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l ÉRÉMIE. VERSIONS


la fin de la prophétie contre Babylone, et qui s’est maintenue dans le texte massorétique seulement :

Jusqu’ici les paroles de Jérémie. » i.i. 64. Si elle a sa place inarquée dans l’hébreu où elle termine toute la série des discours du prophète avant l’appendice historique, sa présence dans le grec n’aurait rien non plus que de naturel puisqu’elle serait la conclusion du premier recueil, c. x xviii. Il en est de même d’une note analogue qui est à la fin de l’oracle contre Moab, xLvni. 17 ; si elle ne se comprend pas dans l’hébreu, puisque la prophétie est au milieu des autres, elle s’expliquerait au contra’re fort bien dans le grec puisqu’elle marquerait la fin des oracles contre les nations, xxxi. 44.

On peut donc conclure avec quelque vraisemblance à l’existence de deux collections distinctes des prophéties de Jérémie. la première c. i-xxviii du grec, comprenant des prophéties de date ancienne pour la plupart et terminées par les oracles contre les trois grandes puissances, Elam, l’Egypte et Babylone ; la seconde xxxii-i.i du grec, contenant quelques prophéties et des récits historiques. Les oracles contre les petites nations, d’abord sans doute indépendants, auraient été ensuite groupés sans souci d’arrangement systématique et mis eu tête de cette deuxième collection. La réunion de. ces deux recueils n’était pas encore chose faite lors de la traduction grecque des livres prophétiques à Alexandrie, probablement au u ( siècle avant Jésus-Christ. Quand elle eut lieu, la note de la fin du premier recueil : i Jusqu’ici les paroles de Jérémie » n’étant plus en place au milieu du livre, a pu faire croire à un déplacement du passage qui la précédait et pour cette raison celui-ci aura été transporté à la fin du livre avec toutes les autres prophéties contre les nations ; c’est alors que celles-ci auraient été disposées dans un ordre jugé meilleur, ordre géographique par exemple, allant de l’ouest à l’est, de

l’Egypte a Babylone. Cf. Thackeray, loc. cit., p. 256257 ; Condamin, Le livre de Jérémie, p. xxviii-xxix.

Tel’e serait l’origine des différences entre les dispositions du texte hébreu et de la version grecque ; cette dernière ayant sauvegardé l’ordre primitif. Simple hypothèse sans doute, mais qui, outre la réponse satisfaisante qu’elle donne aux questions ci-dessus posées, rendrait compte également de la confusion chronologique facile à constater dans tout le livre. Voir plus loin. < Enfin, comme le remarque le P. Condamin. si les choses se sont passées ainsi, si les deux recueils ont été finalement joints bout à bout, en dépit de l’ordre chronologique, c’est une preuve du respect avec lequel on traitait les Écritures prophétiques. Certains critiques parlent à chaque instant de remaniements 1res libres infligés aux anciens textes par les éditeurs. Ici un désordre apparaissait avec évidence

dans |e mélange des règnes de Joakini et de Sédccias ; la fusion des deux recueils en un seul était une excellent occasion d’y porter remède en rangeant les prophètes suivant un ordre meilleur. Nous voyons cependant qu’on a conservé l’ordre primitif. Sauf pour

les oracles sur les nations, et donc (lins les parties principales du livre, l’édition massorétique offre les mêmes groupements que l’édition des Septante Le livre de Jérémie, p. x xix.

2 L’étendue du livrr de Jérémie. — Une deuxième particularité distingue le texte grec de l’hébreu mas-BOrétique : l’omission dans les Septante d’un nombre considérable de mois on de passades qui se trouvent dans l’hébreu et la Vulgate. Pareil phénomène sans dOUte se retrouve ailleurs dans l’Ancien Tcslanient mais jamais dans de telles proportions : 2 700 mois d’après le calcul de Graf, ou la huitième partie environ du livre, n’oni pas leur correspondant eu grec.

I Uns le nombre de ces omis ions, il en est d’insigni fiantes, telle, celle du mot lahvé dans l’expression : Iahvé déclare : on le compte 100 fois seulement dans le grec pour 170 environ dans l’hébreu : telle encore celle du mot Sabaolh dans l’expression : Iahvé des armées ; telle enfin celle du titre même de prophète en apposition au nom de Jérémie.

Mais, à côté de ces omissions sans importance, il en est d’autres plus graves, voici les principales : ii, 1-2 (en grande partie) ; vii, 1-2 (presque tout), 27 (presque tout) ; vin. 10-12 (presque tout) : x, ti-S. 10 ; xi. 7 8 (sauf les deux derniers mots) ; xiii. 10*, 12 (plusieurs mots) ; xiii. 1 et partie de 5, G, 17 : xvii, 1-4 : xxiii. partie de 10. 36, 1-17. 38 ; xxv. I 1’. 7 1’. 9°, M, 18 ideux derniers mots), 20", 25 », 20 (derniers mots) : xxvi, 22’: xxvii. 1, ꝟ. 7, 8 (plusieurs mots), 12 b -14 « , 17, l 1’, P.) (presque entier), 20 h -22 ; xxviii. partie c’e 3, 4, 11. 14-16 ; xxix. 14, 16-20, partie de 1, 12, 21. 25, 2 ; xxx, 10-11, 15 19 b, 22 ; xxxi, 17*, 37 ; xxxii, 5°, 11 1’, 19 (derniers mots), 30t> ; xxxiii. 14-26 ; xxxiv, 4 1’, 10 b, 1P’. 19 b, 21 (plusieurs mots) ; xxxv (plusieurs mots), 17 b, 18 19 ; xxxvi, 0’, 9 (en partie), 25 et 20 en partie ; xxxviii, 9 a, 12 (en grande partie) : xxxix, 4-13. 16 b ; xi.. 3 4 b, 5°, 7 (plusieurs mots), 12 » ; xli, partie de 2. 7, 10, 14, 10 : xlii, 9 1’, 19 b, 21 a ; xi.iv, 12’. 29 1’; xxv, 1 (derniers mots) ; xlvi, 1, 14 (plusieurs mois), 25-26 : xi.vii, 1 (en grande partie) : xlviii, partie de 40-41 et 15-17 ; xux, G, 31 et partie de 12 et 24 ; i.. partie de 1, 2, 14, 28, 36, 39 ; li, partie de 22, 28. 57, r>i et du dernier stique de Il au premier de 49 ; lu. 2-3. 12 (en partie), 15-16’, 28-30.

Comme précédemment, mais pour de nouvelles raisons, une même question se pose : quel est le texte primitif, quel est celui qui ajoute ou retranche à l’autre ? Est-ce le traducteur grec qui par ignorance, négligence ou fantaisie a laissé perdre une partie du texte à traduire ? Kueper, Hævernick, Graf, Keil, Trochon le pensent. « l’ne bonne partie de ces omissions, dit ce dernier, est tout à fait contraire aux habitudes des Hébreux, ceux-ci font habituellement suivre le nom d’un personnage important du nom de son père ; les Septanlc au contraire omettent souvent cette indication. Ils resserrent et abrègent les descriptions plus détaillées de l’hébreu, xxix, 11 ; xxxii, 11 : xi.iv. 29 : xxvii, 18-22 ; … Ils passent des mots dont ils ne comprennent pas le sens, ainsi xi.iv, 19 ; xxxii. 10 ; ils en suppriment qu’ils trouvent hyperboliques ou peu justes, xxvii, 5, 7 ; xxxviii. 2 I, etc. » Jérémie, Lamentations, Baruch, Paris, 1878, p. 16.

A l’opposé J.-D. Miehaélis, Eichhorn, Movers, Bleek, Workmann préfèrent le texte grec qui reproduirait plus fidèlement l’original. C’est encore l’opinion de critiques plus récents tels que Slreane. Giesebrecht, Steuemagel. Ce dernier, entre ces deux hypothèses d’un traducteur grec faisant intentionnellement des coupures ou des Septante représentant une forme plus ancienne du texte se prononce pour la seconde, car. dit-il. en beaucoup d’endroils où une abréviation aurait été possible, elle n’a pas été faite, et par ailleurs

il se trouve maints passages manquant dans les Seplanle que leur importance même aurait préservés d’une suppression. Lehrbuch der lunlcitunr/ in dus A. r., Tubingen, 1912. p. 533.

D’autres enfin s’en tiendraient volontiers à une opinion moyenne, ne croyant pas pouvoir trancher d’une manière générale la question de inimité île l’un ou de l’autre texte, chaque cas particulier demandant son examen et sa discussion (Pcake. Condamin). Si l’on comprend l’omission du litre de prophète 8 côté du nom très connu de Jérémie, dans une copie ou une traduction, on comprend moins l’addition de ce même titre par un éditeur, si enclin soitii à la paraphrase.

I.’indication de /ils d’un tel aura pu être laissée de côté, surtout a une époque plus récente, plutôt qu’ajoutée