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JÉS1 I ri’.s. LA DOCTRINE DE 1. GR ^CE

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multiples aux divers moyens suggérés par les pères consultés.

Un certain nombre étaient revenus au système déjà essayé des catalogues d’opinions et d’un texte commun. Ils proposaient d’envoyer aux provinces la liste des questions OU des opinions au sujet desquelles l’uniformité paraissait an défaut, et de prendre làdessus l’avis des Pères les plus graves ; ou bien d’envoyer un catalogue plus développé des opinions certaines ou probables, imposées ou prohibées. Ce catalogue serait soumis à la revision et à l’approbation de la prochaine Congrégation générale, à moins que le général ne traitât l’affaire avec un ou deux Pères de chaque province, les décisions étant prises à la pluralité des voix. La mesure était proposée comme devant s’appliquer non seulement à la théologie scolastique, mais encore, dans les choses de quelque importance, à la théologie morale et au droit canonique. D’autres souhaitaient qu’on lit rédiger dans toutes les provinces un abrégé de théologie, composé de conclusions extraites de saint Thomas avec leurs fondements principaux. On demandait pareillement qu’on fît une Somme de théologie morale, et qu’on composât un cours de philosophie d’après saint Thomas, qu’on imprimât les commentaires de ce docteur sur Aristote et qu’on les mît aux mains des étudiants, pour qu’ils les lussent conjointement avec les commentaires de Tolet et ceux de Coïmbre. Autant de mesures d’ordre réglementaire ou disciplinaire qu’Aquaviva semble viser dans sa lettre quand il parle de moyens qui entraîneraient des délais trop longs, aliqua diuturniorem moram poslularenl. Il savait, du reste, par expérience le peu de résultat pratique que ces moyens artificiels avaient donné et quels inconvénients ils pouvaient présenter. Maintenant encore, il lisait, dans les remarques reçues, des avertissements de ce genre : « Il faut prendre garde d’aller à la hâte en imposant des propositions, pour n’être pas obligé ensuite de se rétracter, comme la chose est arrivée dans certaines universités, et aussi pour ne pas exciter contre nous des ordres ou des corps enseignants qui profiteraient de cela pour traiter notre doctrine de jésuitique et pour la rejeter, comme n’étant pas la leur. » Ou encore : « Il faut prendre garde de ne pas trop restreindre la liberté d’opinion, de peur que l’élan ne se refroidisse chez les professeurs, et qu’ils ne se contentent de dire, sans rien contrôler par eux-mêmes : lia Suarcz, ila Vasquez, ou qu’ils n’en arrivent à s’en tenir purement et simplement aux écrits de leurs prédécesseurs. » Ces remarques devaient impressionner Aquaviva, car, s’il désirait ardemment l’uniformité, il n’entrait nullement dans &a pensée d’éteindre dans les professeurs l’initiative et de plonger les études elles-mêmes dans un état de stagnation.

D’autres proposaient des mesures d’ordre plutôt disciplinaire ou administratif : faire examiner soigneusement l’enseignement des nôtres par les provinciaux ou par des visiteurs ; au début de l’année scolaire, relire la lettre du Père général de uniformitale et solidilale doctrines, et faire des instructions sur le même sujet : assigner aux préfets des études une heure de considération, pour examiner la doctrine enseignée par les maîtres, en se servant des cahiers de leurs élèves : obliger les élèves à dénoncer au supérieur et celui-ci à dénoncer au provincial et au général les nouveautés que les professeurs auraient pu met he en avant ; châtier ceux qui manqueraient aux prescriptions contenues dans le Ratio studiorum, leur imposer une rétractation et, en cas de récidive, les écarter de l’enseignement. D’autres mesures s’ajoutaient, tendant a rendre plus difficile la publication des livres et plus sévère la révision. Quelques-unes de ces mesures furent approuvées par Aquaviva. mais la plupart

rejetées comme difficiles à mettre en pratique, alia

œgre ad praxim revocarentur, ou connue plus propres à causer des troubles qu’à servir au résultat désiré, alia plus turbarum excitarent quam adjumenii conferrent.

D’autres allaient plus loin encore : ils proposaient d’imposer aux professeurs de théologie et de philosophie une promesse stricte ou même un serment de suivre saint Thomas et les opinions prescrites dans le Ratio studiorum ; d’imposer également, dans les mêmes termes, aux censeurs et aux reviseurs, l’obligation d’avertir les supérieurs, toutes les fois que quelqu’un aurait avancé une opinion nouvelle. Suggestions formellement réprouvées par Aquaviva comme trop dures et contraires aux usages de la Compagnie, asperiora et socielati penitus insueta. I.e général reculait donc devant l’emploi de mesures coercitives pour procurer l’unité, malgré l’exemple donné par d’autres ordres religieux. Voir F. Ehrle, Die pùpsiliche Encijklika vom 4. August 1879, dans Stimmen ans Maria-Laach, 1880, t. xviii, p. 395-397.

Restait une autre solution, indiquée dans toutes les provinces par le plus grand nombre, plurimi in omnibus provinciis : chercher le remède non dans des ordonnances nouvelles, mais dans une meilleure exécution de ce qui avait été fixé dans le 55e décret de la Ve Congrégation générale, sur l’adhésion à saint Thomas comme docteur propre de la Compagnie. Sur ce terrain, il y aurait lieu de déclarer le sens exact et la portée de deux règles des professeurs de théologie : la seconde, où il est dit qu’on ne doit pas entendre l’obligation de suivre saint Thomas d’une façon si étroite qu’il ne soit jamais permis de s’écarter de sa doctrine ; et la quatrième où la liberté d’opinion est accordée dans les cas où la pensée du saint docteur serait douteuse. Une précision paraîtrait nécessaire, " car, si on ne déclare pas quels sont les points où il est permis de s’écarter de saint Thomas, ces concessions laissent la porte trop largement ouverte aux esprits libres. » Pour cette raison, certains demandaient l’envoi d’un catalogue comprenant les questions où la pensée de saint Thomas pouvait être considérée comme douteuse.

D’autres remarques manifestaient le désir d’un attachement plus prononcé à la doctrine du docteur angélique. On souhaitait qu’à la tête des collèges, où la philosophie et la théologie sont enseignées, il y eût des hommes très instruits et attachés au grand maître ; que les préfets des études eussent une parfaite connaissance de ses écrits, qu’ils fussent zélés et thomistes stricts, rigidi thomistse, qu’on choisît les professeurs avec beaucoup de discernement, en veillant à ce qu’ils fussent foncièrement attachés à saint Thomas, ennemis des nouveautés et d’esprit sérieux, et que sur le nombre il y en eût au moins un qui lût thomiste strict, rigidus thomisla. Dénomination qui ne visait pourtant pas le thomisme au sens dominicain du mot, car dans une remarque où l’on demandait qu’on n’obligeât pas les professeurs a suivie les opinions de saint Thomas d’une façon plus stricte que ne le font les dominicains eux-mêmes, on ajoutait que pour expliquer la pensée de ce docteur, il fallait s’en tenir « au jugement de nos auteurs, et non pas à celui des dominicains.

Aquaviva eu Ira volontiers dans un ordre d’idées qui répondail a ses propres convictions. Au début de sa lettre, il manifeste sa grande satisfaction de se trouver d’abord avec la plupart « les Pères consultés sur ce point pratique : assurer la solidité et l’unité d’enseignemenl dans la Compagnie par un attachement plus strict a la doctrine de saint Thomas. Nulle difficulté quand la pensée du saint est ccrl aine : il tant la suivre. I.n

énonçant ainsi l’obligatiqn sans distinguer entre ques-