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JEAN DAMASCÈNE (SAINT). DOCTRINE


Telles sont les idées que mitre docteur développe. De fide orlli., t. IV, 15, col. 1165-1168, et en plusieurs endroits des discours sur les images ; voir spécialement De imag., iii, 33, col. 1352-1353.

En dehors des corps des saints, méritent aussi notre culte, niais culte relatif, qui remonte à Jésus-Christ ou à ses saints, toutes les autres reliques et choses saintes. qu’il s’agisse de la vraie croix et des autres instruments de la passion ou des objets et lieux consacrés par la présence ou le contact de Jésus-Christ, de la sainte Vierge et des saints. De fide orth., 1. IV. 11, eol. 11291132 ; J0cjhi(/ ; L, i, col 1264 ; ra, 34-35, col. 135

C’est surtout à légitimer le culte des images proprement dites contre les attaques des iconoclastes, que Jean a employé les ressources de sa science théologique. Sa doctrine sur ce point est développée dans les trois discours sur le.s images, et résumée dans De fide orth., t. IV, 16, col. 1168-1176. Voir aussi, à la fin du troisième discours, avant les témoignages de la tradition, un résumé sous forme scolastiquc, avec multiples divisions et subdivisions, eol. 1336-1356. Toute la démonstration vise à établir ces trois points : l’iconographie religieuse est fondée en raison ; le culte rendu aux images saintes es1 licite au point de vue théologique ; ce culte offre de multiples avantages.

Notre docteur concède aux iconoclastes qu’on ne saurait faire une image de Dieu tel qu’il est en lui-même dans sa nature invisible, incorporelle, incirconscrite, infinie. Cette représentation serait une représentation menteuse, et n’aurait aucun fondement dans la réalité. Ce principe est admis comme indiscutable non seulement par Jean Damascène mais par tous les théologiens byzantins qui ont pris la défense des images. Saint Jean a même des mots très durs pour ceux qui tenteraient de représenter la divinité en elle-même. Ce serait, dit-il, le comble de la démence et de l’impiété. De fide orth., loc. cit., col. 1169 c. Cf. De imag., i, 4, col. 1236 ; ii, 7, 11, col. 1289 b, 1293 b ; iii, 4, 9, col. 1321 d, 1332 d. On n’a jamais connu, en Occident, une telle sévérité. Jean semble, du reste, l’atténuer, quand il avoue que l’Écriture renferme des figures et des images de Dieu. De imag., in, 25, col. 1345 a. Mais si le Dieu invisible et incirconscrit ne peut être représenté, qui empêche de faire des images du Dieu fait homme, de la Vierge sa mère, des saints. Les anges eux-mêmes et l’âme humaine, non seulement parce qu’ils ont apparu sous des formes visibles, mais encore et surtout parce qu’ils sont circonscrits et finis dans le déploiement de leur énergie, sont susceptibles d’être décrits, dessinés. De imag., i, I. 16, 19, col. L236, 1245, 12 19 : iii, 6, 24, 2°>, COl. 1234, 1344-1345. L’iconographie religieuse a donc un fondement dans la réalité des choses.

Contrairement à ce qu’affirment les Iconoclastes, celle Iconographie n’est point Interdite par l’Écriture

sainte. L’Ancien Tcslamciil ne défend que les idoles,

et autorise de multiples représentations et images.

D’ailleurs nous ne sommes plus sous la Loi : nous sommes parvenus a l’âge mùr du Christ. Lu se rendant visible, Dieu nous a en quelque sorte invités à faire son image visible. N’esl-il pas le premier à avoir fait des images ? Il a engendré de toute éternité son Verbe, parfaite image de sa substance. Il a fait l’homme à son image et à sa ressemblance, n porte en

lui-même les idées, les images, de tontes choses. II a voulu que l’Ancien Testament lut la figure, l’image du Nouveau. S’il est permis de faire des images, il

est aussi permis de leur rendre un certain culte. Le

qui le prouve, c’est la traditl le l’Église catholique,

régie de foi pour le chrétien. Si les iconoclastes ont m, l’Église de Lieu s’est trompée Jusqu’ici. Cet

argument seul sut lit à condamner la nouvelle hérésie Et qu’on ne dise pas que Dieu seul doit être l’objet

de notre culte, et que c’est une espèce d’idolâtrie que d’y faire participer une vile matière. Le respect et la vénération dont nous entourons l’image ne s’adresse point à l’image en tant qu’elle est simple matière, mais en tant qu’elle est image, c’est-à-dire représente le prototype ; et ce respect même, cette Ttpooxâvqenç, ne s’arrête pas à l’image, mais par elle arrive jusqu’au prototype, suivant le principe proclamé par saint Basile : tj ttjç slxovoç tiuy ; ~, : à ; t6v uputzàTiTcov Siaflalvei. En d’autres ternies, ce culte est un culte relatif. Est-il permis de rendre un culte à Noire-Seigneur, à la sainte Vierge, aux saints 1 si oui, il est aussi permis de rendre un culte à leurs images : « Ou supprime les fêtes des saints, dit Jean à Léon ITsaurien, ou permets-nous de vénérer leurs images. » De imag., i. 21, col. 1253 a. Et notre théologien explique avec beaucoup de clarté que, si tout culte, en définitive, se réfère à Dieu, il y a plusieurs sortes de culte, parce que le divin se trouve dans les créatures à des degrés divers. Il y a un culte, un respect suprême, qui n’est dû qu’à Dieu, auteur et souverain Seigneur de toutes choses : c’est l’adoration proprement dite, y) Xaxpeta, r t jrpooxûvrçai !  ; xarà XocTpetav ; mais au-dessous de ce culte suprême, il y a les divers témoignages d’honneur, de respect et de vénération qui sont donnés à des créatures à cause de quelque excellence qui est en elles : c’est la simple TtpooxuvTjorç, la irpocrxovTiaiç Ti.|j., )f)-ixr), qui s’adresse soit aux personnes saintes, soit aux diverses reliques, soit aux choses consacrées au culte divin, soit aux types des choses futures, soit à ceux qui sont revêtus de quelque dignité, soit même à tout homme qui mérite respect en tant qu’il est l’image de Dieu, c’est dans cette sorte de culte que rentre naturellement le respect témoigné aux images religieuses. De imag., iii, 27-40, col. 1348-1356.

Licite, le culte des images présente pour les fidèles de multiples avantages. L’image est d’abord le livre des ignorants. De imag., i, 17, col. 1248 c. C’est un mémorial qui nous rappelle le souvenir de Dieu, de ses mystères, de ses bienfaits. Ibid., 18, col. 1249 a. C’est une exhortation muette à imiter les exemples des saints. Ibid., 21, col. 1252-1253. C’est enfin un canal des bienfaits divins ; car l’image est comme l’intermédiaire par lequel Dieu nous distribue ses dons. Elle participe, en quelque sorte, à la puissance bienfaisante du prototype ; et l’on peut dire que la grâce divine, l’opération divine réside en elle, comme elle réside dans les saintes reliques, X* ? 1 ? SîSoTai Osla Taïç 5Xaiç Sià tt)c, eLxovt, Çou.évwv 7rpoa7)yopîaç. Dr imag., i. col. 1264 b. Cf. ibid., 16 : ttjv 5Xy]v aépco, toc, Œiaç èvepyetaç xal x&pvmç qi.7rXe<ov. col. 1245 b. « De leur vivant, les saints étaient remplis du Saint-Esprit, et après leur mort, la grâce du Saint-Esprit ne s’éloigne pas de leurs âmes, ni de leurs corps dans leurs tombeaux, ni de leurs saintes images, non qu’elle y réside substantiellement, mais parce qu’elle y opère des bienfaits, i De imag., i, 19, col. 1249 rrf. Cf. ii, 11, col. 1300 b ; m. 31, col. 1353 b. Ilomil. II in Dormit., 17, t. xevi, col. 745 / ». Cette conception n’est pas particulière à Jean Damascène. Elle a été adoptée par la théologie byzantine. Ce serait l’outrer que de l’assimiler à la causalité sacramentelle, et l’on peut en donner une bonne interprétation, bien qu’à première ne elle paraisse s’opposer à renseignement du concile de Trente, qui nous défend d’honorer les images à cause de quelque diviniléou vertu qui serait en elle » non quoà credatur inesse aliqua in Us divinitas vel virtus, profiter quam siul colendee. Concil. Trident., sess. XXV, DenLingcr-Banuvvart, n. ! 186. Ce que les Byzantins, veulent dire, au fond, c’est que Dieu récompense souvent par des bienfaits miraculeux le culte rendu à lui-même ou aux saints par l’intermédiaire des images ou des reliques.