Page:Alfred Vacant - Dictionnaire de théologie catholique, 1908, Tome 8.1.djvu/336

Cette page n’a pas encore été corrigée

653

    1. JEAN-BAPTISTE (BAPTEME DE SAINT)##


JEAN-BAPTISTE (BAPTEME DE SAINT), NATUBE DU RITE 654

Chacun des procédés répond parfaitement au caractère de celui qui l’emploie : Jeai est un homme, il baptise dans l’eau ; Jésus est un Homme-Dieu, il baptisera dans l’eau et l’Esprit Saint. Le feu ici ne paraît être qu’une glose du mot précédent : semblable au brasier ardent qui purifie les métaux en les débarrassant de toute impureté. l’Esprit Saint dévorera les péchés et changera les cœurs. Mais cet agent divin est au service exclusif du Messie ; Jean l’avait prédit : Jésus confirme la parole de son Précurseur : Nisi quis renalus fverit ex aqua et Spiritu sancto non potest in-Iroire in regnum Dei, Joa., iii, 5 ; Pierre dr.ns son premier discours déclare commencés l’effusion et le règne de l’Esprit-Saint. Act., ii, 17 sq. Jean par contre n’a d’autre instrument, à sa disposition, que l’eau. Or la vertu de l’eau n’est pas grande : versée sur le corps, elle le mouille, le lave, enlève ses souillures extérieures ; qu’on ne lui demande pas de pénétrer dans l’intérieur de l’âme ; par elle-même elle en est incapable. Aussi l’infériorité des disciples du Baptiste est notoire ; elle éclate dans la parole des Éphésiens : neque si Spiritus sanctus est audivimus. Act., xix, 2. Non seulement la connaissance de l’Esprit Saint leur faisait défaut, mais ils étaient privés de sa personne et de ses bienfaits. Entre les deux baptêmes ce n’est donc pas une différence de degré d’efficacité qu’il faut admettre, c’est une différence d’espèce. Quand l’Église naît au lendemain de la Pentecôte, le baptême de Jean paraît avoir été considéré par les missionnaires de l’évangile comme inexistant. Un grand nombre parmi’es premiers chrétiens avaient été baptisés par le Précurseur vers lequel affluaient omnis Judww regio et Jerosolumitx unioersi, Marc, i, 5 ; et cependant Pierre n’hésite pas à dire : Baplizetur unusquisque, veslrum in nomine Jesu Christi, in remissionem peccatorum vestrorum et accipietis donum Spiritus Sancti. Act., ii, 38. Auss> bien l’ordre de Jésus avait été universel : Baplizantes eos in nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti. Matth., xxviii, 19. Paul était logique en baptisant au nom de Jésus les anciens néophytes de Jean ; par son geste en effet ce n’était plus in spe mais in re que la grâce leur était conférée.

2. Les témoignages de la tradition et la définition du concile de Trente — Les erreurs protestantes du xvie siècle et les controverses nombreuses qui éclatèrent à leur sujet mirent à jour plusieurs textes patristiques qui éclairèrent les théologiens et préparèrent la décision doctrinale devenue nécessaire.

Luther, au début de sa prédication, avait nettement distingué le baptême de Jean du baptême chrétien, Disputatio de baplismo legis, Joannis et Christi, 1520. A son avis, le second jouit sur le premier d’un triple avantage : il est un sacrement, il remet les péchés, il ne saurait être réitéré. Deux ans plus tard, Mélanchton enseignait encore la même doctrine, Loci communes, 1522, tit. de Baptismo, empruntant au Maître la fameuse comparaison, baptismum Joannis signum fuisse morlificationis, Christi vero baptismum signum juslificationis. Mais ce point de doctrine ainsi établi cadrait mal avec l’ensemble de la foi protestante, il fut vite abandonné.Dans le camp de la Réforme on s’accorda bientôt pour identifier les deux baptêmes au point de vue des effets produits. Cf. Zwingle, De vera et jalsa religione, c. de baplismo ; Calvin, Institution chrétienne, I. IV, c. xv, §7 et 8.

Quand les Pères du concile de Trente se proposèrent d’établir et de préciser dans tous ses détails la doctrine sacramentaire, une première liste de propositions erronées concernant les sacrements en général, le baptême et la confirmation leur fut >oumise. Deux des propositions circa sacramentum baptismi se rapportaient au baptême de Jean ; elles avaient été

empruntées, la première à Mélanchton, la seconde à Luther. En voici la teneur :

D. Eamdem esse oim baptismi Christi et Joannis. Phtlippus Mélanchton in locis communibus : Xcmpe baptismi Joannis et Aposlolornm, Joannes de passuro Christo, apostoli de passo, et ressuscitait) prmdicant, tamen ministerium fuit idem, et effectum eamdem liabuit in credentibus : et quodaliqut dicunt, tantum pmnitentiam signifleatam esse, non remissionem, est absurdum, nom prædicatio pœnitentiæ sine remissione est ethnica.

10. Baptismum Christi non évacuasse baptismum Joannis, sed ei addidisse promissionem. Lutherus lib. disputalionum anno 1520. Videtur ChristUS baptismum Joannis non évaluasse, sed addito nerbo viue, seu promissions perfeeisse. Theiner, Acta concilii Tridentini, t. i, p. 384.

Le travail des théologiens commencé le 20 janvier 1547 se poursuivit jusqu’au 29. On ne consacra pas moins de neuf séances consécutives à l’examen détaillé des propositions contestées. A chacune des séances la condamnation des propositions 9 et 10 quoud baptismum rencontra des adversaires résolus. Les arguments de l’opposition qui reviennent le plus souvent sont les suivants : Le Maître des Sentences a enseigné que certains baptisés de Jean ne furent nullement obligés de recevoir le baptême de Jésus (séance du 20 janvier ) ; il est écrit que Jean baptisait in remissionem peccatorum (22 janvier) ; le baptême de Jean était a Deo, Jésus lui-même a voulu le recevoir ; si saint Paul a rebaptisé les Éphésiens, c’est uniquement pour leur communiquer l’Esprit-Saint (26 janvier) ; enfin l’ablution d’eau a été conservée dans le baptême chrétien, qu’on ne dise donc pas que du baptême de Jean rien n’a subsisté (28 janvier).

La discussion close, on classa les propositions 9 et 10 dans la catégorie des articles « quos theologi non damt.andos sed silentio pradereundos censuerunt. » Theiner, op. cit., p. 404. Toutefois, comme un certain nombre de théologiens avaient opiné nettement pour la condamnation, les arguments invoqués par eux étaient consignés. Nous ne revenons pas sur les textes scripturaires, ils ont été cités et commentés plus haut ; parmi eux il n’en est aucun qui ne se concilie parfaitement avec la thèse de la supériorité du baptême chrétien. Quant à l’opinion de Pierre Lombard, elle ne pouvait donner lieu à une objection sérieuse. Le Maître des Sentences avaic eu le tort en effet de partager les néophytes du Précurseur en deux catégories : ceux qui mettaient toute leur confiance dans l’ablution du Baptiste, n’ayant aucune idée du Saint-Esprit, et ceux qui, au contraire, connaissant l’Esprit Saint, n’attribuaient au geste rituel de Jean qu’une valeur symbolique. A son avis, les seconds, pour être justifiés, n’avaient plus besoin du baptême de Jésus. Opinion étrange et du reste isolée dont saint Thomas n’avait pas hésité à dire : hoc est penilus irrationabile. Sum. theol., [II », q. xxxviii, a. (>.

Il n’y avait donc pas dans les objections faites aux partisans de la condamnation de quoi les embarrasser.. D’autre part, ils s’appuyaient eux-mêmes sur des textes positifs impressionnants, parmi lesquels, pour ne citer que les principaux : saint Jérôme : dum servi baplismo plus quam habu.it tributs, dominicain deslruis. Dialogus contra Luci/crianos, 1’. L., t. xxiii, col. 103 ; saint Augustin : non enimr&nascebantur qui baptismale Joannis baptizabantur a </"" et ipso baptizatus est. Enchiridion de fide, spe et cantate, I’. L., t. xl, col. 255. C’est une formule équivalente qui a été insérée au décret de Graticn : Sou regencrabantur qui baplismo Joannis baptizabantur. lie consecratione, disl. IV, c. 135 ; et dans le même décret on explique pourquoi le baptême de Jean était réitéré, alors que celui de Judas ne l’était pas : Quos enim buptizavil Joannes, buptizavil Jouîmes ; quos autrui Judas baptiza-