Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.1.djvu/398

Cette page n’a pas encore été corrigée

JEAN DE LA CROIX (SAINT). DOCTRINE

/ /t

a la catégorie des sentiments spirituels, dont Le saint traitera au moment opportun, lorsqu’il s’agira de la connaissance obscure d’amour, qui est la foi. et qui d’une certaine manière sert en cette vie à l’union divine, connue la lumière de gloire sert a la claire vision dans l’autre. A l’égard des visions intellectuelles de la première espèce, l’âme doit observer les règles données aux chapitres précédents concernant les perceptions surnaturelles sensibles, c. xxii. — Les révélations d’ordre purement spirituel, dont quelques-unes appai tiennent à l’esprit de prophétie, ont pour objet, ou la notification claire de quelque vélité, ou la manifestation de mystères. Les premières diffèrent absolument des perceptions dont traite le c. xxii. Elles consistent à comprendre des vérités concernant Dieu et les créatures, et cela au-dessus de ce qui est, a etc. et sera : connaissances très savoureuses, elles apportent au cœur une joie inexprimable ; elles sont réservées à l’âme parvenue à l’état d’union, car elles sont cette union même : Dieu y est senti et goûté, non aussi clairement que dans la gloire, mais pourtant par une touche vive et haute qui pénètre la substance de l’âme. Le démon ne peut s’entremettre ici. L’âme se trouve enrichie de vertus et comblée de jouissances. Elle ne peut que recevoir avec humilité, et ne doit pas renier ces perceptions, comme on l’a recommandé pour les précédentes, car elles sont des faveurs accordées à l’âme détachée de tout, et font partie de l’union. Les perceptions concernant les créatures sont inférieures, et presque sans utilité pour le progrès spirituel ; il faut se soumettre au jugement du directeur, et les repousser, s’il le juge convenable, c. xxrv. Les révélations ayant pour objet de découvrir des secrets et des mystères font connaître Dieu en soi, ou Dieu révélé dans ses œuvres, naturelles et surnaturelles. On doitse prémunir contre les contrefaçons diaboliques, et en général se garder prudemment afin d’avancer sans erreur dans la nuit de la foi. c. xxv. — Les paroles intérieures peuvent se ramener à trois espèces : les successives, c. xxvii, les formelles, c. xxviii et les substantielles, c. xxix. L’auteur fournit dans chaque chapitre une doctrine abondante, théorique et pratique, ramenant toujours son enseignement au but qu’il poursuit. En résumé on ne doit faire aucun cas des paroles successives et formelles, mais se gouverner en tout par la raison et par l’enseignement de l’Église. Dans les paroles substantielles, qui, peut-on dire, opèrent ce qu’elles signifient, il n’y a ni à désirer, ni à rejeter, mais à s’abandonner ; pas d’illusion à traindre, ni de l’âme ni du démon. — Les sentiments spirituels, c. xxx, sont d’ordre absolument passif ; ils opèrent dans la volonté et dans l’intelligence. L’activité de l’âme n’y intervient nullement. Ce sont des touches de l’union opérée passivement dans l’âme.

Le livre III a pour sujet la purification active de la mémoire et de la volonté par les veitus d’espérance et de charité. L’auteur avertit de nouveau qu’il ne s’adresse pas aux commençants, mais à ceux qui progressent vers l’union divine par la contemplation. Le c. i nous apprend à ne pas retenir les connaissances acquises naturellement par les sens extérieurs ; elles font toujours obstacle à l’union, n’étant pas proportionnées â l’être divin ; aussi arrive-t-il que l’union vide la mémoire, jusqu’à piovoquer la sensation du vertige. Et que l’on ne dise pas que c’est détruire la nature ; au début les distractions sont inévitables, mais elles cessent dans l’état d’union habituelle ; le fonctionnement des facultés s’en trouve au contraire perfectionné, les œuvres et prière, des âmes arrivées à cet état sont toujours efficaces ; comme ce fut le cas pour la vierge.Marie, élevée dès le principe a ce haut état d’union. Il appartient a Dieu seul de placer l’âme dans

cel état surnaturel où la mémoire se vide ; on demande simplement à l’âme de s’y disposer dans la mesure de ses capacités, selon les conseils donnés plus loin. Les c. u-iv exposent les dommages causés par les notions distinctes et mit ut elles, le c. v explique les avantages de l’oubli. La présente doctrine s’applique également aux perceptions naturelles de l’imagination. Du c. vi au c. xii, l’auteur s’occupe de la mémoire imaginative en tant qu’elle retient des notions reçues par voies surnaturelles : visions, révélations, paroles intérieures, sentiments. L’âme doit veiller à ne pas s’en embarrasser ; divers dommages pourraient s’en suivre : erreur, vanité, illusion diabolique, obstacle â l’union par l’espérance, le plus souvent notions impropres sur Dieu. Au c. xiii, on signale simplement les connaissances que l’intelligence conserve ; l’auteur les p’ace parmi celles de la mémoire, bien qu’elles n’appartiennent pas à la fantaisie. Mais il n’entre pas dans le détail, pour ne pas faire double emploi avec le c. xxrv du 1. II où ces connaissances ont été traitées comme perceptions de l’entendement. Saint Jean, à l’encontre d’une opinion qu’on a parfois émise, n’admettrait donc pas la mémoire comme faculté distincte de l’intelligence. En résumé, c. xiv, que l’homme spirituel se tienne dans le vide de tout le créé, faisant usage des maximes exposées t. I, c. xiii et s’élance affectueusement vers Dieu. Mais qu’il ne laisse pas de penser et de se rappeler ce qu’exige son devoir ; pourvu qu’il ne s’y attache pas avec esprit de propriété, aucun dommage n’en résultera. Bien entendu, cette doctrine n’a rien de commun avec ce le qui prétend supprimer totalement les images de Dieu et des saints.

Nous arrivons à la nuit obscure de la volonté, c. xvxliv. L’âme doit garder toutes ses forces pour Dieu, les gouvernant par la volonté, et exclure toutes les affections déréglées : joie, espérance, douleur et crainte doivent servir et non commander. En premier lieu vient la jouissance, en tant qu’active et volontaire, provenant de choses distinctes et clairement perçues. Six genres d’objets peuvent la provoquer : temporels, naturels, sensibles, moraux, surnaturels et spirituels. Chaque catégorie est traitée à part, les diverses classes d’objets, étudiées’séparément avec leur puissance respective et l’art de s’en servir sans dommage pour l’âme. Ici se place une description magnifique, en un style éloquent et vigoureux, des maux qu’entraîne la jouissance des biens naturels, surtout des charnels. Puis viennent des lumières sur la pratique du renoncement et ses avantages, sur l’humilité et l’amour du prochain : « Nul ne mérite d’être aimé si ce n’est à cause de sa vertu ; aimer ainsi c’est aimer selon Dieu et en toute liberté ; plus alors l’affection grandit plus aussi croît l’amour de Dieu. » C. xxii. Avec quelle discrétion le saint enseigne l’usage des biens sensibles ! Quelle sagesse, quelle science dans ces conseils, sur la manière de distinguer entre la saveur sensible utile et la nuisible, car il en existe dont certaines âmes ont besoin, pour aller à Dieu, c’est conforme à l’ordre établi par Dieu même, qui veut par là être mieux connu et aimé. Celui qui ne sentirait pas cette liberté d’esprit par rapport aux objets et goûts sensibles, mais y attacherait sa volonté, devrait absolument s’en priver, c. xxiii. Plus loin, l’auteur explique comment le sensible, dans l’âme purifiée, étant soumis à l’esprit, devient un docile instrument, au polnl que l’âme arrive à goûter le spirituel même par ses puissances sensitives, c. xxv. Les vertus naturelles (biens moraux), reçoivent une récompense d’ordre naturel, car Dieu aime tout ce qui est bon, même dans le barbare et le païen. Le chrétien peut donc s’en réjouir a ce litre, mais ne doit pas en rester la ; son devoir est de mettre sa joie dans la vertu par motif d’amour de Dieu et en vue de la