE


rang parmi les sacrements, non seulement par sa dignité intrinsèque, mais encore par son importance liturgique. On peut dire que la messe est devenue un élément dans l’accomplissement de tous les sacrements et des plus importants parmi les sacramentaux. Il est certain que chacun des sacrements a son autonomie et peut exister indépendamment de la messe, mais en fait, au moins dans la liturgie ancienne, ils étaient rattachés au rite de l’eucharistie, comme le baptême et la confirmation qui s’incorporaient dans le sacrifice de la messe, ainsi que nous pouvons le constater à la vigile de Pâques et de la Pentecôte. Il faudrait raisonner de même pour l’ordre et le mariage, les funérailles, pour la consécration des vierges, la bénédiction des abbés, le sacre des rois et autres sacramentaux qui comportent la célébration de la messe. Pour avoir la potion complète de l’eucharistie dans la liturgie, il faut donc l’étudier d’abord en elle-même, I uis dans ses relations avec les autres sacrements et les mentaux, puis dans les cérémonies du jeudi saint, du vendredi et du samedi saints, et encore dans la fête du Saint-Sacrement, les saluts et les adorations, etc.

La liturgie, si je ne me trompe, nous fait aussi pénétrer plus avant dans la notion du sacrement de pénitence. Le rite de la pénitence dans le rituel actuel est des plus simples ; mais si on étudie la pénitence dans ses origines, dans la liturgie des pénitents, au mercredi des cendres et, pendant le carême, dans le rite de la réconciliation des hérétiques et les divers pénitentiels, clic prend une tout autre signification.

Pour l’extrème-onction, on trouverait de nombreuses données dans les rituels qui contiennent tant de prières et de rites divers pour les malades. Nous en dirons autant pour le mariage qui, il faut l’avouer, dans la liturgie romaine actuelle est réduit à un rite assez pauvre, mais qui, dans les liturgies anciennes, reçut de riches développements.

Enfin, pour l’ordre, il suffira de rappeler que la controverse récente sur les ordinations anglicanes a porté presque entièrement sur l’argument liturgique, et de citer les traités comme ceux du cardinal Van Rossum, de l’abbé Saltet, ou de l’abbé Many, pour voir le parti que certains théologiens ont su tirer de l’étude des rites anciens. Il faudrait ajouter à leurs noms ceux du P. de La Taille et de Mgr 1 Satifi’ol, pour l’eucharistie, ceux du P. Galticr, et du P. d’Alès, pour la pénitence. Le P. Juenin, au xviiie siècle, avait déjà donné l’exemple dans son commentaire historique et dogmatique sur les sacrements. Dr sacramentis, ediiio novissima (tertia), Venise, 1761, et en français, Théorie et pratique des sacrements, Paris, 1736.

VIII. LE MAGISTÈRE Dl L’ÉOUSE SI H I LITURGIE.

— Les textes quc nous citerons dans ce paragraphe (textes du Nouveau Testament, des Pères el (les écrivains ecclésiastiques, des conciles et des papes) prouvent que l’Église s’est toujours reconnu le droit d’exercer son magistère sur la liturgie, quelle qu’ait été d’ailleurs la liberté laissée, surtout à l’origine, à l’inspiration des prophètes ou « les spirituels, et à tous ceux qui célébrai’ni le s mystères.

Le texte de saint Paul est classique. Il règle dans un chapitre bien connu, I Cor., xiv. l’ordre à suivre dans les reunions chrétiennes, alors même que les charismes étaient répandus dans la plupart des lideles : Onuuti

honeste et secundum ordtnem fiant. C’esl ce que l’au itres épttres. n se reconnaît le droit d

blir des règles pour le service divin, même avec les prophètes Inspii

i i Didacht de ion côté, établit des règles pour le

divin. NoUI avons de nombreux textes qui

prouvent durant « les siècles la liberté de cette Impro ition dans l’Église. Voir Improvisation dans notre Diction, d’urrhiol.

Mais ces textes mêmes démontrent que cette liberté a ses limites, et que l’Église, en ayant expérimenté les dangers, s’est efforcée de la restreindre et d’établir dans l’exercice du culte une discipline à laquelle chacun devait se soumettre.

Ces règlements s’étendirent d’abord aux lectures qui étaient un des éléments essentiels des synaxes. Nous avons dit comment l’Église intervint par la fixation d’un canon pour déterminer quels livres devaient être lus, quels autres supprimés. Voir Lec/ares, col. 833.

La même préoccupation d’orthodoxie et d’unité dicta d’autres mesures. C’est ce que prouvent les textes suivants.

Non oportet ab idiotis psalmos composites et vulgares in Ecclesiis dici, neque libros qui sont extra canonem légère, nisi solos canonicos novi et veterîs Testamenti. Conc. Laod., a. 343-381, can. 59. Mansi, Concil.. t. u. col. 590. Ce décret visait Bardesane, Paul de Samosate, Apollinaire qui employaient de ces chants.

Un synode d’Hippone, a. 393, can. 21, porte ce décret.

l"t nenio in precibus, vel Patrem pro Filio, vel Filium pro Pâtre nominet. Et quum ad altare assistitur semper ad Patrem dirigatur oratio. Et quascumque sibi preces aliquis describit, non eis utatur, nisi prias eas cum instructioribus fratribus contulerit. Cf. Collectio canonum Ecclesix Hispanm, Madrid, 1808, col. 063.

Et un autre, celui de Milève en 402 :

Placuit etiam et illud, ut preces vel orationes, seu missje çnia probatse fuerint in concilio, seu traditiones [ni. prsefationcs ] sive commendationes seu manus impositiones ab omnibus celebrentur : nec aliqua <x bis omnino dicantur in ecclesia nisi qun> a prudentioribus tractata et comprobata in synodo fuerint, ne forte aliquid contra lidem vel per Ignorantiam vel per studlum si t compositum. Coll. canon. Ecclesiæ Hispanm, Madrid, isns, col. is : >.

Le can. 103 du Codex canonum Ecclesia africanæ s’exprime en des termes analogues :

Placuit etiam hoc ut preces quæ probatse fuerint in concilio sive prsefationes, sive commendationes. seu manus impositiones, ab omnibus celebrentur, nec alise omnino contra fidem pneferantur ; sed qu : ecumquc a prudentioribus fuerint collectadicantur. Mansi, Concilior., t. iii, col. 807.

Même recommandation dans le can. 23 du II « concile de Carthagc, 397.

Une autre preuve quc la liberté d’improvisation qui avait régné à l’origine était limitée, c’est le soin avec lequel se transmettent certaines formules. L’auteur du De sacramentis longtemps attribué à saint Ambroise et qui, en tout cas, est de son temps et de sa province, rapporte tout au long les prières du canon, ne varietur. Vis scire, dit-il, quia verbis cmleetibus consecratur ? Accipe quss sunt verba. dictt sacerdos ; Far nobis. inquit, hanc oblationem, adscriptam, ratam, ralionabilem, et le reste.

On peut remarquer a cette occasion qu’il ne reste pas de trace d’un canon de la messe ni dans la liturgie gallicane, ni dans la liturgie ninbrosicnne, ni dans les liturgies celtiques. On peut dire évidemment, surtout pour les liturgies gallicanes, que nous ne les a uns qu’A l’état fragmentaire, mais il est curieux de voir que, même dans les livres de ces liturgies, on trouve le canon romain. N’est-ce pas une preuve que, pour t-< 11. partie, la plus importante de toute la liturgie, une

formule s’était Imposée qui était considérée comme

obligatoire ? du reste c’est ce que vont nous montrer d’autn

i.i lettre du pape Vigile à Profuturus, évéque de Braga en 538, témoigne des ce moment du /rie des