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JÉRÔME (SAINT). BIOGRAPHIE

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Testament faite directement sur le texte original. L’exécution de semblable tâche suppose, outre une connaissance approfondie de la langue, <le l’histoire et des usages du peuple hébreu, un courage et une ténacité à l’abri de toute défaillance. Aucune de ces conditions ne faisait défaut à Jérôme. Toutefois, se pliant en partie aux circonstances, il ne s’astreignit nullement à suivre l’ordre du canon scripluraire. 11 débuta, vers 390, par les quatre Livres des Kt<is. dont les deux premiers s’appellent dans l’hébreu Livres de Samuel ; et il les lit précéder d’une préface célèbre, connue sous le nom de Prologus galeatus. Vinrent ensuite Job, les Psaumes, les douze petils prophètes et les grands, sauf, probablement Daniel. Déjà en 392, année où il publia le De viris illiislribus, l’ensemble de son travail était sans doute fort avancé, puisque, dans la liste qu’il donne de ses propres écrits, il affirme simplement qu’il a traduit de l’hébreu i l’Ancien Testament ». Il esi vrai que, suivant ce qu’il écrivait à l’anunachius vers 393, Epist., xi.ix, P. L., t. xxii. col. 512, certaines parties durent rester plus ou moins longtemps* enfermées dans son secrétaire. attendant apparemment d’être revues et complétées avant de sortir de ses mains. Plusieurs livres sapientiaux : les Proverbes, YEcclésiaste, ainsi que le Cantique des cantiques, virent le jour en cette année 393 ; Esdras, X< hernie et les Paralipomènes, dans les deux ou trois années suivantes : VŒtateuque et peut-être Tobie, Esther. Judith et Daniel, seulement vers 404 ou 405. L’auteur avait donc été occupé a cette œuvre quinze ans durant. Les livres de Tobie et de Judith, et une partie de Daniel, qui n’existent pas en hébreu, furent traduits par fin du chaldécn. Sur l’importance, les qualités et les avantages de cette traduction, devenue notre Vttlgale latine, voir ce mot.

2. Les querelles orige’nistes et les démêlés arec Jean de Jérusalem. Nous abordons, dans la vie de Jérôme, une période aussi attristante qu’imprévue, celle de sa rupture et de ses trop acerbes démêlés avec Ru fin d’Aquilée. Ces deux hommes semblaient faits pour s’entendre et s’entr’aider toujours ; leur étroite amitié était, dit saint Augustin, « chose très connue dans presque toutes les Églises. « Jérôme en avait plus d’une fois vanté avec enthousiasme la douceur et l’inaltérable constance. A peu près de même âge et de mêm : nationalité, riches l’un et l’autre des dons de l’intelligence, ils unissaient également des goûts littéraires très prononcés a l’amour de l’Église et des sciences ecclésiastiques. Leurs vies s’étaient développée parallèlement, et ils avaient fini par se fixer tous les deux en Palestine. Car Rufin y habitait, lui aussi, retiré dans un monastère du mont des Oliviers. Il n’est pas jusqu’à L’étude d’Origène et une sorte d’admiration Cl QUne pour son génie qui n’eussent contribué a

unir ces deux âmes. Et pourtant ce lut Origène qui

les divisa. On connaît assez les erreurs (lue résume Le

terme d’origénisme..Jérôme ne les ignorait pas plus qu’il ne les partageait. Cependant, en utilisant, en ci

tant pari ois. et souvent avec éloge, les c eu v l’es du grand docteuralexandrin.il n’avait point cherché et il avait rarement saisi l’occasion d’en combattre les doctrines lausses ou téméraires. Or, en 393 OU 394, Voici qu’un

moine, nommé Aterbius dénonça comme origénistes Rufin et Jérôme. Ce dernier n’hésita pas à déclarer publiquement qu’admirateur du talent et de l’érudition d’Origène, il n’entendait nullement se rendre solidaire de sis opinions erronées : Rufin, au contraire. garda le silence. I)e la un premier refroidissement. Ce

lui bien pis quand Épiphane succéda comme zélateur de l’orthodoxie a Aterbius, L’ardent évêque de Salamine s’était transporté de Chypre a Jérusalem avec

le dessein arrêté de taire la guerre a l’origénisme. Il se défiait, non sans raison peut être, des tendances de

L’évêque Jean. Défait, ni par des entretiens particuliers, ni par des remontrances publiques, peu déguisée ^ et de forme peut-être assez inopportune, il ne put en obtenir le désaveu qu’il désirait. Jérôme s’était tout naturellement rangé du côté d’Kpiphane. tandis que Rufin s’abritait derrière l’autorité de l’évêque du lieu. Un incident déplorable vint aggraver la division et justifier en apparence les résistances de Jean : Épiphane pour assurer le service divin dans les monastères de Bethléem, dont leur premier pasteur se désintéressait désormais, avait conféré le sacerdoce à Paulinicn. frère de Jérôme ; d.’là le reproche d’avoir empiété sur la juridiction de L’évêque du lieu. Vainement essava-t-il d’expliquer son cas, dillicilement justifiable, et. a plus forte raison, d’arracher à Jean une déclaration doctrinale conforme a ses vues. Lu désespoir de cause, il résolut de se séparer de la communion de l’évêque de Jérusalem et il conseilla aux moines d’en faire autant. Jérôme tenait trop à sa réputation d’orthodoxie et à l’amitié d’Épiphane pour se dérober a un acte dont il ne se dissimulait pas les très graves inconvénients. Sa situation et celle de ses monastères devinrent dès lors très difficiles : l’accès de 1 église de Bethléem et de la grotte même de la Nativité lui fut interdit, à lui et à ses moines. Rien d’étonnant que ces événements l’aient affligé et ému au plus haut point, et que, dans sa correspondance et ses autres écrits de cette époque, il se soit répandu en plaintes et en récriminations fort vives contre Jean. Mais c’est surtout contre Rufin, assez habile pour faire intervenir l’autorité épiseopale et s’en couvrir, qu’il exhale en ternies parfois fort durs son profond ressentiment. L’évêque, de son côté, songea un moment à se débarrasser des opposantsen les faisant exiler. Epist., i.xxxii, 10, P. ]… t. xxii, col. 741. Le patriarche d’Alexandrie, Théophile, mêlé par Jean à cette querelle ne se montrait pas d’ailleurs des plus favorables à Jérôme. On sait quelles étaient alors, à l’endroit de l’origénisme, ses sympathies, qui subirent, quelque temps après, une curieuse évolution.

Pour pénibles et absorbants que fussent ces démêlés, Jérôme n’en continuait pas moins ses autres travaux. On rapporte aux années.’in i - : i *. > 7° le Commentaire sur JonaS, et l’explication des Dix visions d’Isaïe, qui fut rédigée sur les instances d’un évêque île Pannonie, Amabilis, et que le saint docteur insérera telle quelle, plus tard, dans son Commentaire complet sur ce prophète. Un grand nombre de lettres, dont la plupart agitent ou résolvent des problèmes scripturaires. appartiennent à la même époque. Parmi elles, il convient de signaler spécialement : une lettre à Népolien, sur les devoirs et les vertus propres aux clercs et aux moines, EpisL, in. P. L. t. xxii. col.527 ; deux a Paulin de Sole, pour l’encourager a se « h er toul entier à la piété et à l’étude des saintes

Écritures un et i.vm. col. 540, 579 ; une à Furia,

sur les mérites de l’état de viduile et les moyens de

la sanctifier, uv ; une à Pammachius, qui traite ex pro /inn. ; de la meilleure manière de traduire les auteurs tant sacrés quc profanes et qui est la plus connue de celles qui lurent adressées ; i ce destinataire, i.vu.

L’année 397 vit renaître un peu de tranquillité autour de Jérôme. Entre lui et Rufin, qui quittait la Palestine pour regagner l’Lurope. il y eut réconciliation publique ; dans l’église de la Résurrection,

a Jérusalem, ils se donnèrent solennellement la main. Mais les bons rapports furent-ils rétablis du même coup avec l’evcque Jean ? Ce point reste douteux : cl il y a des indices que, de ce côté, le rapprochement n’eut lieu qu’en 399. Avant cet heureux événement, qui mettait fin a une lamentable scission de trois ou quatre ans. Jérôme (’tait tombé malade : trois mois durant il lut aux prises avec une forte lièvre, et son