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    1. LIBÉRALISME CATHOLIQUE##


LIBÉRALISME CATHOLIQUE. LAMENNAIS ET L’AVENIR

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même qu’elles viennent de lui, mais, comme les plus grands théologiens, que le peuple tient immédiatement cette souveraineté de Dieu et, qu’en l’exerçant, il doit se conformer à la loi éternelle de la justice et du droit. Cf. n. 60, 15 décembre 1830. Le droit divin des rois exclut-il la souveraineté des peuples ? Et comme, par un travail de nivellement commencé sous la monarchie, achevé par la Révolution… « il n’existe maintenant en France que des individus, il ne peut aujourd’hui exister en France qu’un seul gouvernement, la république. » T. i, p. 11. « Une république est un mode de gouvernement ou de société, qui, excluant le pouvoir absolu d’un seul, place le droit de législation dans le peuple entier ou dans une partie du peuple, ce qui fait la différence de la république démocratique et de la république aristocratique. » Une république n’exclut pas un roi, c’est-à-dire « un homme qu’on appelle Sire, qu’on loge dans un palais, à qui on donne chaque année une grosse somme d’argent pour signer des ordonnances qu’il ne fait pas… » T. iii, p. 225, 226. Une république, « une démocratie dont le président héréditaire a le titre de roi », tel est bien le gouvernement actuel de la France. T. i, p. 81. Mais cette république est-elle organisée comme elle le devrait ? « Dans l’ordre politique…, la Charte suffit » à la condition « de quelques lois organiques et réglementaires » faites dans l’esprit voulu… L’Avenir demande donc « qu’on étende le principe d’élection, de manière à ce qu’il pénètre jusque dans le sein des masses, afin de mettre nos institutions d’accord avec elles-mêmes et d’affermir tout à la fois et le pouvoir et l’ordre public… » T. i. p. 384.

Déjà, le 17 octobre, on avait pu lire dans l’Avenir : I.e renversement de la Charte de Louis XVIII par le principe démocratique aujourd’hui tout-puissant en France, amenait, comme conséquences nécessaires, l’abolition de l’hérédité de la pairie, qui ne se lie à rien… et un large développement du système d’élection. » Dans l’état présent des choses, « les privilèges d’élection » en faveur de la classe moyenne sont dangereux. D’ailleurs, « de toutes les manières de (lasser les humains, le cens est, en soi et par sa nature propre, le plus mauvais. » Enfin, « le besoin de l’ordre n’existe nulle part, excepté quelques courts instants de délire, à un aussi haut degré que dans les masses. » T. i, p. 12, FI l’article conclut : Appelez donc les masses a partager le droit électoral, » comme elles sont appelées dans la garde nationale où elles font si bien. Plus tard, l’Avenir s’affirme nettement en faveur du suffrage universel : « la pierre de touche du libéralisme vrai. Cf. t. iii, p. 125-429 ; t. V, p. 112.

Plus importante encore paraît à l’Avenir la réorganisai ion administrative de la France de la commune

à l’Étal dans le sens de la décent ralisation ; c’est

chez lui i une pensée dominante. Il pari de ces principes : Chaque liberté n’étant que l’absence de toute action gouvernementale, et la centralisation n’étant que la tutelle des intérêts moraux et matériels, il s’ensuit tpie la liberté et la centralisation s’excluent

réciproquement. Tout intérêt circonscrit a le droit de l’administrer lui même, et l’Étal ne saurait pas plus légil imement s’immiscer dans les affaires propres de la commune, de la province, que dans celles du père de famille, sauf a protéger les intérêts de l’ensemble. Enfin, puisque tout a passé sous le niveau des révolutions . il n’y a plus que cette seule base d’une constitution politique, l’unité naturelle de la la in il le.

ci l’unité plus étendue qui dérive de la première, celle de la commune. La commune sera le point de départ. Elle élira ses notables ou administrateurs, v compris sou maire ils seront évidemment ses membres les plus honorables au suffrage universel : ici. pas de

pana ou d’ilotes. Ces notables constitueraient

ou éliraient les administrateurs du département ou plutôt de la province. Il n’y aurait ainsi que des hommes « jouissant de toute l’autorité morale », connaissant leur contrée et s’intéressant à ses destinées. Et il faudrait donner une véritable autonomie à ces administrations. Enfin, le pouvoir central se partagera entre le roi « qui fera exécuter les lois sous la responsabilité de ses ministres », et l’autorité législative que formeront une chambre des députés élus par les notables municipaux et, si on le veut, une chambre haute, appelée Sénat, élue par les notables provinciaux. Mais ce pouvoir central aura un rôle limité. D’une part, la pensée, la foi, tout le domaine spirituel doit lui être fermé ; ce domaine ne relève de lui à aucun titre ! d’un autre, les administrations des communes et des provinces veillant à leurs intérêts, la tâche de l’État sera de régler « les intérêts qui se confondent sous le nom de France et de veiller à ce que ce glorieux nom ne subisse aucune atteinte de la part de l’étranger ». Et ainsi seront sauvegardés, à l’intérieur, l’ordre et la liberté, à l’extérieur, la grandeur nationale. Cf. deux séries d’articles de l’Avenir : t. ii, p. 69-72, 105-114, 347-349, 479-487 ; t. iii, p. 166-168 ; t. vi, p. 493503 ; t. vii, p. 111-117.

b. Liberté civile. — Pas plus que l’État ne peut supprimer le droit naturel des communes et des provinces de s’administrer elles-mêmes, pas plus il n’a le droit de diminuer les libertés individuelles. L’Avenir proclame bien haut les droits de la personne. « Tel imbécile s’imagine être libéral parce qu’il jure contre Charles X…, comme s’il ne professait pas, par la doctrine des visites domiciliaires, la violente oppression de ses adversaires. » T. v, p. 431. L’Avenir proteste donc contre les arrestations arbitraires et les visites domiciliaires qu’opère la police après les événements du 14 février 1831, et à la fin d’un article intitulé Des arrestations arbitraires, 8 mars, il publie un « Avis sur les arrestations illégales et sur les violations de domicile ». T. iii, p. 216-221. Après avoir rappelé les articles du Code qui garantissent la sûreté des personnes et l’inviolabilité du domicile, il invite les citoyens à défendre leurs droits, au besoin par la force, et annonce qu’une association s’est formée pour leur assurer un appui. C’est sur ce terrain qu’il se place surtout pour défendre les trappistes de la Mcilleraye expulsés, n. 354, 5 octobre 1831, Nouvelle violation de domicile en haine de la liberté des cultes, t. vi, p. 383-388. Il n’admet ni les lois d’exception : c’est sacrifier la justice au bon plaisir », t. i, p. 97-104, ni les procès de tendance, t. vi, p. 140 ; il applaudit à tous les efforts faits pour réduire la peine au strict nécessaire : « Toute loi pénale qui ne rentre point par ses conséquences dans l’ordre des lois sanitaires est une. loi injuste. Refuser le droit d’appliquer lu peine de mort à la société d’une manière absolue nous paraît une grave erreur… Mais lorsque le même but peut être atteint par un châtiment moins rigoureux…, il y aurait barbarie, parce qu’il y aurait maladresse, à user « l’une sévérité désormais Inutile, ibid., p. 138, 13’.). et il pousse a développer l’institution du jury.

r. Liberté économique. Préoccupé de constituer catholiquemenf. dans l’ordre et la liberté, la société nouvelle qui se formait, l’Avenir rencontra nécessal renient la question ouvrière et sociale qui s’ébauchait alors en France et en Angleterre, lai France, la R

lut ion axait aboli les Corporations, interdit aux ouvriers de s’unir pour de prétendus intérêts communs. proclamé i la liberté du travail et l’inviolabilité de la propriété ; elle avait ainsi Lusse l’ouvrier seul en

taie du patron, i’Empire avait maintenu cette situa Lion : les articles 115 et 118 du (ode pénal refusaient

aux ouvriers le droit de ( o. dit ion : l’article III. il est vrai, refusait le même droit aux patrons, mais la