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JESUITES — JÉSUS-CHRIST


sache bien que personne au momie ne saurait donner

une règle pour assurer la réception de ces grâces sublimes, car elles ne dépendent que de I >ieu et elles sont conférées directement par Dieu. Le plu-- sûr est de s’en remettre à Dieu avec une paix complète et une soumission entière, en se regardant comme très indigne de ces faveurs célestes, en ne recherchant et en ne demandant que la confoimité à sa sainte volonté, i On ne pouvait mieux exprimer les sentiments du maître sur ce sujet délicat.

Mais, si on ne peut tracer des règles infaillibles pour se procurer ces grâces mystiques, que Dieu se réserve d’accorder à qui il veut, quand il veut, dans la mesure qu’il veut, on peut donner des règles pour aider les âmes à se disposer de plus en plus aux communications divines, et c’est précisément ce que font les Exercices spirituels.

C’est par ce moyen des Exercices que saint Ignace s’était disposé lui-même, quand Dieu daigna l’élever jusqu’aux sommets de la contemplation. La remarque est du P. Nadal. Après cette expérience, il ne voulut d’autre méthode ni pour lui ni pour les autres, dit encore le P. Nadal, car il savait que les Exercices suffisent pour conduire à l’oraison la plus parfaite et, si l’on veut, la plus sublime : His Exerciliis quoad vixit, ab inilio suæ conversionis ususestpro se et proaliis… Xeque aliam methodum voluii unquam oraiionis dure vel permittere… (Hinc) enim sciebat principia accipi et vim unde ad omnem orationis perfectionem et, si relis, sublimittitem evadere possimus. Monum. hisl. S..L, Epistolm P. Nadal, t. iv, p. C66, 669.

En réalité, rien ne manque aux Exercices pour mettre les âmes dans la disposition prochaine aux grâces mystiques. La purification active, dont parle longuement saint Jean de la Croix, ne saurait être plus complète que da ?is l’observation de cette consigne du Règne : A (/ère contra suam propriam sensualitatem cl contra suumumorem carnalem et mundanum, ou dans la pratique du troisième degré d’humilité ; toutes les indications sont données, dans les Règles du discernement des esprits, pour faire reconnaître et pour faire traverser fructueusement les purifications passives ; la prière est réglée de façon à devenir de plus en plus affective et à se simplifier de plus en plus, grâce à ces répétitions et â cette application des sens qui reviennent chaque jour ; si l’on ajoute la recommandation de s’arrêter pour goûter et savourer â loisir les communications divines dès qu’on aperçoit quelque lumière ou qu’on ressent quelque consolation ; si l’on remarque enfin que les sujets proposés pour la méditation sont toujours présentés d’une façon concrète, sous une forme en quelque sorte visible et tangible qui attire et retient l’attention, on reconnaîtra que rien n’est omis de ce cpii peut préparer l’âme â la contemplation. L’effort de l’homme ne peut aller plus loin ; le reste n’appartient qu’à Dieu : Suarez le dit avec raison : Contentas est (S. Ignatius) ponendo sapientes in via, nam quod reliquum est magis ad magislerium Spiritus Snncti quam hominis spécial, lureligione, tr. X.l. IX, c. vi. n. 9, Mais si après cela Dieu, dont l’Esprit souffle où il veut, daigne couronner cet effort et récompenser cette préparation par des grâces mystiques, ’es Règles du discernement des esprits contiennent en substance toutes les Indications nécessaires pour se diriger prudemment sur ce terrain où ilesl Facile de s’égarer.

En somme, ce ne sont pas seulement tous les principes de la théologie ascétique, ce sont ions les pi incipes de la théologie mystique qui ont été conden lans le livre des Exercices, La remarque en a été pai Suarez dans son étude sur les pages de saint Ignace Nihil ad spiritualem instructionem necessarium in eis (Exerciliis) desideratur quantum pet brevem methodum tradi polerat. De religione, S..L, I. I,

c. vi, n. 11. Avant Suarez, le P. Gagliardi faisait la même observation : Liber Exerciliorum spirilualium B. Patris lgnutii pie ne præscribit quidquid ad interiorem animarum cullum perlinet… Principia (ère omnia ac dot/mata tolius interioris disciplinas tradil. Commentarii in Exercitia spirit. S. P. Ignatii. Proœm., § 1, 2.

En ce qui concerne spécialement la mystique, le P. Diertins disait au xvii c siècle : Per liane methodum oblinetur facile illa animi præparalio quam ad sublimiorem conlemplationem Deus prærequirere solel, et il ajoute : l’Uni autan hanc præparationem velle connili ad conlemplationem illam extraordinariam antequam Deus illam concédât, lemerilale plénum est. Historia Exerciliorum spirit., Præfatio. l’a sage commentateur des Exercices au xviii siècle, le P. Ferrusola, après avoir recommandé la lecture de quelques ouvrages de théologie mystique, en particulier ceux du P. du Pont, ajoutait : Yerumutaperte dicam quod sentio, neque in eoneque in aliis. vix quidquam reperies, nisi forlasse vocabula, quod in Exerciliorum libro non contineatur. Commentaria in librum Exerciliorum, P. I, s. ii, c. 5.

C’est dans la voie ouverte et frayée par saint Ignace que sont entrés généralement ceux de ses disciples qui se sont occupés des questions mystiques. A part quelques exceptions, ils ont préféré le genre direct if au genre descriptif, même ceux qui ont été favorisés de grâces d’oraison extraordinaires. Un demi-siècle après la publication des Exercices, la Compagnie de Jésus comptait un certain nombre d’auteurs qui avaient écrit sur la théologie mystique. Dans ses luttes contre le quiétismo. Hossuet. en appelait à leur autorité, et il citait avec éloge le P. lialthazar Alvarez. - une des gloires de sa Compagnie et qui a été parmi les confesseurs de sainte Thérèse un de ceux dont elle a vu de plus grandes choses ; » le P. Louis du l’ont, « un des plus grands spirituels de sa Compagnie et de son siècle : i le P. Alvarez de Paz "savant jésuite qui a traité plus amplement que tous les autres la théologie mystique ; » le P. Suarez « en qui on entend toute l’École, i

On ne peut s’attendre à trouver ici la bibliographie ascétique des jésuites. Cette bibliographie a été dressée par le P. Bliard dans la table qui forme le dixième volume de la Bibliothèque de la Compagnie de Jésus par le P. Sommervogel. Les seuls noms relevés dans cette table et rangés sous le titre de Théologie ascétique remplissent plus de 220 colonnes (342-ôG : i i. Nous ne pouvons que renvoyer à cet excellent répertoire.

Pierre Bouvier, S. J.


JESUS-CHRIST.
Dans cet article, ainsi qu’on l’a indiqué à Incarnation, t. vii, col. 1445, on se propose d’étudier, au point de vue de la théologie catholique, le sujet concret. Dieu et homme, résultant de l’union hypostatique de la nature humaine â la personne du Verbe, qui est apparu sur la terre, a vécu parmi les hommes et a conversé avec eux, et dont les ennemis de la foi chrétienne ont essayé de nier, tour à tour, la divinité ou l’humanité. L’objet de notre étude est donc moins la personne que le personnage même du Verbe incarné.

Ce personnage, dont l’existence est historiquement établie, est né d’une vierge de la race de David. Mais, chose admirable, son histoire n’a pas pour point de départ sa naissance selon la chair : on doit la faire remonter plus haut. C’est pour ainsi dire dès l’origine de notre race que la figure de Jésus-Christ commence à se dessiner dans l’avenir. Dans beaucoup de livres, de 1’ancien Testament, se rencontrent déjà un certain nombre de traits, projetés par avance sur le personnage du Messie futur et que le croyant se plait à retrouver en Notre Seigneur Jésus-Christ. Au point de vue de l’existence de l’Homme-Dieu, ces traits ne sont donc pas à négliger : ils font pressentir cotte exis-