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JÉSUITES. VUE D’ENSEMBLE Dl MOUVEMENT DOCTRINAL


et Daniel Papebroch, Voir t. ii, col. 950 sq. ; Sommervogel, Bibliothèque, t. I, col. 1526 sq., avec indications des notices sur Le bollandisme col. 1673 sq., et H. Delehaye. L’œuvre des Bollandistes, Bruxelles. 1921.

Enfin, pour que rien ne manquât de ce qui peut contribuer à la profondeur des études théologiques, la philosophie fut cultivée avec soin, d’après les prineipes posés par saint [gnace et ses successeurs. Les grands théologiens jésuites ne furent tels qu’en fonction d’une forte culture philosophique ; aussi plusieurs d’entre eux. Tolet, Molina, Vasquez. Suarez, Arriaga. ont-ils mérité d’être cités parmi les représentants du mouvement philosophique réformateur qui se produisit alors. Caïd. Zéphirin Gonzalez, Histoire de la philosophie, trad. G. de Pascal, t. iii, p. 100, Paris, 1891. Leur influence s’exerça diversement. Il y en eut qui, enseignant cette science, publièrent comme fruit de leurs leçons des commentaires sur Aristote ; ainsi Tolet, Introductio in dialecticam Arislolelis, Rome. 1561 ; Commentaria una cum quæstionibus in très libros Aristotelis de anima, Venise, 1575 ; surtout Pierre de Fonseca, Commentariorum in libros Metaphysicorum Aristotelis Stayiritx lomi IV, Rome, 1577. Surnommé l’ « Aristote portugais », Fonseca fut l’initiateur’du mouvement remarquable qui eut pour résultat le grand ouvrage de philosophie péripatéticienne auquel le nom du collège de Coïmbre est resté attaché, Commentarii collegii Conimbricensis, Societatis Jesu, in octo libros Physicorum Aristotelis Slagyritæ, in quatuor libros de cœlo. etc., Coïmbre, 1592, Sans compter des commentaires plus modestes, comme ceux d’Antoine Rubio, Alcala, 1603, etc.

D’autres maîtres jugèrent utile de grouper dans une vaste synthèse les grands problèmes métaphysiques ; tels Suarez, Disputationes melaphysicie, Salamanque, 1597, et ^jpsquez, Melaphysicse disquisiliones, Anvers, 1618 : Des traités moins étendus suivirent, publiés sous le titre de Universa philosophia ou de Cursus philosophicus, par des disciples de ces maîtres : Pierre Hurtado de Mendoza, Lyon, 1624 ; Rodrigue de Arriaga, Anvers, 1632 ; François Suarez, portugais, Coïmbre, 1632. Ces travaux ont leur place dans l’histoire de la philosophie scolastique. Le cardinal Gonzalez les cite p. 100, 102, et porte sur le plus célèbre ce jugement flatteur, p. 136 : « Suarez est peut-être après saint Thomas, la personnification la plus éminente de la philosophie scolastique. Sa conception philosophique est la plus complète, la plus universelle, la plus solide, après celle de saint Thomas, qui lui sert de point de départ, de base et de règle, comme on peut le voir en parcourant ses œuvres. Dans la métaphysique comme dans la théodicée, dans la morale comme dans la psychologie, Suarez marche généralement à la suite du docteur angélique, dont il expose, commente et développe les idées avec une remarquable lucidité. Récemment, un auteur qui n’est pas suarésien, a reconnu le grand mérite du Doclor Eximius dans ce gigantesque travail de systématisation scientifique de toute la métaphsyique : A. Grabmann, Die Disputationes Melaphysicie des Franz Suarez in ihrer. methodischen Eigenarl und Forlwicklung, p. 29-75, des Beitrage zur Philosophie des P. Suarez, par K. Six, A. Grabmann, F. Natheyer, A. Juanen et J.Biederlak, Inspruck, 1917, p. 31-37, 48. Ajoutons un représentant de la tendance thomiste plus stricte, Côme Alamanni, Summa tolius philosophiae I). Thomm Aquinalis angelici Docioris dodrina, Pavie, 1618, 1623 ; ouvrage réimprimé au siècle dernier, Paris. 1885, LSSX.

Tel fut, dans ses grandes lignes, le développement du mouvement théologique dans la Compagnie de Jésus pendant le premier siècle de son existence. Pour 1 apprécier dans toute son ampleur, il importe de ne

i pas considérer les professeurs ou les écrivains jésuites isolément, mais de tenir compte de l’influence commune el, pour ainsi dire, sociale qu ils exercèrent dans les universités ou centres d éludes analogues qu ils fondèrent ou qui leur furent confiés en tout ou en partie. Nous en avons déjà rencontré un certain nombre, en particulier le Collège romain, auquel se rattachaient, pour la fréquentation des leçons, les collèges germanique, anglais, irlandais, écossais, grec, maronite et autres. Lu dehors de l’Italie, nombreuses furent les institutions du même genre. Qu’il suffise de citer, en Allemagne, les noms suivants : Breslau, Cologne, Dillingen. Fulda, Ileidelberg, lngolstadt, .Mayence.WurLbourg ; en Autriche, Gratz, Olmutz, Prague, Vienne ; en Hongrie, Tyrnau ; en Pologne, Cracovie, Lemberg, Vilna et Zolock en l.ithuanie ; en Fspagne et Portugal, Alcala, Madrid, Valladolid, Coimbre, Kvora ; en Lorraine, Pont-à-Mousson ; en Alsace, Strasbourg et Molsheim ; en Belgique, Couvain ; à Paris enfin, l’illustre collège de Clermont. Si l’on envisage ainsi le mouvement théologique dans la Compagnie de Jésus, on peut sans manquer de réserve, lui appliquer le jugement porté par Scheeben, op. cit., n. 694, sur le même siècle pris en général : « Ce qui constitute la grandeur de cette période, c’est que toutes les disciplines de la théologie y sont cultivées simultanément comme un seul corps de doctrine. » Il n’y eut pas là, en ce qui concerne les théologiens jésuites, une réussite purement fortuite ; l’ampleur qu’ils donnèrent à l’étude des sciences sacrées n’était qu’un moyen pratique de tendre au but qu’ils se proposaient d’atteindre : défendre le plus efficacement possible la foi et la doctrine catholique, et pour cela, suivre l’adversaire ou porter soi-même l’attaque sur tous les points.

II. SECOND SIÈCLE ET TROISIÈME, JUSQU’A LA SUP-PRESSION DE LA COMPAGNIE DE JÉSUS EN 1773 : PÉRIODE D’ASSIMILATION ET DE VULGARISATION. —

Il n’est guère dans le cours habituel des choses qu’un mouvement intellectuel d’une puissance extraordinaire se poursuive longtemps avec la même intensité. Ainsi en fut-il pour la théologie doctrinale des jésuites. Il y aurait exagération manifeste à parler d’une période de décadence profonde, ou même de stagnation, en prenant ce mot dans un sens rigoureux et absolu ; mais il n’en est pas moins vrai que si l’on compare le second siècle au premier, notable est la différence, au désavantage du second. C’est là, du reste, un phénomène non particulier à la Compagnie de Jésus, mais général, à la même époque.

L’infériorité apparaît nettement en ce qui concerne les travaux de la sainte Écriture. Non que l’étude de cette science ait été abandonnée : en parcourant dans le Nomenclator d’IIurter la colonne qui s’y rapporte, on trouvera des jésuites en assez grand nombre, une cinquantaine environ ; mais aucun n’est comparable aux grands exégètes du premier siècle, et c’est à peine si l’attention est spécialement attirée par quelques noms, comme ceux d’un Ménochius, en Italie, d’un Tournemine, en France, d’un Didace Quadros, en Espagne. Si la science exégétique n’est pas stagnante, elle fait peu de progrès.

L’infériorité n’apparaît pas moins dans la théologie scolastique. Plus de commentaires de la Somme de saint Thomas, comparables par l’ampleur, a ceux des grands madrés ; suivant la remarque de Scheeben, op. cit.. |>. 709, mi s’en aperçoit par la substitution des ouvrages in-l° aux in folio, des in-S" (d. des in-12

aux in- 1°. On ne rencontre même plus, d’ordinaire, L’exposition ayant pour objet direcl le texte du docteur angélique. A pari quelques exceptions, comme l’Opus theologicum de Silvestre Maurus, Rome, ltis7, les docteurs nouveaux se contentent le plus souvent d’utiliser les matériaux accumulés par le Labeur de