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    1. LIBÉRALISME CATHOLIQUE##


LIBÉRALISME CATHOLIQUE. LE LIBÉRALISME MODÉRÉ

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plus est, toute la lutte pour la liberté de l’enseignement a reposé sur ce sens relatif. »

D’autre part, la défection de Lamennais fît la joie des libéraux, mais elle n’eut d’autre conséquence pour l’Église que cette défection. « Acteur dans tout ce qu ? s’était passé », reconnaissant « avoir contribué à l’exaltation des esprits », Lacordaire, après les Paroles d’un croyant, crut même « devoir élever la voix » et publier en mai 1834 ses Considérations sur le système philosophique de M. de Lamennais, où sa critique devançait l’encyclique Singulari. Un autre menaisien, d’Eckstein, le contredit dans la France catholique, 1834, mais ne suivit pas davantage Lamennais. Le groupe se trouva donc désorganisé, dispersé, quelque peu bu mi ié et suspect.

2° Réveil catholique. Les libéraux amendés, Montalembcrt et Lacordaire (1834-1841). — Ces luttes ont rendu vie aux catholiques. Ils ont pris conscience de leur puissance et de leurs devoirs. Ils essaient de conquérir l’opinion par la presse ; la leçon de l’Avenir a servi : sans parler des feuilles provinciales et de moindre importance, il y a toujours les journaux légitimistes et gallicans, l’Ami de la religion, le Journal des villes et des campagnes, la Gazette de France, la Quotidienne ; à côté, d’autres plus religieux se fondent, la Tribune catholique, V Univers ; de dominer la science, particulièrement l’histoire, et la philosophie avec Migne, Rohrbachcr, Montalembert, Ozanam et les Annales de philosophie chrétienne de Bonnetty ; de jouer un rôle social par la fondation des sociétés de Saint Vincent de Paul, 1833, par exemple. De plus, le catholicisme « bénéficie dans l’opinion et auprès des pouvoirs publics de toute l’inquiétude qui suivait les agitations républicaines. La crainte des désordres créa le désir d’un rapprochement avec la puissance conservatrice par excellence, l’Église… N’étant plus suspect au même point que sous la Restauration, dégagé, du moins en partie, de son « alliance avec l’ancien régime, le catholicisme apparaît moins dangereux ». Charléty, La monarchie de Juillet, p. 105, 106. Qui va prendre la direction de ce mouvement ? En France, l’Église aspire à la liberté d’association et surtout à la liberté d’enseignement, c’est sur ce point que se décidera la question.

Deux anciens disciples de Lamennais affirmaient encore leur amour de la liberté. Dans la chaire de Notre-Dame, où il monte en 1835, c’est Lacordaire. Cf. (i c conférence, Des rapports de V Eglise avec l’ordre temporel, et 7e, Dr la puissance coercitive de l’Église. Acceptant comme une nécessité du temps le principe de la liberté des cultes, il souhaite que l’Église obtienne, grâce à ce principe « l’exercice paisible et entier de ses droits spirituels, c’est-à-dire, du droit de persuader le genre humain ». A la Chambre des pairs, ou il entre en 1835, Montalembert tiendra le même langage, Son premier discours, à propos des lois dites de septembre 1835, fut une profession de foi catholique et aussi de libéralisme. Ce principe (de liberté absolue), je l’avoue franchement, n’est pas le mien, j’en reconnais de plus anciens, de plus élevés et de plus saints, mais il est évidemment celui de la société dans laquelle nous sommes nés. celui qui, après une longue lutte, règne dans notre pays. » Lecanuct. op. cit.. t. ii, p. 11. Fidèle a son passe, il dénonce les attentats de la Prusse contre la liberté de l’Église, cf. Goyan, op. i il., c. m. L’affranchissement de l’Église prussienne. L’affaire de Cologne, et Lecanuet, op. cit., c. n ; il défend les principes du libéralisme à propos de l’Espagne divisée, et du nationalisme a propos de la Pologne opprimée ri de i.i Belgique lésée I n i rance,

il ne se place qu’au point de vue de l’Église ; il veut

être catholique et rien de plus, n est toujours hostile pat conséquent < i< principe légitimiste : il ne peut

y avoir d’orthodoxie religieuse sans orthodoxie politique. Le roi, Jésus-Christ, l’Église catholique : Dieu est en ces trois termes. » Il entend, lui. toujours séparer la cause de l’Église de celle du gouvernement établi. Il rêve de nationaliser le clergé et de catholiciser la nation. Des rapports de l’Église catholique et du gouvernement de Juillet dans la France contemporaine, 15 mai 1838. Il voudrait fonder un grand parti catholique qui réunirait évêques, prêtres et fidèles de tous les partis politiqjes dans l’unique pensée d’assurer à l’Église l’indépendance nécessaire et, avant tout, la liberté d’enseignement. C’était un programme beaucoup moins vaste que celui de l’Avertir, puisqu’il ne portait que sur les intérêts catholiques dans la ligne tracée par les encycliques ; mais Montalembert entendait le défendre, comme l’Avenir avait fait du sien, moins à un point de vue exclusivement catholique qu’à un point de vue général qui pût rallier tous les gens de bien.

Pour gagner l’opinion, il voulait un journal exclusivement catholique, qui ne fût inféodé à aucun parti politique, et qui ne fût pas, comme d’autres, « violent et haineux… empêchant ainsi la conciliation et l’union des honnêtes gens de tous les partis ». Il attendait de ce journal « qu’il fît entrer dans le domaine de la publicité et des questions importantes les intérêts catholiques aujourd’hui laissés dans l’ombre ». Or. l’Univers religieux qu’avait fondé l’abbé Migne en 1833 se mourait ; Montalembert s’efforça de le faire revivre. N’oubliant pas, comme l’avait dit encore Lacordaire dans la préface de ses Considérations sur le système philosophique de M. de Lamennais, p. 32, qu’il est impossible « de fonder quelque chose dans une Église, indépendamment de l’autorité épiscopalc il s’efforça de réaliser un épiscopat favorable à ses vues. Cf. Lecanuet, op. cit., c. m.

3° La question de l’enseignement fait des catholiques français un grand parti libéral. Mgr Paris is (18421846). — C’est tout spécialement la question de l’enseignement qui allait fournir aux catholiques un terrain d’entente et un programme.

1. La question de l’enseignement.

En créant le monopole universitaire, Napoléon avait fait une chose unique, qui n’existait nulle part ailleurs. En fait. l’Université ne fut jamais seule à donner l’enseigne ment, mais sa surveillance, ses exigences fiscales furent vite odieuses et, à la chute de l’Empire, ce fut un toile général contre l’Université. De Riancey, Histoire de l’instruction publique et de lu liberté de l’enseigne ment en France. 2 in S". Paris. 1844, I. ii, 1’. 222 brochures violentes attaquèrent l’Université, entre autres celle de Chateaubriand. De Buonaparte el <les Bourbons, mais 1811. celle de Lamennais. De l’Uniuer silé impériale, septembre 181 i

La Charte de LSI I n’inscrivit point la liberté de l’instruction au nombre des libellés publiques, mais des mesures particulières, arrêté du n avril 1814, ordon nances du 5 octobre isi i et du 17 février 1815, Indiquèrent des intentions libérales dans le gouvernement. Les (.eut-. fours rétablirent purement et simplement

l’Université impériale : la seconde Restauration la garda provisoirement et la maintint, malgré les attaques des Chambres, de la presse et du clergé. Comme

l’Université était attaquée surtout au nom de la religion, la Restauration imagina de garder l’Université

et le monopole, niais en plaçant l’Université sous la dépendance des eèques, en donnant a l’enseignement

un caractère religieux et eu introduisant dans le

monopole les exceptions qui pouvaient satisfaire le

clergé ; les |ésuites purent diriger certains collèges ei j enseigner. Un évoque, Fraysslnous, sera même nommé grand mattre de i i nlversité, le l M juin l avec la toute puissance que ie décret de 1808 recon