621 LIBÉRALISME CATHOLIQUE. LES SUCCESSEURS DE LÉON XIII 622
L’Action libérale populaire, p. 1. La gauche finit par se fondre dans le groupe de la démocratie chrétienne ; elle y entraîne A. Leroy-Beaulieu, qui écrit alors Les doctrines de haine, 1902, Chaîne qui publie, Les catholiques français et leurs difficultés actuelles, P. Viollet qui discute de nouveau la valeur doctrinale du Syllabus : L’Infaillibilité et le « Syllabus », 1905 (à l’Index, 1906). « Trois ordres d’idées, dira le numéro 1 de la revue de la démocratie chrétienne. Demain, 27 octobre 1905, retiendront notre attention : la liberté politique, conforme à la morale fondamentale d’une, religion qui a libéré les esclaves ; le devoir social, faute de quoi l’Évangile ne serait qu’un insuffisant traité de résignation à l’usage des déshérités ; le progrès intellectuel, car toutes les vérités, rayons épars d’un même foyer divin, sont solidaires les unes des autres ». — « Sachons nous élever au-dessus de l’esprit de secte et de l’esprit de parti, lui écrivait, le 10 novembre, A. Leroy-Beaulieu. Étouffons en nous toutes les intolérances et tous les fanatismes et ouvrons tout grands nos yeux sur le vaste monde. »
c) Les deux écoles libérales et la Séparation. — Cependant la démocratie française, maîtresse du pouvoir depuis 1877. n’avait cessé, sauf de rares accalmies, de traiter l’Église en ennemie. Au premier rang de ses préoccupations, elle semblait mettre celle de se libérer de l’Église et de tuer son influence. Sans parler des mesures, qui enlevaient à l’Église des privilèges traditionnels et justifiés, ou l’attaquaient dans ses ressources, elle l’avait banni de l’enseignement d’État. Le ralliement, qui ne pouvait donner ses fruits, s’il devait les donner, qu’à la condition d’être universel et vrai, que d’ailleurs les catholiques intransigeants avaient refusé, et que beaucoup d’autres n’avaient accepté que du bout des lèvres, n’avait pas desarmé la haine. Or, en mai 1902, les radicaux arrivaient en majorité à la Chambre ; un des leurs, Combes, prenait le pouvoir avec le ministère de l’Intérieur et des Cultes. Depuis le discours de Belleville, 1809, la séparation de l’Église et de l’État figurait au programme radical.
Etl novembre 1904, Combes crut l’heure venue de réaliser cette séparation. Commencée le 23 mars 1905 sous le ministère Bouvier, qui avait remplacé le ministère Combes tombé le 10 janvier, la discussion fut close à la Chambre le 3 juillet, au Sénat le 6 décembre et la loi promulguée le 9.
Lamennais, dans [’Avenir, avait réclamé la séparation comme un bien pour l’Église de France et à peu près comme un idéal pour l’Église dans le monde moderne et l’humanité future. Grégoire XVI avait condamné le principe, comme devait le faire encore le Syllabus. On pouvait trouver dans la parole de Montalembert, i’Églis< libre dans l’Étal libre un écho lointain de la parole de Lamennais, niais en somme, les libéraux catholiques « le la seconde génération. même à leurs heures d’hostilité envers le second Empire, n’appelèrent point de leurs vœux la rupture du i encordai Le 3 déi embre 1867,.iules Simon. A la tribune du Corps législatif Invitera vainement les catholiques de i ran<e à d< gager l’Église des liens concordatain lises libres dans l’Étal libre. Sa parole n’aura d’autre écho que le discours de Gambetta a Belleville. Mais vingt ans plus tard les conditions auront changé Depuis dix ans. disait Mer d’ilulst en 1881’, . nous avons vu l’impiété… transformant les
ions antireligieuses en système de gouverne
ment Dès lors, la raison qui, avant toute autre, avait
fait désireT a Lamennais la séparation, le choix des
inspirera également aux catholiques Intran
mts et à quelques autres le désir de la séparation Cl Baudrillart t ii, p. 246-248. Tant qu’il
vécul au contraire, Léon XIII, et avec lui les évéques
dits libéraux tirent tout pour éviter la rupture. Avec ses imperfections, leur semblait-il, le régime concordataire valait encore mieux pour l’Église, vu les circonstances, qu’une séparation inévitablement hostile.
A l’avènement de Pie X, et en France du ministère Combes, la logique des situations que rien n’arrêtait plus et des questions secondaires et toutes personnelles, auxquelles en d’autres temps on eût trouvé une solution pacifique, amenèrent la rupture brutale. Et l’on eut la loi de séparation. L’Église allait-elle l’accepter ? Or les mêmes catholiques qui, à d’autres heures, souhaitaient la séparation, refusèrent d’accepter celle qui leur était imposée. C’est qu’elle leur venait du seul gouvernement de la Bépublique qui avait entendu donner à l’Église de France un statut nouveau, comme si elle n’avait pas son chef à Borne C’est qu’ensuite ce statut était l’œuvre d’un parti notoirement hostile à l’Église. De ce parti pouvait-il venir une loi qui ne fût pas funeste ? Si le parti radical avait hésité à proposer la séparation, c’est qu’il ne trouvait pas la France encore assez adaptée à ses propres sentiments. Examinant la loi dans ces dispositions, ces catholiques y découvrirent de multiples embûches, et s’opposèrent à son acceptation ou, plus exactement, à la mise en exécution des mesures prises par la loi pour assurer la continuité des cultes ; ils s’opposèrent même à toute conciliation. En revanche, les libéraux plus accentués et les démocrates chrétiens étaient prêts à cette acceptation. La séparation, c’était l’affranchissement de l’Église, et, comme Lamennais l’avait répété, l’Eglise sûre des promesses divines n’avait pas besoin des appuis humains. Vingt-trois personnages d’opinions politiques diverses, mais tous représentants connus de la pensée française, esprits soucieux des intérêts de l’Église et de la paix sociale, « les cardinaux verts », comme les appela, non sans quelque ironie, la presse catholique intransigeante, groupés autour de Brunetière, sollicitaient confidentiellement l’épiscopat français que l’on « subît » la loi de séparation pour « profiter des possibilités d’organisation » qu’elle laisait à l’Église.
Pie X avait condamné le principe de la séparation par l’encyclique Vehementer nos du Il février 1906 et par l’allocution consistoriale du 21. Il n’en pouvait être autrement. Bcstait à trancher la question pratique, c’est-à-dire a examiner la loi dans l’hypothèse. L’Église acceptait ailleurs, aux États-Unis, par exemple, la séparation comme un l’ail nécessaire, mais l’état de la France justifiait-il celle situation et la loi per mettait-elle de l’accepter ? L’épiscopat français, consulté a la fin de mai. écarta l’idée d’une acceptation pure et simple, mais la majorité se prononça pour une solution de conciliation. Rome ne jugea pas les choses du même point de vue ; l’encyclique Graotssimt officii. du 10 août, interdit la mise en œuvre de la nouvelle loi des cultes.
2. Autour tlu libéralisme catholique, — Ce ne fut pas le seul déboire du libéralisme catholique sous le pontificat de Pie X. Il se trouva sinon directement frappé, du moins atteint devant l’opinion catholique par la condamnation du modernisme < ! du sillon.
a) Condamnation du modernisme. Le libéralisme
catholique n’est pas un protestantisme, on l’a dit. m lendit principalement a affranchir l’Église de il taf pour lui assurer la liberté d’aelion : il voulut adapte) cette action au monde moderne. Il put se tromper sur les moyens ou dans l’appréciation des choses, niais tel
fut son Lui essentiel. Or, il était dans, logique du mouvement de chercher a moderniser l’enseignement
de l’Église, du moins dans sa forme. Lamennais l’avait dit déjà el avail même tait le plan des t ransfoi nia lions utiles a sou gré. Il entendail bien ne pas atteindre