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JÉRÉMIE. LES DONNÉES HISTORIQUES

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rent alors, ils s’cnquirent de l’origine de tels oracli après avoir recommandé à Baructa et à Jérémie de se tenir cachés, ils allèrent rendre compte au roi des événements. Celui-ci voulut naturellement connaître ces discours, si pleins de menaces à l’adresse de son peuple : lecture lui en fut faite, et, soit mépris ou espoir de détourner ainsi de sa personne et de son royaume la condamnation qu’il venait d’entendre, il se mit à lacérer avec un couteau le rouleau des prophéties et a en jeter les morceaux au feu ( d’après l’interprétation plus probable de l’hébreu, le livre entier aurait été lu). Vain espoir, car le livre allait être reconstitué et de nouvelles menaces y être encore ajoutées : Jérémie, en effet, fait annoncer à Joakim que Iahvé fera venir sur lui, sur sa race, sur tous ses serviteurs et sur tous les habitants de Jérusalem et les hommes de Juda tous les malheurs qu’il leur a annoncés, xxxvi, 21 ; puis, ayant donné à Baruch un autre volume, il lui dicta « toutes les paroles du livre que Joakim, roi de Juda, avait brûlé, et beaucoup d’autres paroles semblables y furent ajoutées. » xxxvi, 32.

Tel est en substance le récit des origines du livre de Jérémie, l’exactitude historique ne saurait en être mise en doute. Les conclusions suivantes s’en dégagent : 1° Jusqu’alors Jérémie n’avait pas composé de recueil de ses discours, et, alors même que rien n’empêche de supposer qu’il a pu mettre par écrit tel ou tel de ses oracles, il semble bien que la plupart furent alors reproduits de mémoire, quitte à subir dans leur rédaction quelque modification, commandée par les circonstances, particulièrement par le but avant tout pratique que se proposait le prophète, à savoir : inspirer une crainte salutaire, dans l’espoir d’une conversion.

2° Les circonstances et le but de la composition du recueil invitent encore à penser que celui-ci ne devait contenir que des discours, accompagnés tout au plus de quelque brève notice ayant trait à leur origine, et groupés vraisemblablement sans grand souci de l’ordre chronologique

3° Le second volume ajouta au contenu du premier beaucoup d’autres paroles semblables, et par là on peut entendre non seulement des oracles postérieurs à la première rédaction mais encore quelques-uns de ceux qui, remontant a l’époque antérieure à la quatrième année de Joakim, n’avaient pas été recueillis dans cette première édition. « D’où il apperl que, dès l’origine, le contenu du livre prophétique apparaît comme dilatable. Et cela se comprend sans peine dès qu’il s’agit, non d’une reproduction littérale’des oracles, niais plu lot du résumé de la mission prophétique. Des discours <mi pu être d’abord négligés qu’on jugea bon de recu< illir ensuite ; dans chaque discours, des idées, des développements mit pu être simplement indiqués, que plus tard on estimera utile de souligner. ».1. Touzard, L’âme juive au temps des Perses, dans Renuc biblique. 1910, p. 319. Ce travail, entrepris d’abord par Jérémie et Baruch, pourra fort bien se continuer, même après la mort du prophète par tel ou tel de ses auditeurs ou de ses disciples, qui ajoutera au recueil déjà existant des discours jadis prononcés par Jérémie mais non encore ici mi s.

Peut-on préciser davantage et essayer de compter les étapes successives par lesquelles passa le livre avant d’atteindre sa forme actuelle en indiquant les pas

qui remontent à chacune d’elles ? Ces critiques n’ont pas reculé devant l’entreprise et c’est ainsi qu’ils se proposent toul d’abord l’évaluation du contenu du premier volume, celui que brûla Joakim, mais, Faute de données précises, les conclusions varient : un livre

qui a été lu à trois reprises différentes dans le courant

de la même journée pouvait-il être bien long ? et pourtant, d’autre part, n’était-il pas l’écho d’une prédira tion de pins de Vingt années ? lire !, i telle évaluation

demeure bien problématique ; voici celle qu’adopte Steuernagel, Lehrbuch der Einleilung in das Alte Testament, Tûbingen, 1912, p. 564-505 : i-n ; iii, 1-13, 19-25 ; iv, 1-ix, 21 ; x, 17-22 ; xi ; xii, 1-13 ; xiii, 1-17, 20-27 ; xiv-xv, 1-6, 10-21 ; xvii, 12-18 ; xviii ; xix 1, 2°, 10, 11 », 12 » ( ?) ; xx, 7-18 ; xxi, 11-1 1 : xxii, 1-23 ; xxv ; xlvi, 1-12 : et peut-être : xvi, 1-13, 16-17 ; xvii, 9-10 ; xxiii, 9-40 ; xxxi, 2-9, 15-22 ; xlvii ; xlvtii ; xlix, 1-22, 28-33. Pour le contenu du second rouleau, si l’on est généralement d’accord pour y reconnaître le noyau de notre livre actuel, il n’en va plus de même lorsqu’il s’agit d’en reconstituer les éléments ; à plus forte raison pour les éditions suivantes qui, au nombre de trois, auraient finalement et assez longtemps après la prise de Jérusalem donné au recueil sa forme définitive. « Vouloir déterminer d’une façon précise, comme plusieurs s’y efforcent, le contenu de ces diverses éditions serait une entreprise chimérique. » Condamin, op. cit., p. XLII.

III. Les données du livre de Jérémie, - I. les DONNÉES HISTORIQUES. — (Jn livre Ici que celui de Jérémie, où abondent les allusions aux événements contemporains, soit dans les parties narratives, soit dans les parties prophétiques, appelle le contrôle de l’histoire. La valeur et l’autorité du livre, non moins que les conclusions relatives à son origine pourront lui demander et en recevoir une garantie nouvelle, tandis que la réalisation des événements, prédits par le prophète, confirmera le caractère surnaturel de sa mission. Deux catégories de faits à étudier : les uns, objet de récits ou de simples allusions, les autres de prédiction.

Récits ou allusions historiques.

En ce qui les

concerne, leur accord général avec les données fournies par d’autres livres de la Bible, celui d’Ézéchiel en particulier, et d’autre part, l’authenticité substantielle du livre, en assurent l’exactitude historique, laquelle est d’ailleurs généralement reconnue. Bien des problèmes toutefois continuent à se poser à leur sujet et les remarques suivantes pourront dans la plupart des cas leur apporter une solution satisfaisante. Ainsi le silence sur certains événements contemporains de l’activité du prophète, tels que la découverte, dans le temple, du livre de la Loi ou la réforme de Josias, peut paraître singulier, d’autant plus que, par ailleurs, les allusions aux événement s d’ordre politique et religieux abondent. Mais c’est ici surtout qu’il y a lieu de tenir compte des circonstances dans lesquelles fut composé le recueil des prophéties ; en effet, la première rédaction des oracles n’ayant eu lieu que la quatrième année de Joakim, assez longtemps par conséquent après la decouverte du livre de la Loi et la réforme de Josias. elle avait à se préoccuper surtout de la situation présente, où ces mêmes événements n’étaient certes plus au premier plan. D’autre part, des difficultés d’ordre chronologique, telles que le désaccord entre certaines données du livre des Rois et de celui de Jérémie, l’impossibilité d’établir avec exactitude la suite chronologique de certains faits ou la durée de certains règnes, peuvent trouver une explication dans l’imprécision et la variété de la coniputalion hébraïque. Dans les grandes lignes d’ailleurs les renseignements d’origine babylonienne confirment les indications bibliques. Cf. Condamin. op. cit., p. xviii-xi Des invraisemblances, des inexactitudes disparaîtront par la simple restitution du texte dans sa teneur ou dans son ordre primitifs. Sur la difficulté particulière de l’évaluation du Chiffre des déportés, voir Touzard, L’âme juii’e au temps îles l’erses, dans Renie biblique, 1917, p. 6’l-74 el Condamin, op. cit., p. 361-363.

De nouvelles découvertes pourront en lin élucider certains points, jusqu’à présent demeurés obscurs. (’.'est ainsi que les papyrus d’I'.Icpbantine, en révélant