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JOACHIM DE FLORE. VIE

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    1. JOACHIM DE FLORE##


JOACHIM DE FLORE. LE JOACHIMISME

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2° L’affaire de fÈvangt procès de Jean

de J’arme. — Sur cette. dont L’impor tance a été parfois ex, la pleine lumière a été

faite pour la première toi p ; r le mémoire du P. Denifle, Das Eoangelium a ternum. En 1254, le franciscain Gérard deBorgo San Donnino, signalé par Salimbene eoinme un joachimite ardent, p, 236s religieux de la provinee de Sicile, envoyé pour étudier à Paris, t’ôïd., p. 237, devenu lecteur eu théologie, p. 456, publia à Paris l’Intrtitlucturiiis in Eoongelitan telernum. Cette dernière expression était empruntée à Joachim, mais le sens en était change. Ti ndis que pour l’abbé de Flore l’Évangile éternel n’était que le sens spirituel et la pleine intelligence de l’Évangile du Christ, d’après Gérard l’Esprit de vie, aux environs de l’an 1200 (année du testament de Joachim), s’était retiré des livres des deux Testaments. Ceux-ci devaient être remplaces par d’autres, qui seraient les livres canoniques du troisième âge du monde. Cet évangile nouveau, cet évangile éternel, n’était pas autre chose que les trois grands écrits de Joachim : 1* Apocalypse, la Concordia et le PsaUerium. L’ordre franciscain avait été suscité pour le prêcher ; saint François est l’ange de la Révélation, qui habuit signum Dei vivi. Tel était, à en juger par le* quelques extraits qui nous en restent, le sens de la préface — Vlntroduclurius, aujourd’hui perdu — qui devait précéder une édition glosée des trois œuvres joæaimites. Il y a tout lieu de croire, d’ailleurs, que Gérard ne publia que la Concordia.

Il faut se garder d’attribuer cette doctrine à tous les joachiniites. Salimbene, par exemple, la repousse expressément. Pour lui, Gérard a écrit beaucoup de fatuitates, de verba jrivola et risu digna, de falsitates contra docirinam abbalis Joachim ; il a très bien vu la déviation que subissait la vraie doctrine de l’abbé de Flore. On n’a pas du tout l’impression que Gérard ait eu une école ; quelques amis ou protecteurs, tel Jean de Parme, qui ne partageaient pas nécessairement toutes ses idées. Mais son livre eut dans les milieux parisiens un retentissement fâcheux qui prouve quelle attention on portait à ces choses. Jean de Meung et Rulebcuf en témoignent ; le premier parle de

Uns livres de par le dcable ;

C’est i’Évangile pardurable

Que H Sainz Esperiz menistre,

et que tout le monde pouvait se procurer au parvis Notre Dame. Roman de la Rose, édit. Fr. Michel, t. ii p. 36 ; le second proteste contre le novel dieu et nueve Evangile, propagé par les hypocrites, et contre le cinquième csvangelitre. Complainte de Conslantinople et De Sainte Eglise, édit. Jubinal, t. i, p. 120, et t. ii p. 47. Le livre paraissait au moment où la querelle entre l’Université et les mendiants était dans sa phase la plus aigué Les professeurs séculiers, ennemis des mendiants, et notamment leur chef de file, Guillaume de Saint-Amour, l’exploitèrent sans mesure et mena.n, probité. Ils l’attribuèrent aux dominicains, mensonge qui a eu une assez grande loi tune. Ils aggravèrent encore la fatmias de Gérard en faisant rentrer l’Introdiictorius dans l’Évangile éternel, avec les œuvri de Joachim. Surtout ils dressèrent une liste de trente et une propositions qu’ils firent parvenir à la coin pontificale. Le texte dans Lénifie, Chartularium, t. i, p. 272. Sept liaient tirées de l’Introdiictorius, et on ne peut les vérifier. ! quatre autres repo sent sur « les passages authentiques de la Concordia, a monti i i)’ni fie, le i< us en est presque toujoui tortui é el faussé.

Sa ! par l’évêque de Paris, qui lui

.i [’Introdnctortus, Alexandre IV, qui alors quillet 12…n’.i’idail a Ana^ni, nomma une commission

trois cardinaux Eudes de Tusculum,

Etienne de Palestrina et Hugues de Sainte-Sabine. Denifle a édité le procès-verbal de ses séances, Das Euangclium wternum… dans Archiv…, t. i, p. 49-164. Elle dépouilla V lntroductorius et en tira un certain nombre à’errores et fatuitates suffisantes pour en donner une idée. Ce n’est que par son travail que nous connaissons aujourd’hui l’ouvrage. Devant elle comparut d’autre part Florentius, évéque d’Acre, qui produisit un certain nombre d’extraits tirés de Joachim lui-même, dont il demandait la condamnation. Honnêtement cités, — la comparaison le prouve — vérifiés avec soin par la commission, classés méthodiquement, ils forment, a pu dire Denifle, en 1885 « l’exposé le plus intéressant et le plus riche du système de Joachim que l’on ait encore écrit. » Loc. cit., p. 89.

Le résultat de l’enquête fut une bulle d’Alexandre IV condamnant Y lntroductorius seul, et prescrivant à l’archevêque de Paris de le faire détruire, mais avec toutes les précautions voulues pour que la faute d’un seul ne fût pas imputée à l’ordre des mineurs tout entier. Potthast, n. 16072 et 16079. Gérard, nous apprend Salimbene, p. 237 et 455-456, fut privé de l’office de lecteur et du droit de prêcher et de confesser et renvoyé dans sa province. Comme il refusait de se rétracter, Bonaventurc, général de l’ordre depuis 1257, le manda en France, où il se trouvait alors ; cela un peu avant le 30 août 1258. Salimbene, p. 456. Il fut jeté en prison et y mourut impénitent et privé de la sépulture ecclésiastique. A cette occasion il fut décidé qu’aucun frère ne pourrait rien publier sans une autorisation du chapitre provincial. Ibid., p. 462. Ange de Clareno, le célèbre spirituel, dans son Hisloria tribulationum, publiée par Ehrle dans Archiv…, t. ii p. 283-284, confirme le récit de Salimbene, fait le plus grand éloge de Gérard, de sa science, de sa douceur, de sa sainte joie dans sa prison, et ajoute ces deux détails intéressants : en même temps que lui, on condamna de la même manière un frère Léonard, qui était comme lui des principales socii de Jean de Parme ; et le principal chef d’accusation destiné à les convaincre d’hérésie fut la doctrine trinitaire de Joachim ; les deux religieux s’acharnèrent à défendre comme orthodoxe le traité condamné en 1215, blâmable seulement en ce qu’il imputait à Pierre Lombard une erreur que celui-ci n’avait pas soutenue. Ehrle, loc. cit., p. 276.

Quant aux œuvres de Joachim, malgré la critique très vive qu’en fait le procès-verbal de la commission d’Anagni, elles ne furent pas, alors ni depuis, condamnées par le Saint-Siège. Mais l’évêque d’Acre, Florentius, ne les oublia pas ; devenu archevêque d’Arles en 1262, il convoqua en 1263 un concile provincial qui défendit de les répandre ou de les utiliser. Denifle, loc. cit., p. 90.

L’affaire eut un épilogue en ce qui concerne Jean de Plarme, très compromis par la condamnation de ses socii, au point qu’une tradition s’accrédita plus tard d’après laquelle il aurait été le véritable auteur de V lntroductorius ; elle se trouve notamment dans le Directorium inquisilorum d’Eymeric, part. IL, q. ix. Toutefois le P. Denifle, loc. cit.. p. 142, a montré que ce passage ne se rencontre que dans un seul ras., celui de l’Kscurial, du commencement du xv° siècle, et qu’il est une interpolation. Parmi les modernes, Toeco, L’eresia…, p. 472-3, a soupçonné Jean de Parme. C’est à partir de ce moment sans doute que son at lâchement au joachimisme le brouilla avec Alexandre IV. i qui auparavant l’aimait beaucoup, à cause de ta science et de sa sainte vie ». Salimbene, p. 301-2. C’est une question de savoir si, comme le veulent Salimbene, p. 309, Ange de Clareno, /oc. aï., p. 270, el le Catahgm generalis minislrorum ordinis fralrum minorant, édité par Holder-Egger. Monum. Gcrm. hist., Scriptorcs, Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : les références sans nom doivent avoir un contenu.