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[ÉS1 [TES. LE RATIO STUDIORUM


t.’ons de nos Constitutions relatives à la sûreté de la

doctrine, nous font cependant un rigoureux devoir de le suivre habituellement. C’est pourquoi toutes ses opinions, quelles qu’elles soient (excepté celle qui concerne la conception de la sainte Vierge) pourront être défendues, et même on ne devra s’en écarter qu’après mûr examen et pour de graves raisons, i Pachtler, Ratio studiorum, t. ii, p. 12.

De leur côté, les six Pères chargés de préparer le Ru tio studiorum se prononcèrent sur la même question, l)c opinionum delectu in theologica facullate, Pachtler, op. cit., i. n p. 30-31. Ils maintinrent d’abord, quant a la substance, les six règles générales de saint François de Borgia ; vient ensuite cette prescription : « En théologie les nôtres suivront la doctrine de saintThomas, à l’exception d’un petit nombre d’opinions qui, tout en étant ou en paraissant être de saint Thomas, peuvent cependant être contredites sans danger et avec grande probabilité ; les supérieurs pourront donc permettre à ceux qui le voudraient, de défendre le contraire en vue d’exercer les esprits et de provoquer une recherche plus approfondie de la vérité. » Suivait rénumération des propositions laissées ainsi libres. La règle 6e complétait la matière en défendant de s’écarter de saint Thomas dans les points non exceptés.

En vue d’obtenir l’unité de doctrine, deux catalogues avaient été dressés par les membres de la commission. Ils contenaient : l’un, les opinions laissées à la libre discussion, libcræ ; l’autre, les propositions dites obligatoires, definilæ. Les propositions énoncées dans ce double catalogue s’élevaient au chiffre considérable de 597. Les professeurs du Collège romain critiquèrent vivement ce travail soumis à leur appréciation : à leur avis, beaucoup de propositions étaient déclarées obligatoires sans fondement suflisant ; en revanche, parmi les opinions dites libres, il y en avait beaucoup trop de contraires à saint Thomas, Bellarmin en comptait jusqu’à 77, dont quelques-unes lui semblaient importantes. Le Bachelet, Bellarmin avant son cardinalat, p. 510. 515. Ces critiques eurent leur effet ; si le double catalogue fut maintenu dans le Ratio de 1586, le nombre des propositions lut réduit de près des deux tiers ; au lieu de 597, il n’y en avait plus que 202, dont 67 dites facultatives, liberté, et 104 obligatoires, definitæ. Pachtler, op. cit., t. ii, p. 32, 205.

Des attaques plus graves, se produisirent. Henri Henriqucz, alors transfuge de la Compagnie, dénonça le Ratio, comme opposé à saint Thomas, dans un mémoire présenté à l’Inquisition d’Espagne, le 20 octobre 1586. Astrain, op. cit., t. iii, p. 407. L’affaire n’eut pas de suite, d’autant que le Ratio, soumis à l’Inquisition de Rome, sortit indemne de l’examen. Cf. Bellarmin avant son cardinalat, p. 497. Le double catalogue de propositions fut maintenu dans l’édition de 1591, ou plutôt dans le supplément publié l’année suivante sous ce titre : Circa ordinan studiorum Societidis, propositionum catalogi duo : cdlcr dc/initarum ex Summa sancti Thomæ, liberurum aller. Au début se trouvaient six règles générales, De opinionum delectu, précédées d’une courte préface. Le Père général y disait, (’litre autres choses, qu’il avait paru bon de prescrire aux professeurs de suivre en théologie la doctrine de saint Thomas, sans cependant leur ôter le droit « de s’écarter parfois de saint Thomas à la condition que la chose fût rare et justifiée, que l’opinion préférée eût en sa faveur des auteurs graves et approuvés et qu’en outre elle parût au professeur plus propre à défendre les points communément admis, modo id raro et ex causa flot, et opinio quam sequentur habeat graves et probatos auctores, videaturque lectori factlior ad defendenda munis recepta.

Même ainsi délimitée et restreinte, la permission écarter parfois de saint Thomas semblait encore

trop large à quelques-uns. dont Bellarmin. Sur ces entrefaites, la Y’Congrégation générale fut convoquée ; elle s’ouvrit le 3 novembre 1593. Dans l’audience dont il en gratifia les membres, Clément VIII récemment monté sur le trône pontifical manifesta le désir de voir la Compagnie de Jésus s’attacher étroitement à la doctrine de l’Ange de l’École. Ce fut sous l’influence de ces divers motifs que les membres de la commission spéciale, nommée par Aquaviva et confirmée par les Pères de la Congrégation rédigèrent un certain nombre de règles générales.

D’abord, quatre faisant suite à une préface portaient sur l’obligation et la manière de suivre saint Thomas. « 1. Que les nôtres considèrent saint Thomas comme leur docteur propre, ni proprium doctorem habeunt, et qu’Us soient tenus de le suivre en théologie scolastique ; car les Constitutions nous le recommandent et le souverain pontife Clément VIII en a exprimé le désir. En outre, comme d’après les Constitutions nous devons, dans la Compagnie, nous attacher à la doctrine d’un seul et même auteur, il n’en existe pas actuellement chez qui l’on puisse trouver une doctrine plus solide et plus sûre, ce qui fait que saint Thomas est justement regardé comme le prince des théologiens. — 2. Cette obligation ne doit pas cependant s’entendre si rigoureusement qu’on ne puisse s’écarter en quoi que ce soit du saint docteur, puisque ceux-là mêmes qui se disent plus particulièrement thomistes, s’en écartent parfois et qu’il ne serait pas équitable d’astreindre les nôtres à suivre le saint docteur d’une façon plus étroite que les thomistes. — 3. Dans les questions purement philosophiques, comme dans celles qui se rapportent aux saintes Écritures et au droit canonique, on pourra suivre également les autres auteurs qui ont traité ces matières d’une façon plus expresse, magis ex professo. — 4. D’ailleurs, pour qu’on ne puisse pas prendre de là occasion pour abandonner à la légère la doctrine de saint Thomas, il faudrait, semblc-t-il, prescrire de n’appliquer à l’enseignement de la théologie que des gens véritablement affectionnés à la doctrine de saint Thomas, car si quelqu’un est véritablement attaché à saint Thomas, on peut être certain qu’il ne s’écartera de lui qu’à contre-cœur et très rarement, nisi gravate admodum et rarissime. »

A ces prescriptions s’en ajoutèrent d’autres dans les règles pour le choix des opinions : « 1. Que nos professeurs suivent en théologie scolastique la doctrine de saint Thomas, et que désormais nul ne soit promu à l’enseignement de la théologie s’il n’est véritablement affectionné à saint Thomas ; quant à ceux qui ne lui seraient pas affectionnés ou qui lui seraient opposés, qu’on les écarte des chaires de théologie. Mais sur la conception de la bienheureuse Marie et sur la solennité des vœux, qu’on suive la doctrine qui, de nos jours, est plus commune et plus généralement approuvée des théologiens. — 5. Dans le cas où la pensée de saint Thomas serait ambiguë, comme dans celui où les docteurs catholiques seraient divisés sur des questions que le saint docteur n’aurait point traitées, les nôtres pourront suivre à leur gré l’un ou l’autre parti, à la condition de défendre leur opinion avec modestie et bienveillance, en respectant l’autre et. à plus forte raison, en sauvegardant l’autorité du professeur qui a précédé, s’il avait soutenu le contraire. Et même s’il y avait moyen de concilier les divers auteurs, il serait souhaitable qu’on ne négligeât pas de le faire, i

Les mêmes principes se retrouvent, avec les modifications nécessaires, dans les règles pour le choix des opinions en philosophie : « 1. Que dans les choses de quelque importance, les professeurs de philosophie ne s’écartent pas d’Arislole. sauf le cas OÙ lui-même serait en désaccord avec les doctrines universellement