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JEAN XII

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cession au siège épiscopal de Salzbourg, l’érection de l’archevêché de Magdebourg et de l’évêché de Mersebourg, deux créations de la politique oltonienne, Jané. n. 3683, 3690.

En même temps se préparait un concordat entre le pape et l’empereur, qui précisait surtout au point de ui’politique, les attributions des deux souverains. Ce traité n’est autre que le Privilegium Ultonis actuellement conservé aux archives du Vatican. L’authenticité de cette pièce a été mise en doute ; mais Sickel, Das Privilegium Oilon 1, a démontré, seirU>le-t-il, que la pièce actuelle est une copie contemporaine du célèbre document. Cette copie reproduirait exactement le texte de 962. Mgr Duchesne, suivi par Hauck, a fait cependant remarquer que le texte primitif a dû subir quelques retouches, un an plus tard, nous dirons tout à l’heure comment et pourquoi. Le privilège peut se diviser en deux parties : la première est relative aux concessions territoriales que l’empereur est censé garantir au pape. A s’en tenir à la lettre, Otton reconnaîtrait au souverain pontife un domaine extrêmement considérable, celui-là même dont les frontières sont indiquées dans la 1 notice d’Adrien I™ du Liber Pontificalis, à propos de la donation de Pépin le Bref. Non seulement le duché de Home, mais la Toscane, Panne, Mantoue, la Vénétie, lTstrie, les duchés de Spolète et de Bénévent, feraient partie du domaine de l’Église : les territoires byzantins de Naples et de Gaète, pouvaient éventuellement s’y adjoindre. Document tout en apparence, fait très justement remarquer Mgr Duchesne, car il n’était pas à coup sûr dans l’intention de l’empereur de faire du pape le souverain absolu des trois quarts de l’Italie. La seconde partie précisait deux points importants concernant l’exercice de la juridiction pontificale. C’est peut-être ici qu’une retouche a été apportée, l’année suivante, aux stipulations primitives. En tout cas le texte actuel règle, conformément à la constitution de 824 qui est expressément visée, que les Romains ne laisseront ordonner aucun pape, avant que celui-ci n’ait prêté devant les missi impériaux et l’ensemble du peuple, un serment de fidélité (sans doute à l’empereur) pro omnium salis faclione al que fulura conservutione. Cette clause est, il est vrai, complétée par cette autre que les missi impériaux n’auront aucun droit à s’ingérer dans l’élection elle-même ; mais nous dirons plus loin ce qu’il faut penser de cet engagement. Le second point visé par le Privilegium est le rétablissement à Home de missi, c’est-à-dire de délégués, les uns apostoliques, les autres impériaux, qui contrôleront l’administration de la justice et feront à l’empereur un rapport annuel. On revenait en somme à la formule carolingienne : le pape est souverain de Home, mais le haut domaine y appartient à l’empereur. Les droits de souveraineté du pape sont ainsi réduits, dans une proportion qui dépendra de l’attention apportée par le César germanique aux affaires romaines.

Le traité en question fut signé le 13 février ; le lendemain Otton reprenait la route de la liante Italie où Bérenger n’avait pas dit son dernier mot. Au moment du départ d’Otton. il n’y avait nulle trace de brouille entre le pape et l’empereur. Mais à peine ce dernier cul-il le dos tourné, que Jean se repentit de s’être laisse donner un maître ; il nouait bientôt des intrigues avec Bérenger et Adalbert, on ajouta plus tard qu’il avait tenté de négocier avec le basileus, et même de SOU lever contre l’Allemagne les terribles Hongrois. Trop OCCUpé par sa campagne dans le liante Italie, pour

régler aussitôt l’affaire de Jean XII, Otton se contenta d’envoyer à Rome des commissaires enquêteurs ; l’un d’eux étail siins doute Liutprand, Celui-ci, qui voyait rouge dis qu’il étail question de Bérenger, revint bientôt de Rome avec un formidable dossier ou s’amas

saient toutes les accusations du parti romain favorable à l’empereur et ennemi de Jean XII. On représentait le pape comme hostile à Otton, parce qu’il voyait en lui le réformateur de l’Église ; et là-dessus on déballait sur le compte du malheureux pontife toutes sortes d’ignominies, vraies ou supposées. Jean XII eut vent de l’affaire ; il s’ensuivit entre Rome et le quartier général d’Otton. installé devant Montefeltre où Bérenger tenait toujours, un chassé-croisé de missions, qui dura de la fin de’.162 à juillet 963. A ce moment l’empereur apprit qu’Adalbert, d’abord réfugié en Corse, avait débarqué à Civitta-Vecchia, que le pape l’avait reçu à Rome avec de grands honneurs. Le récit des scandales attribués à Jean XII avait laissé froid le réformateur de l’Église ; la faute politique commise par le pape, allait être immédiatement châtiée. Puisque le pontife entreprenait de contrecarrer ses plans, Otton le briserait, en se faisant une arme des accusations portées contre la vie privée de ce malheureux. Le 3 novembre 363, il élait sous les murs de la ville ; un fort parti de Romains se déclarait pour l’empereur, et lui ouvrait les portes. Impuissant à contenir cette réaction, Jean XII. s’enfuyait avec Adalbert.

Sitôt installé à Rome, Otton rassembla à Saint-Pierre, le 6 novembre, un synode qu’il présida lui-même t’t dont Liutprand nous a laissé un compterendu détaillé. On y voyait figurer en première ligne la suite de l’empereur, c’est-à-dire les nombreux évéques allemands et les barons amenés par lui, ensuite, l’épiscopat des environs de Rome, que Liutprand, au grand scandale de Baronius, désigne sous le nom de pontifia s romani, une quinzaine de prêtres-cardinaux, « les fonctionnaires laïques en grand nombre. Otton ouvrit la séance en demandant, pour la forme sans doute, quelles raisons empêchaient le pape de se joindre à une si noble assemblée, t’.'est là-dessus que se débitèrent toutes les accusations, vraies ou fausses, contre la vie privée du pontife : sacrilèges, simonie, luxure, violences homicides, ivresse, jeu, rien n’y manquait. L’empereur fil mine de ne pas croire à tant de bassesse ; et décida que l’on sommerait le pape de se présenter en personne pour discuter les charges qui pesaient sur lui. Jean mis au courant, répondit par une lettre hautaine et menaçante ; si on prétendait lui donner un compétiteur, il excommunierait tous les évêques et les suspendrait de leurs pouvoirs, foudres inutiles ! l’ne seconde séance du synode impérial décida d’envoyer au pape une sommation péremptoire. Elle lui rédigée au nom d’Otton lui-même. Elle contestait le pouvoir même du pontife : s’il se rendait au concile et se purgeait des accusations portées contre lui, l’on obéirait à ses ordres : sinon, l’on méprisait son excommunication OU plutôt on la retournait contre lui : > uni potitlB in vus retorquebimus, quoniam quidem juste fai erepossumus. Cette sommation fut expédiée à Tivoli, où Jean s’était réfugie ; elle ne le loucha pas personnellement. Alors on se décida à procéder contre lui par contumace. A la séance du 1 décembre, l’empereur ht au pape un grief tout politique, en lui reprochant le manquement à son serment de fidélité ; les clercs romains insistèrent sur les scandales de sa vie : à de tels maux, dirent-ils, il fallait opposer des remèdes exceptionnels : on demandai ! donc à l’empereur de chasser de la chaire pontificale ce monstre, que rien

n’avait pu corriger, et de lui substituer un autre pontife. En vertu de quel droit l’empereur exercait-il un tel pouvoir, on ne se le demandait pas. Si la narration de Liutprand est exacte, elle nous l’ait assistera une abdication complète des ecclésiastiques entre les mains du César germanique. Ce qu’il y a de plus Invraisemblable, el Baronius le fait observer avec beaucoup de force, c’est que les évêques ne remarquaient même pas

l’entorse donnée par toute cette procédure à l’axiome