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JÉSUS-CHRIST. LE TEMOIGNAGE DES MIRACLES


La difliculté soulevée par certains néo-critiques, relativement à l’absence de tel récit miraculeux dans l’un ou l’autre évangile, n’est pas une difliculté sérieuse : aucun évangéllste n’a voulu être complet, et l’absence de tel récit chez l’un ou chez l’autre prouve au contraire l’indépendance, c’est-à-dire la véracité des auteurs inspirés. D’ailleurs sur 39 miracles, treize sont communs à trois évangélistes au moins (un est raconté par les quatre) ; vingt sont particuliers à l’un ou à l’autre et six sont rapportés par deux évangiles. Cette grande variété et ces accords fréquents marquent à la fois la véracité et l’indépendance des auteurs inspirés. Cf. Fillion, op. cit., p. 28-30.

Ajoutons enfin, en descendant dans le détail des miracles du Sauveur, que si, d’une part, le Sauveur s’est constamment refusé à faire des miracles de pure puissance, de ces prodiges qui manifestent une force inconsciente sans frein, ni règle, ni but, cf..Marc, vm. 12 : Joa., iv, -48, si. d’autre part, il a souvent refusé d’accomplir des miracles là où il était accueilli avec incrédulité, Marc, vi, 5, 6 ; Matth., xiii, 58, qu’enfin si Jésus a voulu fréquemment limiter la divulgation des faits merveilleux par lui accomplis, Marc. i. I 1 : v, 43, alin de garder à sa manifestation parmi les hommes la marche progressive et sagement réglée qu’il avait décidé de lui imposer, « cette discrétion, ces limitations, — - non imposées du dehors et aveu de faiblesse, mais imposées du dedans et marque de sagesse : les textes les plus clairs en témoignent : Matth., iv, 3 sq. ; xxvi, 53 confèrent aux miracles du Christ un caractère unique, et aux récits qui les relatent un cachet d’historicité hors ligne. C’est le propre en effet des embellissements postérieurs et des enthousiasmes irréfléchis d’ajouter en ce genre, de surenchérir, de chercher le frappant, l’extraordinaire l’inouï. Les miracles de Jésus, tels que nous les présentent les évangiles, sont au contraire tellement maîtrisés, tellement spirituels, tellement mortifiés, pour ainsi dire, qu’ils interprètent la vie et renseignement du Maître sans les tire ; pour autant île l’histoire, du réel, de tout ce que nous savons par ailleurs-du prédicateur et du saint de Dieu. » L. de Grandmaison, art. aie, col. 1456.

2. La valeur des miracles de Jésus, comme signes de sa mission messianique. - Que les miracles de Jésus aient servi à prédisposer les cu’lirs et les esprits de ses

contemporains à accepter la personne et les enseignements du Sauveur, ou bien, en modifiant quelque peu la formule, qu’ils demeurent aujourd’hui encore de solides et convaincants motifs de crédibilité en faveur de la révélation inaugurée par Jésus. - - ils ont dû. en toute hypothèse, être accomplis en une connexion manifeste, implicite ou explicite’avec la personne. l’enseignement, la mission du Verbe incarné. Implicitement, ici te connexion existe chaque fois que le

miracle’sert à glorifier Jésus (par exemple : la voix du ciel entendue au baptême et a la transfiguration, et surtout, la résurrection), ou encore chaque fois quele miracle est la récompense accordée a la foi ou la confiance en Jésus (par exemple, la guérison du serviteur du centurion, Mat th., viii, "> sep ; la guérison des aveugles de Jéricho, Matth., xx, 29 ; la guérison de la i hananéenne, Matth., xv, 22 sq ; cf. Matth., vii, 2 : vm. 2.". : ix. 18 ; 27 : xiv. 28 ; xx. 30 ; Marc, u. 25 28 ; ix. 16-23 ; Luc, iv, 38 ; Joa., ii, 3 ; i. 16 54). Explicitement, (elle connexion, est proe’laniée par Jésus lui ii, t me : la gu risem élu paralytique est accordée pour confirmer l’existence en Jésus du pouvoir de

ii nu Itu les péchés. Mare’., ii, 9 10 ; les messagiTs de

Jean-Baptiste sont instruits de la mission messianique iiu Sau i m par l’accomplissement de’s prodiges opérés

pai JéSUS, I ne. ii, 18-24 ; Jésus obtient de Dieu la i i ion m I a/aie t alin. dit il. qu’ils croient que

vous m’avez envoyé. » Joa., xi, 11-43. Ht cette dernière formule revient à plusieurs reprises sous la plume du quatrième évangéliste. Joa.. v, 3(î ; x, 25 ; xiv. 12 : xv, 21 : xx. 30. En réalité tous les contemporains de Jésus, amis ou ennemis, sont d’accord sur le fait ele cette connexion : voir les textes. Matth., xii. 13 : xxiv. 54 ; Joa.. m. 2 : iv. 43 : vi. Il ; vu. 31 : ix. 16 33 ; xi. 15 ; xii. 11, etc.

Mais ces prodiges attestent-ils vraiment l’intervention ele la puissance divine’Sont-ils vraiment des prodiges tels que Dieu seul les puisse accomplir ? Et Jésus se montra-t-il, soit comme objet, soit comme instrument, eligne de cette intervention de Dieu ? Les contemporains du Messie ne se sont peut-être pas posés, sous nue forme aussi précise, cette double question, dont la solution achève ele déterminer la valeur des miracles de Jésus comme signes de sa mission. Ils ont simplement subi l’attrait produit sur leur cœur et leur intelligence par les multiples bienfaits du Maître, sans apercevoir tout d’abord clairement le terme auquel Jésus les voulait amener. Voilà pourquoi le théologien qui cherche avant tout à retrouver dans l’Évangile la figure historique du Christ, doit logiquement situer les miracles accomplis par ce dernier — du moins ceux qui ont précédé sa passion — dans le cadre de la manifestation progressive et pleine et’ « économie » ele la mission messianique et de la filiation divine. Toutefois, si nous voulons, avec l’apologiste des temps postérieurs à Jésus-Christ, analyser jusque élans ses derniers éléments cette force attractive, inhérente aux miracles de Jésus, et dont les con temporains de Jésus ont subi l’influence, il nous faut arriver à cette double constatation : que les miracles opérés par Jésus sont tels, que Dieu seul les pouvait accomplir : et épie Jésus, dans l’accomplissement de sa mission, s’est montré constamment digne eh’l’intervention divine dont il était d’ailleurs lui-même le eligne instrument.

a) Circonstances où se produisent les miracles. — Malgré les sages limitations que Jésus apporta dans l’accomplissement ele ses miracles, il y a, parmi les « œuvres » du Sauveur une variété considérable, élans laquelle nous devons admirer les effets de la toute-puissance divine. Quelle que soit la formule eh’elassitication adoptée pour les miracles du Sauveur, il est hors ele doute, que les miracles de création, tels que le changement de l’eau en vin et la multiplication des pains, les miracles de suspension eles lois de la nature, tels que la pêche miraculeuse, l’apaisement soudain de’la tempête, la marche de Jésus sur les eaux. et. à plus forte raison, les miracles de résurrection de morts, niellent en évidence l’intervention de la puissance divine. Le se’iis obvie élu texte, pas plus que le caractère du Sauveur ne supporteraient une’explication tirée’del’emploi de’la supercherie. L’illusion n’est

pas plus admissible, lorsqu’il s’agit de phénomènes naturels incontestables et vus par de nombreux témoins. Voilà, en bref, ce que suggère la lecture impartiale des textes. Nous verrons à la fin ele l’article que’les néo-crit ique’s ont voulu y trouver tout autre

chose. Leurs négations sont plus vives encore, lorsqu’il s’agit des miracles de guéri sons, guérisons psychiques : expulsion des dénions : guérisons corporelles : santé rendue aux malades, tous miracles qu’ils prétendent expliquer par le seul jeu eles forces naturelles. L’apologétique catholique démontre le caractère’vraiment surnaturel des guérisons psychiques et corporelles accomplies par.lesns, sans toutefois se prononcer d’une façon catégorique et absolue’sur la nature de chacun des cas (’nonces, dans l’évangile, comme appartenant

à la catégorie des possessions diaboliques. Le but de

cet article l héologicpie n’est point d’entrer dans le détail de ces discussions et de cette démonstration.