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[SAIE, PROPHÉTIE DE L’EMM.WI EL

eessairement, du moins a l’époque de l’auteur, la conservation matérielle de la virginité. Quoi qu’il eu soit d’ailleurs on peut dire que partout où il s’agit de’ « .’màh dans la Bible il est question d’une jeune tille nubile mais non mariée. Le prophète se représente donc une jeune tille non mariée, et donc iei une vierge, — car pourquoi la supposer violée, — concevant et enfantant Emmanuel. Dans quel but relève-t-il ce caractère de la mère du Messie ? Si eette jeune lille doit devenir mère à la façon des autres mères c’est une banalité sans Importance que de noter qu’elle était vierge jusqu’alors ; c’est le cas pour bien des jeunes tilles avant la conception île leur premier enfant. C’est donc qu’Isaïe ne se représente pas la conception du Messie s’opérant selon les lois ordinaires, mais d’une façon extraordinaire et mystérieuse.

Bien que ce mot’almâh ne rende pas rigoureusement et nécessairement le sens de vierge, bien qu’il ne soit pas dit textuellement que la’alincih restera vierge en concevant et en enfantant, par le fait même qu’Isaïe relève ce fait qu’une jeune fille non mariée deviendra mère du Messie, c’est qu’il voit dans cette maternité quelque chose de merveilleux, de surnaturel. Le mot betùlàti eût sans doute été plus clair, mais l’emploi de’almdh ne modifie pas le sens de la prophétie. Aquila, Symmaque, Théodotion l’ont traduit par veïv.ç qui ne compromet rien, mais les LXX, la Vulgate et le Syriaque ont certainement rendu la pensée d’Isaïe en se prononçant nettement pour l’enfantement virginal, -ac0£ ; o ;, l’irgo, belûlla Plusieurs passages des écrits rabbiniques et quelques allusions de Philon donnent à penser qu’une naissance miraculeuse du Messie était attendue par les juifs. Il est difficile de prouver qu’ils la concevaient comme une parthénogenèse. Mais toute la tradition chrétienne, à commencer par saint Matthieu, a vu dans le texte d’Isaïe une prophétie de la coneption surnaturelle du Messie. Longtemps les protestants ont été aux côtés des catholiques pour défendre cette exégèse. Driver, Isaiah, Londres 1893, p. -41, note, reconnaît encore que « de la prophétie prise dans son ensemble, on peut inférer qu’Isaïe voyait quelque chose de remarquable dans la naissance de l’enfant Emmanuel » et von Orelli Die Propheten Jesaia uni Jcremia, N’ôrdlingen, 1891, p. 38 : « Plustard on a vu dans la manière dont Isaïe vii, 14 annonce la naissance d’Emmanuel un miracle au sens deMatth., i, 22, sq. ; et de fait, ce n’est pas sans quelque juste motif txtrinsèque et intrinsèque. » Mais le langage de Calvin est particulièrement clair ; * Accordons aux juifs, dit-il, que’almâh signifie jeune fille et se rapporte surtout à l’âge, comme ils le veulent, bien que l’Écriture en use ordinairement en parlant d’une vierge, le texte réfute de lui-même leurs calomnies. Car qu’est-ce que le prophète eût dit de merveilleux s’il eût parlé d’une jeune fille devenue mère par le mariage ?… Posons le cas qu’il soit parlé d’une femme qui devait concevoir un fils à la manière ordinaire : tous voient que ce serait une chose froide et sans propos, que le prophète parlant aux juifs d’une chose nouvelle et merveilleuse, ajoutât qu’une jeune fille concevrait. Il est donc évident qu’il parle d’une vierge qui devait concevoir par la grâce du Saint-Esprit, et non point selon le commun ordre de nature. Et c’est ce mystère que saint Paul exalte si hautement quand il dit : « c’est quelque chose de grand que ce mystère d’amour qui s’est fait voir dans la chair, qui a été justifié par l’Esprit, manifesté aux anges, prêché aux nations, cru dans le monde, reçu dans la gloire. » Commentaires sur Isaïe, in hune locum. La conclusion du P. Condamin est même plus réservée et plus modérée que celle de Calvin : « Comme cela n’est pas certain (que’almdh ne peut se dire que d’une jeune lille non marier), il semble que le texte d’Isaïe, considéré en lu ; -mème, sans le témoignage de l’Évangile et de la tra dition, exprime seulement d’une façon plus probable l’idée d’une Vierge-Mère… La difficulté est toute dans la part d’obscurité qui reste au sens de’aima.’Op. cil., p. 09. L’on peut voir, en tout cas, que l’affirmation de certains critiq les modernes, d’après laquelle la toi de l’Église en la conception surnaturelle du Messie reposerait sur une erreur de traduction, est non seulement blasphématoire, mais inconsidérée et dénuée de toute valeur scientifique. La’almdh d’Isaïe, c’est historiquement Marie, Vierge et Mère de Jésus.

c. Rapport* de la prophétie messianique, avec le contexte. — Nous avons expliqué le verset 14 ; mais comment cette prophétie de la naissance miraculeuse du Messie s’accorde-t-elle avec le contexte ? C’est là le point le plus difficile à expliquer. Certains auteurs catholiques sont même portés à croire que nous n’avon> « plus l’oracle in extenso, avec toutes les circonstances de texte et de contexte, tel qu’il fut délivré aux auditeurs immédiats. > Calés, Recherches de science religieuse, t. ri 1910, p. 167. Recherchons d’abord la nature du contexte actuel et établissons que le verset 14 se trouve en clavé dans un discours de menaces à l’adresse d’Achaz.

Le discours d’Isaïe à Achaz a déjà fait entendre une note menaçante au f 9, mais d’une manière conditionnelle : « Si vous ne croyez pas, vous ne subsisterez pas i Il tourne définitivement à la menace au f 13, après le refus d’Achaz de demander un gage de salut : < Écoutez, maison de David : Est-ce trop peu pour vous de lasser la patience des hommes, que vous lassiez aussi celle de mon Dieu ! C’est pourquoi Dieu lui-même vous donnera un signe. » L’incrédulité du roi a provoqué l’indignation du prophète et modifié les dispositions bienveillantes de Jahvé. On ne s’attend plus désormais à voir accorder une faveur à Achaz. De fait, il est manifeste qu’à partir du verset 17, le prophète lui prédit de grandes calamités comme châtiment de son infidélité. Les Assyriens qu’il appelle à son secours viendront, ainsi que les Égyptiens, et ravageront son pays. Les vignobles seront détruits, les champs transformés en lieu de pacage pour le bétail ; les rares habitants devront se nourrir des produits spontanés du sol, 17-25. Le beurre et le miel seront l’aliment de tous ceux qui seront restés dans le pays, 22. Emmanuel lui-même devra s’en nourrir, 15, parce que la terre ne sera plus cultivée, parce que le pays sera abandonné par suite de l’invasion assyrienne. Emmanuel est ainsi associé aux privations et aux maux que Juda aura à supporter à cause de la défiance d’Achaz. On reconnaît assez généralement aujourd’hui que la locution du f 15 : manger du beurre et du miel, doit être considérée à cause du t 22 où elle revient, non comme un indice de temps d’abondance, mais d’une époque de dévastation où, faute de récoltes, les habitants n’ont plus pour se nourrir que le miel et les produits du lait. Pourtant cette explication n’est pas acceptée par tous les exégètes. Si on l’admet, on fera commencer au t 15 le tableau de la désolation qui se déroule de 17 à 25.

Dans ce contexte de menaces, le verset 16 fait difficulté, car il contient à première vue une promesse in directe de délivrance en faveur d’Achaz : « Car avant que l’enfant sache rejeter le mal et choisir le bien, le pays dont les deux rois t’épouvantent sera dévasté, i Ces deux rois sont évidemment Rasin de Damas el Phacée d’Israël et leur pays doit être les deux royaumes de Syrie et de Samarie. Isaïe annoncerait donc la dévastation de ces régions avant l’époque où le Messii saura rejeter le mal et choisir le bien, c’est-à-dire près l’interprétation généralement reçue, ser i ai l’âge de raison, Deut., [, .il) ; on bien, d’après d’lires. sera arrivé à l’âge mûr où il pourra jug Q< ment pour lui-même. mai. encore pour l< ut r bien et le mal.