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JÉRUSALEM ÉGLISE DE). DES CROISADES <>> JOl RS


posons donc de dire avec précision quel est le symbole tre foi. » La première partie de l’exposé conciliaire

est d’ordre plutôt historique : elle tend à expliquer comment l’Église orthodoxe ne peut être rendue solidaire de Cyi Ule Lucaxis. Si tant est qu’il soit l’auteur de la profession de foi si favorable au protestantisme qu’on lui attribue. Cyrille n’est pas, dans la circonstance le porte-parole de sa communauté. Son attitude "llicielle extéiieure est déjà à elle seule une protestalion contre cette calomnie. C’est dans ses œuvres authentiques qu’il faut chercher l’expression sinon de sa pensée personnelle, du moins des croyances officielles de son Église. La vaine hypothèse que les Orientaux partageraient des croyances voisines de celles du protestantisme se heurte à la constatation lie leurs usages, de leurs professions de foi, des anathemes dont ils chargent, au cours des cérémonies saintes, des erreurs analogues a celles qu’on voudrait leur imputer. Avec une emphase quelque peu vaniteuse, le texte dénombre les rangs serrés des peuples qui se rattachent à l’Église orthodoxe, et qui tous partagent la même répulsion à l’endroit des nouveautés doctrinales ; puis il reproduit les jugements portés contre Cyrille aux deux synodes de Constantinople (1638) et de Jassy (1642).

Cette longue dissertation mi-partie historique, mipartie polémique est suivie d’un exposé positif de la doctrine orthodoxe sous dix-sept capitula qui répondent point pour point à ceux de Cyrille. Cet arrangement explique un certain nombre de répétitions fastidieuses, et le désordre apparent de toute cette pièce. Quelques reproches d’ailleurs qu’on puisse lui adresser, elle n’en reste pas moins un exposé remarquable de la dogmatique et par endroits de la théologie orthodoxe. Le concile de Trente n’y est pas nommé, mais plusieurs de ses définitions sont sous-jacentes au texte grec. Passant rapidement sur l’enseignement trinitaire et christoiogique (can. 1 et 7), le concile insiste d’abord sur la règle de foi, qui est fournie par l’Écriture sainte, interprétée par l’Église dont l’autorité est la même que celle des Livres saints (can. 2). L’Église n’est d’ailleurs pas instruite immédiatement par le Saint-Esprit mais par l’intermédiaire des saints Pères ican. 12). Cette Église n’est pas seulement la société des justes ; c’est l’ensemble de tous les fidèles du Christ, sous l’autorité et la direction de celui-ci. De l’Église, c’est Jésus-Christ lui-même qui tient le gouvernail. Il a comme représentants immédiats les évêques établis par le Saint-Esprit, successeurs des apôtres, dotés dès lors d’un pouvoir bien supérieur à celui des simples prêtres (can. 10 et 11). On remarquera que la rédaction de ces canons est conçue de manière à éliminer, sans le dire, l’autorité du pape. Clément à Rome, Évodius à Antioche, Marc à Alexandrie sont déclarés tous trois les successeurs de Pierre. Les enseignements dirigés contre les concepts protestants de la justice originelle et du péché d’origine, sont exposés aux canons 5 et 6. Il n’y a pas lieu d’y insister ; mais il convient de faire remarquer la rédaction du canon 3 relatif à la prédestination, aux rapports de la grâce et de la liberté, et à la volonté salvifique universelle. Elle est influencée, sans conteste, par le désir de répondre non seulement aux protestants, mais encore aux jansénistes. Le concile de Trente, arrêté par le respect dû au grand nom de saint Augustin, n’avait touché que d’une main très prudente à la doctrine de I.i prédestination unie prævisa mérita. L’assemblée de Jérusalem, au contraire, n’hésite pas à proclamer comme la croyance olhcielle de l’Église orthodoxe le molinisme le plus strict : heus ///os prædeslinavil quos arbilrio suo bene usuros prsescivit, quos vero maie damnât. La doctrine de la grâce efficace par elle-même est explicitement rejetée, et le concept de grâce pré venante, /ifiç TfoxotTctpxTix’i/j, et de grâce spéciale, ^âpiç [Six ?), se calque exactement sur le schéma : grâce suffisante et grâce efficace. La volonté salvifique universelle est affirmée avec non moins de force. La doctrine de la fol justifiante et de son rapport avec les œuvres est touchée plus légèrement, toutefois le concile affirme que l’homme, même non justifié par la foi, peut faire le. bien moral grâce au libre arbitre, qui demeure toujours dans la nature humaine (can. 13 et 14). La partie la plus considérable de l’exposé doctrinal est celle qui est consacrée aux sacrements ; elle serre de très près les définitions de Trente, surtout en ce qui concerne l’eucharistie : la présence réelle, le dogme de la transsubstantiation, (xerouaicoatç, l’adoration due au corps du Christ, le caractère sacrificiel de la messe (can. 15, 16, 17). Au contraire le canon 18 consacré aux doctrines eschatologiques est inspiré par le désir de ne pas compromettre les doctrines propres de l’Église grecque avec celles des latins. A toute force le rédacteur veut éviter le terme de purgatoire, bien que le concept qu’il présente recouvre assez exactement celui de l’Église romaine. « Les âmes des défunts sont ou dans le repos ou dans la souffrance, suivant les œuvres accomplies ici-bas. A peine sont-elles séparées du corps, qu’elles se rendent soit au séjour de joie, soit au lieu de tristesse et de gémissement, où d’ailleurs ni la béatitude ni la damnation ne sont encore absolument complètes. C’est seulement en effet après la résurrection générale, après la réunion de l’âme avec le corps, que chacun recevra complètement la béatitude ou la damnation. Quant à ceux qui sont morts avec des péchés mortels, mais qui n’ont pas quitté cette terre dans le désespoir, et ont eu le temps de se repentir dans cette vie corporelle, ils ne peuvent plus certes faire aucun fruit de pénitence (verser des larmes, s’agenouiller, veiller dans la prière, se mortifier, secourir les pauvres, bref faire des œuvres satisfactoires, txavorcoieïv). Ces âmes vont, elles aussi, en enfer, etç #80u ; elles y endurent les peines de leurs péchés, mais elles ont conscience de leur libération future ; elles sont libérées en effet, par la souveraine bonté, et par l’intermédiaire de la prière du prêtre, par les aumônes, etc. Mais le principal moyen est le sacrifice non sanglant, que chacun fait offrir pour ses parents défunts et que l’Église catholique et apostolique offre journellement pour tous. Il convient seulement de remarquer que nous ne connaissons pas le temps de la libération ; que les âmes soient délivrées de leurs peines, avant la résurrection générale et le grand jugement, nous le savons et le croyons ; mais quand cela arrive-t-il, nous ne le savons pas. »

Le document conciliaire se termine par les réponses à quatre questions d’ordre plutôt pratique : lecture de la sainte Écriture en langue vulgaire : nécessité d’expliquer aux fidèles les Livres saints ; canon biblique ; culte des saints et des images. La réponse à cette dernière donne au rédacteur l’occasion de toucher aux chapitres de la prière vocale et mentale, du monachisme et des vœux de religion, des jeûnes et abstinences. Sur tous ces points la pratique de l’Église orthodoxe ne diffère pas de celle de l’Église romaine. Le document se termine par une remarque qui a son importance. La doctrine que nous venons d’exposer surtout en matière sacramentelle, dit-il, n’est pas seulement la nôtre, elle est celle des Églises dissidentes, nestorienne et jacobite, séparées depuis longtemps déjà de l’Église orthodoxe. Cet accord est un sj^tie de l’antiquité et de la vérité de nos croyances.

Tel est cet important document auquel à diverses reprises l’Église orthodoxe aimera à se référei comme à l’exposé le plus complet de ses doctrines dans les questions soulevées par la controverse pi ot estante. Pour ne citer qu’un exemple, c’est à lui, que renvoient