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589 LIBÉRALISME CATHOLIQUE. LUTTES D’IDÉES SOUS PIE IX

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touché, sur tant de points, à des matières religieuses d’une nature si délicate, sans remplir mon devoir de catholique, en soumettant toutes mes expressions comme toutes mes opinions à l’infaillible autorité de l’Église. » Théologiquement, le premier discours était inoffensif, et le second, avec les précautions qu’il avait prises, pouvait paraître orthodoxe. Mais il pouvait aussi s’interpréter autrement. Broglie, qui l’avait lii, l’avait trouvé dangereux : « La lecture, dit-il, me laissa un grand sentiment d’inquiétude. C’était la thèse de la liberté absolue de tous les cultes, par tout pays et en tout temps. » Mémoires (1851-1870), ix, Autour du Syllabus, dans Revue des Deux Mondes, 1 er nov. 1925, p. 118-142. Montalembert « avait évidemment beaucoup plus songé à contredire ses adversaires de Paris qu’à contenter ceux de Malines. » Et, en effet, s’il s’était défendu de présenter l’état social moderne comme l’idéal, il avait parlé de la liberté religieuse avec un tel enthousiasme qu’un autre idéal pouvait difficilement lui être prêté. Le moment était d’ailleurs mal choisi. « C’était de l’huile bouillante, jetée sur un feu qui allait s’éteindre, » continue Broglie, ibid., p 126.

Nulle part l’impression ne serait plus mauvaise qu’à Rome. C’est au nom des principes modernes que le Piémont avait en partie dépouillé le pape, et Montalembert avait donné comme titre à ses discours la formule même par où Cavour tentait de justifier ses spoliations. Enfin le nouveau royaume d’Italie introduisait alors dans ses lois l’indifférentisme religieux ! Averti, Montalembert essaya de parer au danger. Dès la clôture du Congrès, une note communiquée au Journal de Bruxelles et reproduite dans le Correspondant du 25 septembre, le défendit d’avoir attaqué le pouvoir temporel, quand il avait parlé

de cette horrible confusion des deux pouvoirs, qui est l’idéal de toutes les tyrannies ». La papauté, répond-il. doit être indépendante. « Or, le plus haut degré de l’indépendance, c’est la souveraineté » et si, dans le domaine pontifical, les deux pouvoirs sont confondus, c’est n/in qu’ils puissent être divisés partout ailleurs, Rien ne prouve mieux la nécessité de cette royauté que la stérilité des combinaisons inventées pour s’en passer. Quant au marché proposé par Cavour, troquer le pouvoir temporel du pape contre la liberté universelle de l’Église, je réponds : Non, continue Montalembert, car la liberté la plus sacrée ne saurait s’acheter au prix de l’injustice. » Correspondant, 25 septembre 1863, p. 30, a. 2. Un mois après, il publiait une Note explicative sur la formule : L’Église libre dans l’Etat libre, où, revendiquant la paternité de cette formule, il séparail une fois de plus sa cause île celle de C.avour. rappelant que le 15 avril 1801, par une lettre publique, il avait dénié à ce ministre

assez de force et assez de bonne foi » pour réaliser

cette formule, puisqu’il ne réalisait en érilé qu’une c dépouillée dans un Étal spoliateur. Regretlanl en outre de n’avoir point dit : L’Église libre dans an pays libre, maint enant néanmoins la formule primitive, et l’opposant à celles-ci : l’Église esclave dans un pays esclave, l’Église esclave dans un pays libre, il la réclamai I pour les catholiques libéraux. Elle dit-il, a les distinguer des catholiques Intolérants qui ne veulent pas [’Étal libre et des libéraux Inconséquents, qui ne veulent pas l’Église lib

Mais il eut beau faire, ses discours n’i-chappèi eut pas à la Censure de ses adversaires. Malines même.

au milieu de l’enthousiasme général, il j avail eu le silence désapprobateur de Wlseman et du nonce. Ledochowskl ; le Momie laissa entendre que ces dis

avaient été factieux : l’évêque de Poitiers. Pie.

les dénonça à Rome et sa plainte rencontra celli d’autres i vêqu » s fran< ais, belges, Irlandais et anglais.

La Civiltà fait écho. Le cardinal Pitra, autrefois libéral, s’agite. Montalembert se défend. Le 19 décembre, il écrit au secrétaire d’État, le cardinal Antonelli ; des laïques, comme Deschamps, ministre d’État en Belgique, des évêques, surtout Mgr Dupanloup, interviennent en sa faveur. Pie IX hésita, puis finalement il résolut de ne point rendre le blâme public. Ce fut une lettre d’Antonelli qui porta ce blâme à Montalembert dans les premiers jours de mars 1864. Mais, vainement, celui-ci publiait-il dans le Correspondant de mai 1864 un article intitulé : Le pape et la Pologne, où il exaltait le souverain pontife qui avait protesté contre les vengeances russes en Pologne, il ne reçut de Rome aucune approbation. Au contraire, un jeune Belge, du Val de Beaulicu, qui avait réfuté les discours de Malines dans une brochure intitulée : L’erreur libre dans l’État libre, recevait un bref de félicitation. Cf. Lecanuet, op. cit., t. iii, p. 380, 381.

Au deuxième Congrès de Malines, les derniers jours d’août et les premiers de septembre de cette même année 1864, Montalembert ne parut pas, mais Dupanloup donna, le 31 août, un long discours sur l’enseignement, et le 3 septembre le P.Félix en prononça un autre : Sur les trois phases de la vie de l’Église, où il montrait que l’Église n’a Tien à craindre, en aucun sens, de la liberté.

Le libéralisme catholique s’affirmait, mais la doctrine opposée s’affirmait elle aussi, non seulement dans les colonnes du Monde, ou de la Civiltà cattolica, en passant dans des Lettres pastorales, mais dans un acte épiscopal de longue haleine, venant de l’évêque français le plus en vue avec Mgr Dupanloup, Mgr Pie, chef religieux reconnu du catholicisme intransigeant. En juillet 1861, dans ses Entretiens avec le clergé durant les exercices de la retraite, c. v-vn, il signalait des erreurs doctrinales dans cette phrase de Montalembert au congrès de Malines : « Il en sera de cela comme de la dîme, de l’immunité ecclésiastique et d’autres grandes institutions très nécessaires et très légitimes dans, lcur temps, mais dont la nécessité disparaît avec le temps, et, une fois disparues, personne n’y pense plus. Il y a cent ans, personne ne concevait une Église, sans dîmes et sans immunités. Aujourd’hui, dans les pays où l’Église est le plus libre et le plus féconde, qui donc y pense encore ? » Le langage de l’orateur manquait à coup sûr de précision théologique. L’évêque relève longuement les raisons pour lesquelles « l’immunité de l’Église se rattachant à un droit divin » ne saurait être ni assimilée à la dîme, ni sacrifiée de gaité de cœur. Et, opposant le concordat autrichien de 185.") à « l’axiome énigmatique de l’Église libre », il concluait que la. et non ici, se trouvait la vraie conciliation entre le droit public chrétien et les neces sites du fait social moderne ». Œuvres, t. v. p. 335

Ce n’était là qu’un prélude. Peu après, l’évêque publiait sa Troisième instruction synodale sur les principales erreurs du temps présent. juilli t 1862-B0Û1 1863. Il avait hésité à la Jeter dans le domaine public, mais

Home l’y avait encouragé. Il y attaquait te naturalisme

sous toutes ses formes et. pour finir, le naturalisme politique, c’est adiré le système d’après lequel l’élé ment civil et social ne relevé que de l’ordre humain et n’a aucune relation de dépendance envers l’ordre sur

naturel i, ou encore. la sécularisation désormais absolue des lois, de l’éducation, dû régime adniinis t rat if. des relations internationales. qu’il trouve dans

le libéralisme catholique Ç kxi. Il j un programme

positif de polit i que chrétienne, un droit chrétien auquel les nations sont tenues de se conlornicr II n’est a

aucune époque ni chimérique, ni Intempestii. le i ont ordal autrichien en est la preuve, et le maintien de l’idéal chrétien est i beaucoup d’égards utile et salutaire Mieux vaut s’abstenir de prendre part l la