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L335.JÉSUS-CHRIST ET LA THÉOLOGIE. SACERDOCE DU CHRIST 1336

seulement nous demandons tout ce que légitimement nous pouvons désirer, mais encore nous le demandons dans l’ordre où il convient que nous le défilions. Ainsi, cette prière nous instruit de ce qu’il faut demander à Dieu, et, de plus, elle ordonne et diiige nos affections.

Il est de toute évidence que nous devons désirer tout d’abord notre fin dernière et ensuite par rapport, à cette liii, les moyens qui y conduisent. Or, notie fin suprême est Dieu, Dieu veis qui notre amour doit tendre de deux manières. Une première manièie, c’est de vouloir sa gloire : une seconde manière, c’esl d’en vouloir jouir. La piemière manière se 1 al tache à la charité par laquelle nous aimons Dieu en lui-même ; la seconde implique l’amour dont nous nous aimons nous-mêmes en Dieu. Aussi nous disons dans la première demande : Que voire nom soit sanctifié, c’est là demander la gloire de Dieu. Dans la seconde, nous prions : Que vitre règne arrive ; c’est là demander, pour nousmême, de parvenir à la gloire de son royaume. Quant aux moyens qui peuve nt nous conduire à une fin, les uns y tendent essentiellement, les autres accidentellement. Essentiellement nous conduit à la fin le bien qui est utile pour atteindre cette fin. Or, pour atteindre la fin de la béatitude, le bien peut se présenter avec une utilité double. La première utilité est directe : c’est principalement le bien qui, si nous le pratiquons, fious fait mériter notre béatitude, par notre obéissance à Dieu, et c’est pourquoi nous disons : Que votre volonté soit faite sur la terre comme au ciel. L’autre utilité est indirecte : c’est celle de l’instrument qui nous aide simplement à mériter ; aussi ajoutons-nous : donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien, soit qu’on entende par ce pain quotidien la communion sacramentelle dont l’usage quotidien est si utile à l’homme (et ce pain quotidien renferme également tous les autres sacrements), soit qu’on l’entende du pain matériel, et ce pain quotidien signifie tout ce qui est nécessaire à la vie. Accidentellement, quelque chose nous conduit à notre fin, en écartant de nous les obstacles qui nous empêcheraient d’atteindre cette fin. Or, il y a surtout trois obstacles à notre béatitude. Le premier, c’est le péché qui nous évince directement du royaume de Dieu, aussi poursuivons-nous pardonnez-nous nos offenses. Le second, c’est la tentation qui nous dissuade d’obéir à la divine volonté ; et nous disons donc à ce sujet : ne nous induisez pas en tentation, ce qui ne signifie nullement que nous demandions à Dieu d’être exempt de tentations ; nous souhaitons simplement de n’être pas vaincus par elle, et c’est là exactement ce que signifie : être induits en tentation. Enfin, le dernier obstacle est la tribulation de la vie présente qui nous ôterait les moyens nécessaires à la vie : et nous terminons en disant : Délivrez-nous du mal ».

En lisant cette admirable explication de l’oraison dominicale, on comprend < pourquoi la prière du Pater esl dite et est vraiment la prière du Seigneur. (Miel homme aurait pu, en si peu de mots et en des termes

si simples, que peuvent Immédiatement comprendre

savants et Ignorants, renfermer tant de sublimités si profondesl « Billot, th. xxxiii, nota. Voir égalemeni de s. Thomas, Opusculum v (édit. de l’arme). In oratio nem Dominicain expositio.

tll, LE SACERDOCE VI CHRIST, Le sacerdoce du

Christ se trouve explicitement affirmé, nous l’avons

VU, dans la révélai ion et dans les prophéties « le

l’ancien Testament, voir col. U18 el par l’auteur

de l’épttre aux Hébreux. Voir col. 1238. Cf. Matth.,

xxii, 43, el l’s. t.ix. Aussi tous les théologiens sontif. unanimes à affirmer que le sacerdoce du Christ B’ImpOSe a nous comme une vérité de foi divine, cl

catholique. Cf. Suarez, Disp. XI. VI. sect. i, n. 1.

Elle est supposée dans le 10e anathématisme de saint Cyrille au concile d’Éphèse et par le concile de Trente, sess.xxin, c. i, Denzinger-Bannwart, n. 938. D’ailleurs le magistère ordinaire de l’Église, lequel s’exprime dans toutela liturgie ecclésiastique, dans les rites de l’ordination, dans la célébration de la messe, dans la récitation de l’office divin, proclame avec force et éloquence que le Christ est le prêtre de notre religion et notre pontife pour l’éternité. Les Pères de l’Église ne font que répéter ou expliquent la doctrine de l’épître aux Hébreux. Les Pères apostoliques appellent le Christ le « pontife éternel », Ep. Poli/c, xii, 2 ; cf. i, 2 ; vi, 2 ; le i pontife de nos offrandes », S. Clément, / Cor., xxxvi, 1 ; xlix, (i ; cf. xxii, liv, Cf. S. Ignace, Philadelph., ix, 1 ; Magnes, x, 3. Plus tard, saint Justin l’appelle « prêtre éternel », Dial., n. 32-33, P. (i.. t. vi, col. 546, 547 ; « notre prêtre et Dieu », n. 115, < ol. 713 ; S. Ambroise écrit : idem ergo sacerdos el hoslia. De fide, 1. III c. xi, n. KO. P. L., t. xvi, col. 607. Le mot « pontife » se retrouve également chez saint Athanase, Contra arianos, Orat., ii, n. 7, P. G., t. xxvi, col. 169 ; chez saint Cyrille d’Alexandrie, Contra Nestorium, t. III, c. I, P. G., t. lxxvi, col. 119 sq. ; chez saint Léon le Grand, Serm., liv, n..’!. P. L., t. liv, col. 359-360 ; chez saint Fulgence, De fuie ad Petrum, t. II, n. 22, P. L., t. xlv, col. 682. Saint Augustin, très théologiquement, écrit : Secundum hominem Cliristus et rex et sacerdos effeclus est, ut esset ad interpellandum pro nobis medialor Dei et hominum, homo Christus Jésus. De cons. evangel., t. I, c. iii, n. 6, P. L., t. xxxiv, col. 1045.

Nous n’avons pas à définir ici le sacerdoce et le sacrifice* corrélatif au sacerdoce. Voir ces mots. Le sacrifice, par lequel le Christ exerce son sacerdoce est le sacrifice de la croix et celui de l’Eucharistie. Voir Bédemption et Messe. Par son sacerdoce, le Christ est non seulement mis en rapport avec Dieu, mais il est placé comme médiateur entre Dieu et les hommes. Sur ce rôle de médiateur, voir plus loin. Nous n’avons à aborder ici que la théologie du sacerdoce du Christ, envisagé par rapport à Dieu. Le dogme mis à part, on peut ramener cette théologie à trois points principaux : l’existence du sacerdoce en Jésus considéré comme homme ; la consécration substantielle du Christ prêtre ; l’éternité du sacerdoce de Jésus-Christ, Homme Dieu.

1° Le sacerdoce est en Jésus considéré dans son humanité. — Le piètre est celui qui est député par l’autorité légitime pour offrir à Dieu le sacrifice et dispenser au> hommes les choses sacrées. La fonction de prêtre est une fonction publique : le prêtre est délégué pou représenter la société dans ses rapports avec Dieu. pro hominibus consliluitur in lus qute suni ad Deum. Ileb., v, 1. Bien plus, le prêtre qu’est Jésus Christ est un pontife « qui peut compatir à nos Infirmités lleb., iv, 15. L’auteur de l’épttre aux Hébreux suppose donc explicitement que Jésus-Christ est prêtre comme homme. < La raison théologique confirme celle vérité. Offrir à Dieu une victime, prier, intercéder, demander pardon, obéir et autres actes du sacerdoce supposent évidemment une Infériorité vis-à vis de Dieu. Cette infériorité dans le Christ existe seulement en raison de la nature humaine, l.1. Grima], Jésus-Christ étudié el médité, Paris, 1910, I. I, p. 454. Cf. Hugon, Le mystère de t<i Rédemption, p. 161-166.

N’oublions pas cependant que la nature humaine, en Jésus Christ, n’est que le principe d’opération, et non le sujet auquel est rapportée l’opération. Le sujet. c’esl la personne du Verbe incarné, Dieu et homme

tout ensemble. El c’esl à cause de cette unité de

personne dans le Christ que ses moindres actions, plus forte raison, ses actions sacerdotales, sont d’un mérite infini. Cf. COl. 1323. D’ailleurs le sacerdoce du