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JEAN ITALOS — JEAN IV LE JEUNEUR

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tenue le Il avril suivant, on voit qu’Halos avait été relégué dans un monastère et que la plupart de ses disciples avaient réussi à se justifier. Mais le dossier est évidemment incomplet, les derniers feuillets du manuscrit qui le contient ayant disparu. On lit encore aujourd’hui, dans le Synodikon du dimanche de l’Orthodoxie, les dix articles dogmatiques contre Italos. Il y est accusé : 1° d’avoir voulu expliquer par le raisonnement l’union hypostatique ; 2° d’avoir renouvelé lis opinions des anciens philosophes grecs, sur l’âme humaine, le ciel, la terre et les créatures ; 3° d’avoir enseigné la métempsychose, et par suite d’avoir nié l’immortalité de l’âme humaine et la vie future ; 4° d’avoir repris à son compte la théorie de Platon sur l’éternité de la matière et des idées ; 5° d’avoir mis bien au-dessus des docteurs et des saints les anciens philosophes et les hérésiarques condamnés par les sept conciles : (>° d’avoir nié la possibilité des miracles du Christ et des saints : 7° d’avoir considéré les lettres profanes non comme de simples éléments de formation intellectuelle, mais encore comme les dépositaires de la vérité : 8e d’avoir cru aux rêveries platoniciennes sur les idées et leur union substantielle avec la matière ; 9° d’avoir prétendu que les hommes, lors de la résurrection future, ne reprendront pas les corps qu’ils auront eus durant cette vie, mais d’autres ; 10° d’avoir propagé les erreurs des anciens sur la préexistence des âmes, la non-éternité des peines de l’enfer, la formation d’un monde nouveau et la négation de la création. Un onzième article, qui a disparu depuis longtemps du Synodikon, condamnait nommément Jean Halos et ses disciples : j’en ai retrouvé le texte dans un manuscrit de l’Escurial, mettant ainsi fin aux hypothèses des critiques sur le véritable objet de ce dernier paragraphe. L’excès de la dialectique avait, on le voit, entraîné notre philosophe dans un rationalisme fortement teinté de platonisme.

Les ouvrages de Jean Italos sont tous restés inédits. Les manuscrits nous ont conservé de lui : 1° Un recueil de réponses à 93 questions posées par divers personnages, entre autres par l’empereur Michel Ducas Parapinakès (la cinquantième) et par son trère Andronic Ducas (la quarante-troisième) ; 2° Un commentaire sur les livres II. III et IV des Topiques d’Aristote, qui n’est qu’un plagiat du travail analogue d’Alexandre d’Aphrodisias ; 3° Un commentaire sur le De interprelalione du même Aristote ; 4° Un petit traité de dialectique adressé à Andronic Ducas, frère aîné de l’empereur Michel : 5° Un résumé de rhétorique ; 6° Divers chapitres de logique, spécialement sur la matière et les trois formes du syllogisme, sur les questions relatives au genre, sur les cinq universaux, d’après Y Introduction de Porphyre. Voir sur tous ces ouvrages le Monacensis gr.’.".i, ꝟ. 279-447 ; le indobon. phil. 203, ꝟ. 1-232 ; le Scorial. X, I. II. ꝟ. 80273 ; le Scorial, Q, 4, 14, ꝟ. 61-91 ; le Murcian. 265, le Vatic. 316 et 11)7, les Parisini 1843, 2002, et 655 du Supplément grec.

K. Krumbacher, Geschichie der byianlinischen l.itteruiur, Munich, 1897, p. 445. Ajouter : Th. Ouspenskij, Histoire ihi premier empire bulgare (en russe), Odessa, 1879, l>. î-io de l’appendice ; du même : Actes do procès de Jean

Italos imiir couse (l’hérésie dans les Notices île l’Institut

archéologique russe île Constanlinopli (enrusse), [Odessa > 1897, t. ii, p. 1-66 ; F. Chalandon, Essaisur le règne d’Alexis /" Comnéne (1081-1118), Paris, 1900, p. 311-316 ; D. Brancev, Jean Italos et son système philosophico-théologique, dans la revue l m et raison (en russe), Charkov, 1904 ; N. Giacoumaki, Le mouvement intellectuel a Byzance ou xie siècle, dans la revue Nouvelle Sion (en grec), Jérusalem, t. viii, p. 159-181, t. ix, ». 371-384, t. x. ». 92-100, 173-188, : >2’.i". : 17, t. xi, p. 13-16, 318-329 ; Chr. Zervos, fn philosophe nioplatonit (en du XI 1 siècle, Michel Psellos, su de, sonoeuvre, ses luttes philosophiques, son influence, Paris, 1920, p. 22322(1. Le texte grec des dix chefs d’accusation contre Jean i

Italos se trouve dans toutes les éditions non catholiques du triodion, mais avec des incorrections. Le codex theol. 90 de Vienne, ꝟ. 152 v* en attribue la rédaction à Nicétas, archidiacre et chartopliylax ; d’après les actes du procès, il faudrait plutôt les attribuer à Michel Caspakès ; le cliartophylax n’aura lait que les enregistrer.

L. Petit.

76. JEAN IV LE JEUNEUR, patriarche de Constantinople (582-595). — Jean fut d’abord sculpteur dans sa jeunesse et montra de bonne heure de grandes dispositions pour la piété et la charité. Le patriarche Jean III (565-577), qui l’avait remarqué, le fit entrer dans son clergé et l’ordonna diacre. C’est en cette qualité que le nouveau clerc fut chargé de distribuer aux pauvres les aumônes que faisait l’église de Sainte-Sophie. Le patriarche Eutychius étant mort le 5 avril 582, Jean, que ses austérités avaient fait surnommer le Jeûneur, fut appelé à lui succéder, le Il avril. Théophane. Chronogr., P. G., t. cviii, col.."> 1 1 ; Cedrenus, llistor. compend., P. G., t. cxxi, col. 753. Le lendemain, il fut consacré dans l’église Sainte-Sophie. De son action comme patriarche on connaît surtout son entêtement à revendiquer le titre d’oecuménique ou d’universel, qu’il prétendait avoir seul le droit de porter. A la vérité, ce titre avait déjà été pris par plusieurs palriarches.au cours du vi° siècle. sans qu’aucune protestation semble s’être élevée. Sans doute en fut-il ainsi parce que ces hiérarques ne lui donnaient point un sens absolu. Par contre. Jean le Jeûneur se le vit refuser par deux papes successifs. L’occasion semble avoir été le concile tenu à Constantinople en 588 pour juger le patriarche d’Antioche, Grégoire. Les actes de cette assemblée sont malheureusement perdus. Nous savons toutefois que. Jean s’y intitula « patriarche œcuménique ►, ce qui lui attira immédiatement les protestât ions du pape Pelage, comme on le voit par les lettres de saint Grégoire le Grand. Mansi, Concil.. t. rx, col. 1214. Si deux papes ont agi de la sorte, si saint Grégoire le Grand n’a cessé de protester pour faire renoncer le patriarche à ce titre, c’est que Jean prétendait bien à une juridiction plus ou moins exclusive sur tout l’Orient. Malgré les remontrances pontificales, il n’en continua pas moins de s’appeler patriarche œcuménique jusqu’à sa mort, S. Grégoire, Epist., vii, L P./… t.i.xxvii, col. 857, et le litre est resté à ses successeurs, en dépit de tous les efforts tentés par Home. Voir Consi wiimii’i.i ; (Église de) t. ii, col. 1133-1135.

La querelle suscitée par les prétentions de Jean le Jeûneur au titre de patriarche œcuménique ne fui pas la seule difficulté qui le mit aux prises avec saint Grégoire le Grand. Vers 591, celui-ci avait demandé au prélat byzantin des explications au sujet d’un prêtre nommé Jean et de plusieurs moines d’isaurie. accusés d’hérésie, dont l’un. Anastase. qui était prêtre, avait été roué de coups dans l’église de Sainte-Sophie. Jean

le Jeûneur répondit qu’il ne savait pas de quoi il s’agissait. Saint Grégoire le Grand lui répliqua assez vcrlement : i J’ai élé fort surpris de la réponse que vous m’avez faite ; si vous dites vrai, qu’y a-t-il de

pire que de Voir les serviteurs de I)icu ainsi traités, sans que le pasteur qui est présent en sache rien’.' Mais

si vous le savez, que répondrai-Je à cela, tandis que l’Écriture dil : La bouche qui ment tue l’âme ? »

I ïsl ce la qu’aboutit votre abstinence ? Ne vaudrail-il lias mieux Noir entier de la chair dans votre bouche, que d’en voir sortir un discours faux, où l’on se joue du prochain’.' Êpist., iii, 53, l’.J… t. Lxxvii, col. 648. L’empereur.Maurice avait prêté a Jean le Jeûneur

une somme considérable pour ses bonnes œuvres et le patriarche lui avait fait une hypothèque sur tous

sis biens. Or, après sa mort, on ne trouva chez lui qu’une couchette de bois, une mauvaise couverture et un manteau usé. L’empereur, plein d’admiration