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LIBERTÉ MORALE. DE CONSCIENCE, DES CULTES


ment juste, qui, loin de détruire ou de diminuer en aucune sorte la liberté des hommes, ne fait que la protéger et l’amener à sa perfection, car la vraie perfection de tout être, c’est de poursuivre et d’atteindre sa fin ; or la fin suprême vers laquelle doit aspirer la liberté humaine, c’est Dieu. »

La liberté de conscience.

1. Rappel des notions

relatives à la conscience. — Le mot de conscience s’applique à deux réalités distinctes. Il désigne d’abord la conscience psychologique, c’est-à-dire l’aperception par laquelle l’homme se connaît lui-même dans une vue intérieure. La conscience morale implique la psychologique, mais y ajoute un rapport avec la règle des actions humaines. Elle cherche et contrôle leur conformité avec la loi morale. Se trouve-t-elle en face d’un avenir à orienter ? La conscience prononce un double jugement : un jugement de conformité entre l’ordre à observer et L’action qu’il s’agit de faire ou d’omettre ; un jugement d’obligation qui est une excitation ou un lien, suivant que l’acte en question est conseillé ou commandé, déconseillé ou proscrit. S’agit-il d’un passé à juger ? La conscience intervient sous une autre forme, elle excuse ou accuse, elle réprimande, elle remplit de remords. Voir Sum. theol., I », q. lxxix, a. 13. La conscience morale implique une double connaissance, celle de la volonté supérieure manifestée, et celle des actions personnelles dans leur rapport avec cette volonté.

2. Dépendance foncière de la conscience morale. — (".’est de la conscience morale qu’il est ici question. Cette conscience ne saurait être libre ou indépendante des lois ontologiques de la vérité. L’adhésion au vrai connu est un droit ; l’adhésion à l’erreur ne peut pas constituer un droit véritable, car cette adhésion répugne à la tendance naturelle de l’intelligence, destinée à connaître la vérité. On ne saurait donc raisonnablement prétendre que l’homme ait le droit ou la faculté morale de penser ou de juger, comme il lui plaît, sans égard aux lois obligatoires pour sa conscience, conscience certainement liée par des règles auxquelles, sans doute, l’homme peut physiquement se soustraire en vertu de son libre arbitre, mais qu’il ne peut moralement transgresser, sans manquer à son devoir, sans aller contre l’ordre établi de Dieu. Donc la liberté ou l’indépendance de la conscience à l’égard de toute loi est une chimère, qui ne saurait être réclamer par aucun homme ou proclamée par aucun législateur.

Les lois qui lient la conscience humaine sont de diverse* sortes ; H suffit de rappeler ici que toute loi juste, émanant d’une autorité qui a droit de nous commander, lie notre conscience suivant l’intention expresse ou Implicite du législateur.

.’(. Sens acceptable du mot liberté de conscience. — a) Si l’on entend par liberté de conscience le droit de ne rendre compte qu’à Dieu seul de ce que nous pensons Intérieurement, il est bien certain qu’aucune autorité n’a le droit de demander compte à ses sujets de leurs actes purement internes. Aclus mère interni potestati cii’ih nullalenus subfacent, utpote quai nonnisi bono eommuni ertrmn prsutt, I.ehmkuhl, Theologia morallt, t. i, n. 128. Quant : i V Église, c’est en vertu de su mission divine et spirituelle qu’elle I le droit, au tribunal de l.i pénitence, de demander compte à ses enfants de leurs actes intérieurs on tout ce qui regarde

le salut et la perfection chrétienne. Santi, Prtelecti

canonlcl, Ratisbonne, 1898, t. i. tit. a, a. 15,

Ilque de façon ludlcieuie : Habet uttque Ecdesta forum pœnltentiale, m qno flldtcat de internis nninu rogilationtbui M litre fudlcta rtëplclunt directe et pro/rir tndtvldua rt non chrtatlanam toclelatem. in bot

foro minttter i entât Ipsum Deum,

qui in eo CUSU rtirnm sinripil non de Uîtiveno COtU

Christianorum, sed de bono individuali particularis fidelis. In hoc foro agitur judicium potius coram Deo quam coram Ecclesia. Igitur hoc tribunal non est proprie diclum tribuncd et forum Ecclesise, sed tribunal et forum conscienlise coram Deo. Il est également incontestable que l’Église peut, par ses lois, directement prescrire ou prohiber des actes externes même occultes, et indirectement des actes internes qui ont, avec les externes, une connexion nécessaire. Nulla est controversia. enseigne le P. Wernz, Jus Decretalium, Rome, 1905 1. 1, p. 114, Ecclesiam suis legibus posse directe præscribere vel prohibere actus externos eliam occultas, et indirecte actus inlernos, qui cum actibus externis necessario coheerent. C’est ainsi qu’il faut reconnaître le droit, qu’elle exerce au besoin, de commander en son for extérieur une adhésion interne à ses enseignements ou à ses décisions. On en trouve un exemple remarquable dans la bulle Inefjabilis Deus, qui proclame le dogme de l’Immaculée Conception. La définition est suivie de la plus sévère des sanctions à l’adresse de ceux qui auraient la présomption de professer intérieurement une doctrine contraire. Quapropler si qui secus ac a Nobis defmitum est, quod Deus avertat, prsesumpserint corde sentire, ii noverint ac porro sciant, se proprio judicio condemnalos, naufragium circa fidem passos esse et ab unitale Ecclesiee defecisse. Denzinger, n. 1641. Quant aux actes purement internes, d’après le sentiment commun des théologiens et des canonistes ils ne sauraient être, en vertu de la juridiction ecclésiastique seule, directement commandés ou prohibés, au for externe, par des lois humaines. Ai actus merc interni, continue le P. Wernz, ibid., vi sclius jurisdictionis ecclesiasticæ directe in foro externo legibus humanis prsecipi vel prohiberi juxta communcm sententiam theologorum et canonistarum non possunt. Cf. Suarez. De legibus, lib. IV, cap. xiii.

b) Si, par liberté de conscience, on entend le droit d’adhérer à telle ou telle opinion suffisamment probable. licite ou libre, ce droit n’est pas contesté : ce qui revient à dire que la conscience humaine est libre dans ses jugements pratiques, quand aucune loi ne restreint sa liberté native de penser ; mais quand une loi véritable lui prescrit tel ou tel jugement pratique, elle doit obéir à cette loi.

Et, comme la loi n’est manifestée à l’homme, comme règle immédiate de ses actes, que par la conscience, il est tenu de suivre ce que lui dit sa conscience, quand elle est vraie et droite, et même quand elle est invinciblement erronée, parce qu’alors il agit prudemment par suite de sa persuasion invincible. Invincibiliter erronea conscientia rêvera régula agendi evadit : hanc tenemur sequi præcipientem, permittenlem sequimur sine cutpa. I.ehmkuhl, op. cit., n. 43. Si donc, par suite d’une conscience invinciblement erronée, un homme croit que t< I acte bon est mauvais ou réciproquement, i ! n’a pas le droit de poser l’acte bon qu’il juge mauvais ; et il peut ou doit poser l’acte mauvais qu’il juge bon, sans avoir toutefois objectivement le droit ou la faculté morale de le poser, puisque la morale réprouve cet acte. Il suit dl là que, si la conscience invinciblement erronée peut imposer le devoir de mal faire, quand l’homme croit bien.mil’, elle ne saurait lui donner le droit de mal faire, parce que le droit ; m mal répugne dans les termes, et que le droit a pour fondement nécessaire la vérité Objective, tandis que le devoir peut naître d’une erreur Subjective, et qu’il ne répugne pas qu’un homme ail

h devoir de faire une action mauvaise qu’il croil un i"

Ctblement être bonne et obligatoire pour lui. d’autant que, s’il s’abstient de la faire, il croirait agi] mal, <’par là même il iolerait la loi divine qui lui commande de ne jamais rien faire contre le dtetamen de sa conscient I

i nt’mon peut entendre, par liberté de conscience,

le droit que possède l’homme de ne pas ittt oiitrnint pal