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    1. JÉSUS-CHRIST II l##


JÉSUS-CHRIST II l. CRITIQUE RATIONALISTE

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la personne historique <UJésus-Christ, de l’envisager sans aucune transcendance : Jésus non seulement

n’est pas Dieu mais c’esl un homme comme les autres hommes, sujel comme le sont tous les hommes, aux erreurs, aux illusions de toutes sortes. Reste à expliquer cette assertion en face des évangiles, en regard du fait chrétien « letemps apostoliques et, plus généi alement encore, de toute l’histoire de l’Église. C’est dans eette explication que se manifeste l’apriorisme absolu îles solutions rationalistes. Ces suintions. écrit excellemment M. de Grandmaison, impliqueni deux défauts radicaux qui vicient l’effort, souvent considérable, des auteurs. Leurs opinions philosophiques forcent en etïet ceux-ci : premièrement, a simplifier indûment les textes évangéliques et les données historiques du christianisme ; deuxièmement, à multiplier parallèlement les conjectures les moins plausibles : infiltrations païennes, pastiches littéraires, rédactions compliquées, états d’âme chimériques des acteurs du grand draine.’Ici écrivain ne veut d’aucun miracle : tel autre laisse subsister celles des guérisons qu’il estime possibles. Celui-ci recourt a la mythologie babylonnienne ; celui-là, à l’eschatologie iranienne. 1.’étude des documents sous-jacents > aux évangiles permet à la virtuosité des exégètes de multiplier les versets contestés, les artifices rédactionnels, les interpolations, i Ait. Jésus-Christ, dans le Dictionnaire apologétique de M. d’Alès, t. n. col. 1373.

1. Le père du rationalisme théologique est Reimarus i - ; 1768), qui. poui établir sa thèse préconçue, ne tient aucun compte des textes. Si Jésus prêche la pénitence, la conversion, l’amendement, c’est en vue de fonder l’empire qu’il lève d’établir sur terre, en restaurant en sa faveur l’ancienne royauté juive. Mais ses menées révolutionnaires manquent d’habileté, et les chefs d’Israël, indignés, l’arrêtent et le font mourir sur la croix. Les apôtres ont écrit des évangiles volontairement faussés, dans le but d’entretenir dans l’âme candide des premiers chrétiens l’attente du second avènement de Jésus. C’est donc sur la double imposture de Jésus et des apôtres que se fonde le christianisme. L’œuvre de Reimarus. Apologie oder Schulzschri /l fur die rerniïn/ligen Verehrer Golfes, publiée seulement en partie dans les Beitrûge (Documents) de Lessing, Berlin. 4e édit., 1835 est une œuvre de haine vivante et ouverte contre Jésus-Christ. L’appréciation est de Hase. Die Geschichle Jesu, 1e édit., p. 147.

— Karl Friedrich Bahrdt (+ 1702) en un énorme ouvrage de onze volumes, Ausfùhrung des Plans und Zwerks Jesu. Berlin, 1781-1793, ravale pareillement Jésus au niveau d’un vulgaire ambitieux, formé par Nicodème et Joseph d’Arimathie pour réaliser le seins secrets de la secte des Bsséniens. Tout s’explique dans la vie de Jésus, par l’influence occulte ou voilée des Esséniens. Mais rien n’est surnaturel : le miracle n’y existe pas. A peine différentes des théories de Bahrdt sont celles de Karl Ileinrich Yenturini (’1801), dans sa Natùrliche Geschichle’des grossen l’rojtheten’on Nazareth, I vol., Copenhague, 2 édit., 1806, avec cependant certains détails d’une trivialité choquante. Il est difficile de trouver, en ces premiers auteurs ratio Batistes, quelque chose à admirer, bien nue M. Schwcitzer ne leur refuse point son admiration. Cf. l’on Iteimarus ; u Wrede, eine Geschichle der f.eben-Jesu-Forschung, ’I ubincue, 1906, p. 22-24 ; 17. 1 eurs livres sont bien plutôt dictés par l’esprit de la basse invective. Cf. Weinel, Jésus im neunzehnten Jahrhundert, p. 17.

2. Le nom de Paulus († 1851) t marque une étape » dans le progrés du rationalisme. Il déclare que le merveilleux en Jésus, c’est lui-même : c’est soi] âme pure et joyeusement sainte, … quoique toute humaine. i Dos Leben Jesu als Grundlage einer r* hichte

DICT. DE THÉOL. CATHOL.

des Urchristentums, 2 vol.. Eieidelberg, 1828. Cf. les commentaires sur les Évangiles, 1800 1805. Mais c’est l’âme toute humaine i, qui l’attire exclusivement. Cl

parce que les récits miraculeux de l’Évangile sont un démenti à son assertion, il s’efforcera tic les expliquer naturellement. On verra plus loin ce que valent ses explications, rejetées même parles rationalistes comme Strauss et Renan.

.’i. On sait comment Strauss (-f 187I) dans sa Vie de Jésus-Christ. Dus Leben Jesu kritisch bearbettet, Tubingue, l- édit., 1840, tr. lï. d’E. Littré, Paris, 1840, rejetant les explications trop naturelles i de Paulus, tentait d’expliquer tout le surnaturel de la vie de Xotre-Seigneur. et par conséquent la croyance en sa divinité, par la théorie du mythe. Voir, dans le Dictionnaire de la Bible tic M. Vigouroux, l’art. Mythique (Sens), t. iv. col. 1386. Plus tard, il ne conservera du mythe que le nom : le mythe n’est plus une création inconsciente ; c’est une invention plus ou moins réflé chic. C’est ainsi que les disciples de Jésus, racontant la vie du Maître, ont créé, d’après leur propre conception, le Chiist idéal, et le Christ idéal, c’est l’Humanité personnifiée. Leben Jesu fur das deutsche Voit bearbeitet, Leipzig, 1864. Plus tard encore, il adaptera à ses thèses la doctrine de Tévolulionnisme ; qui veut tout expliquer sans Dieu et sans miracle. Der aile und der neue (daube, Leipzig, 1872.

4. Les mêmes idées - deuxième et troisième manière de Strauss, - se retrouvent chez Baur († 1860), le chef de l’école dite de Tubingue. Les explications de Baur touchant l’origine du christianisme reposent, en effet, sur les deux théories du « Christ idéal el de 1’ « universel devenir. Voir principalement : Si/mbolismus und Mythologie, Tubingue, 1825, et Y Histoire de l’Église, parue en 1853 sous le titre : Dos Christenlhum und die christliche Kirche in den drei ersten Jahrhunderten, Tubingue. 2° édit., 1860. Au dire de Baur, le christianisme ne représenterait qu’une phase transitoire du devenir religieux de l’humanité. L’idée religieuse s’épanouit et se développe par une évolution régulière et nécessaire (process), dans la succession des âges et dans toute l’humanité. Jésus de Nazareth a recueilli cette idée, élaborée et préparée par ses devanciers durant de longs siècles ; son seul mérite est de l’avoir vivifiée et rendue capable de conquérir le monde en la jetant dans le moule juif du messianisme. Quant aux évangiles, ils ne sont ni authentiques, ni très anciens sous leur forme actuelle : ils n’ont pas de valeur historique et représentent les « tendances » opposées du « pétrinisme » et du « paulinisnie i au cours du second siècle, reprises toutefois avec un évident esprit de conciliation. Le vrai fondateur du christianisme sous sa forme actuelle, c’est Paul beaucoup plus que Jésus. Cf. Ueber die Christus Partei : u Korinth, dans la Tùbinger Zeitschrift, 1831 ; Ueber die sogenannten Pastoralbriefe des Apostels Paulus, ’Tubingue, 1835 ; Paulus der Apostel Jesu Christi, 2’édit. 1866 ; Kritische Vnlersuchungen ùber die canonischen Evangelien, ihr Verhâltniss : u elntmder, ihr Ursprung und ihr Charakter, 1847. Quant a l’évangile de saint Jean, c’est moins une histoire du Christ qu’un résumé de la théologie chrétienne du premier âge. Voir l’ouvrage précédemment cité et Dos Markusevange Hum nach seinem Ursprung und Charakter, 1851. Parmi les disciples de Baur, qui se firent les champions des idées du maître parfois en les exagérant, souvent en les modifiant et en les corrigeant, citons Albert Schwegler, Das næhapostoliche L’Huiler in dm Haupt momenien seiner Enlwicklung, 2 vol., Tubingue, 1846 ;

— Edouard Zeller, Die Apostelgeschichte nu<h ihrem Inhall und Ursprung kristlsch untersuchl, Stuttgard, 1854, ii, sur Baur et son école, Die Tùbinger historische Schule, dans ses VortrOge ami Abhandlungen, 2’édit..

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