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JÉSUS-CHRIST Il LA THÉOLOGIE. LE MÉRITE DU CHRIST L326

lion pour satisfaire Dieu, voir INCARNATION, t. vu. col. 1473. Que l’incarnation ait été également nécessaire pour nous mériter la grâce, dans l’ordre présent, cola est évident pour un double motif : premièrement, le mérite de cette grftce dépendait, dans l’ordre présent, de la réparation offerte pour les péchés ; deuxièmement, les individus humains étant indéfiniment multipliables, il fallait un mérite inépuisable, le mérite de l’Homme-Dieu. Cf. s. Thomas. [II », q. i. a. 2, ad 1°’».

Sur l’opération théandrique chez les Pèr-s. voir Petau, De incarnations, I. VIII, c. vu-xin. Voir l’exposé theologi<pje de la question dans Stentrup. th. u-uu ; llurter. De ri>o incarnaio, a. 534-558 ; Billot, De Verbo incarnate, th. xxxi ; Janssem, De Deo-Homine, t. i, p. 667-682, avec un bon choix de textes patristiques : I lu-’on, /). Verbo ine<irn(i(o, q. xi. a. I. n. l-t>.

b) Le mérite du Christ. — En raison de l’union hypostatique qui donne à Jésus la sainteté substantielle, toutes les opérations du Christ sont d’une dignité infinie, et par conséquent d’une valeur infinie quant à la satisfaction et au mérite. Faisons remarquer, toutefois, que cette valeur infinie ne leur vient pas du principe d’opération, la nature humaine, mais du principe d’être qui élève hypostatiquement cette nature le Verbe divin lui-même.

Ce principe général une fois rappelé, nous renvoyons à l’article Rédemption tout ce qui concerne le fait de la satisfaction infinie donnée par le Christ à Dieu, conformément aux exigences exposées à Incarnation, t. vii, col. 1173 sq. Quant au mérite nous n’avons à envisager ici que le mérite du Christ par rapport à lui-même, conformément au titre général du paragraphe. Cf. S. Thomas, III », q. xix, a. 3.

a. L’existence du mérite en Jésus-Christ, considérée d’une manière générale est affirmée explicitement par l’Écriture : Foetus obediens usque ad mortem… PROPTER QOOD et Deus exaltavit illum, Phil., ii, 8, ou encore, dans la bouche de Jésus lui-même, Xonne hœc oporluit pâli Christum et ita intrare in g oriam suaml Luc, xxiv, 26. Le concile de Trente, à propos de notre justification, dit que le Christ en est la cause méritoire, sess. vi. De juslificatione, a. vii, Denzinger-Bannwart, n. 799. La raison théologique enfin montre que, toutes choses égales d’ailleurs, il est plus parfait de posséder une perfection due au mérite que de l’avoir sans la mériter. On doit donc accorder au Christ toutes les perfections qu’il a pu mériter. Certes, il n’a pu mériter ni la grâce qui est le principe du mérite, ni la gloire essentielle de son âme, car l’absence de cette gloire en son âme eût été une imperfection incompatible avec l’union hypostatique. On délimitera plus loin l’objet du mérite personnel du Christ. Enfin toutes les conditions requises pour le mérite se trouvent réalisées dans le Christ ; il a été libre, voir ci-dessus, col.1295, ses actions étaient et quant à leur objet et quant à leurs circonstances moralement bonnes ; il a toujours fait la volonté du Père, voir ci-dessus, col. 1297 ; il était orné de la sainteté substantielle et de la grâce habituelle, possédée dans toute sa plénitude, voir ci-dessus, col. 1275 sq. ; enfin ses actions méritoires étaient accomplies dans l’état de voie, voir ci-dessus, col. 1309. Donc, l’existence du mérite en Jésus-Christ, conclusion certaine de tout ce qui précède, ne peut être mise en doute : c’est une vérité de foi.

b. L’objet du mérite acquis par Jésus relativement à lui-même peut se résumer en ceci : Jésus a mérité tout ce qui a pu contribuer a la gloire de son corps : transfiguration, résurrection, ascension et à l’exaltation de son nom. Cf. Apoc, v, 12. Saint Thomas attribue au Christ une triple exaltation méritée par une triple humiliation : la gloire qui a suivi la résurrection, méritée par < ements de

la passion : la manifestation de sa divinité, méritée

par la déchéance de l’incarnation, où le Christ a pris la forme d’esclave ; l’hommage enfin de toutes les créatures mérité par l’humiliation de l’obéissance

jusqu’à la mort. In Kf>ist. ad. Phil.. c. ii, lect..’!. On . lira également les belles considérations du même auteur relatives a la résurrection, III- 1, q. un ; à l’ascension, q. un ; à la session à la droite du l’ère, q. l.vill. Scot n’admet à l’égard de la gloire du corps, qu’un mérite indirect. In I Y Sent., Præf. I. 1. VoirDuNS Scot, t. iv, col. 1896

c. Quant au emps du mérite, les théologiens catholiques ont émis quatre opinions différentes qu’il suffit d’ailleurs de signale], la dernière seule étant reçue dans l’enseignement commun. - La première opinion n’accorde au Christ le mérite qu’après sa conception : il lui a fallu, pour ainsi dire, un instant de réflexion, pour agir délibérément. Ainsi opinent Alexandre de I [aies, Summa, part. III, q. xviii, memb. 2, a. 1 : saint Bonaventure, In IV Sent.. I. Ill.dist. KVIII.a. l, q. i. Durand de Saint -l’ourcain, In. IV Sent., t. III, dist. XV 1 1 1, q. ii, "Mais cette opinion se heurte à l’autorité de Heb., x, 6-9, et ne tient pas compte de la possibilité, pour le Christ, d’un acte, libre de volonté dès le premier instant de la conception. Cf. S. Thomas. III’. cj. xxxiv, a. 2-3. A plus forte raison donc, le Christ a-t-il mérité dès s i tendre enfance : les l’êtes, dans leurs serinons sur la naissance, la circoncision et l’enfance du Sauveur insistent sur les persécutions qu’eut à subir l’enfant Jésus et qui lui furent méritoires. La deuxième opinion, à laquelle il serait difficile de rattacher le nom d’un grand théologien, mais qu’on trouve relatée dans les auteurs, affirme que le Christ a pu mériter, même après sa mort, et qu’il mérite encore au sacrifice de la messe et dans l’administration des sacrements. L’état de voie est la condition du mérite. De ce seul chef, cette opinion manque totalement de probabilité. Vasquez, disp. LXXVI, c. i, n. 3 pense que le Christ, absolument parlant peut mériter pour nous, non pour lui, après sa mort et dans le ciel. L’intercession du Christ dans le ciel, Rom. viii, 31 : Heb., vii, 25 ; I Joa.u, 1. vaut par les mérites précédemment acquis (en tant que méritoire). Cf. Vasquez, loc. cit., De Lugo, De incarnalione, disp. XXVII, sect. IV, n. 54 ; Suarcz, id., disp. XXXIX, sect. m. n. 9. Quand les l’ères nous disent que les sacrements sortirent du côté entr’ouvert du Christ, ils ne disent pas que le Christ a mérité par son côté entr’ouvert : l’eau et le sang qui symbolisent les sacrements sont sortis du côté du Christ ; mais ce symbole n’implique pas un mérite en Jésus-Christ déjà mort. Suarez, disp. XXXIX, sect. iii, n. 10. — La troisième opinion, professée par Cajétan, In ///"" />. Sam. S. Thomæ, q. i.vi, a. 6, ad L « », /n II"" //æ q. cxxiv. a. 4, ad 2 et par Hurtado, De incarnalione, disp. LXIII, sect. x, enseigne que le Christ a mérité dès le premier instant de sa conception et jusque dans l’instant qui a terminé sa vie terrestre et qui a vu se consommer sa mort. La quatrième opinion exclut avec vraisemblance cet instant ultime. Cf. s. Thomas, III-’, q.u, I ium.

<l. Une quatrième question est relative à la charité

qui fut en Jésus le principe du mérite. Cette question a beaucoup d’affinité avec celle de la liberté du Christ examinée plus haut. En effet, l’acte de charité, par lequel le Christ aimait Dieu, était, eu raison de la vision intuitive, non pas libre, mai e, et

tout ce qui se rattache nécessairement a Dieu, devait être aimé nécessairement.La solution de cette difficulté a exercé la sagacité des théologii ; ans, avec

n/, disp. I.WIV, c. iii, nient que le Christ ait mérité par la charité qu’il avail pour Dieu. D’autres distinguent en Jésus-Christ deux charités, ré| l’une par la vision intuitive, l’amie par !