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JEAN SAINT), DOCTRINE DES ÊPlTRES JOHANNIQl ES

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doctrine txinitaire et christologique aussi complète et aussi précise que dans le quatrième évangile, les enseignements qu’elles contiennent portent plutôt sur le salut, ses conditions et sur la vie chrétienne.

I" Doctrine trinilairc et christologique. — 1. L’idée de Dieu. — C’est l’aspect inoral de Dieu qui est mis surtout en évidence, Il est exprimé en deux formules : Dieu est lumière. I Joa.. i, 5, Dieu est amour. I Joa.. iv, 8, 16. Comme dans le quatrième évangile, la lumière et les ténèbres qui en sont l’antithèse sont des idées complexes. La lumière est la vérité, et Dieu est lumière, parce qu’il possède la vérité en lui-même et parce qu’il illumine les hommes en la leur révélant : mais la lumière, c’est aussi le bien, comme les ténèbres.- « ont le mal moral, et, en ce sens, Dieu est lumière, parce qu’il est pur et saint. I Joa., m. 3. Il faut noter que c’est Dieu qui est ici qualifié lumière, tandis que dans l’évangile c’était le Verbe (préexistant ou incarné), qui était dit lumière du monde. C’est d’ailleurs un trait général de la première épître johannique que Dieu et le Christ y sont moins sépares que dans l’évangile, et leurs opérations respectives moins nettement distinguées. Bien que la révélation de Dieu comme lumière soit le message que la communauté chrétienne a reçu de Jésus-Christ, I Joa., i, 5, et qu’on soit son disciple dans la mesure où on accepte cette lumière, saint Jean insiste plus encore, semble-t-il, sur ce que Dieu est amour, et qu’on ne connaît vraiment Dieu, que lorsqu’on aime ses semblables, à l’exemple de Dieu. I Joa., iv, 7-8. Peut-être cette insistance visait-elle certains faux gnostiques qui mettaient la perfection dans la croyance, la connaissance plutôt que dans la charité. L’amour paternel de Dieu pour les hommes s’est manifesté surtout dans la mission qu’il a donnée à son fils, envoyé dans le monde, et envoyé en victime d’expiation, afin que, par l’effet de sa propitiation et par la communication de son Esprit, les croyants aient la vie éternelle. I Joa., iv, 9-10.

2. Le Fils de Dieu.

La 7 a Jocmnis s’ouvre par un prologue, qui présente d’évidentes analogies avec celui du quatrième évangile. Il s’agit de part et d’autre de la manifestation du Verbe éternel dans la personne de Jésus-Christ. Mais la personnification du Verbe est moins nette, les mots rcepl toû X6yo : j -rj ; Çoarjç pouvant être traduits simplement : la parole de vie et s’entendre du message évangélique.et i ce qui était dès le commencement » désignant une réalité qui n’indique pas aussi clairement une personne que le Logos du quatrième évangile. Le contexte néanmoins ne permet pas de se tromper sur la pensée de l’auteur, car la vie éternelle, qui était auprès du Père et s’est manifestée à nous, » i, 2, en Jésus-Christ ne peut être que cette parole de vie dont il vient d’être question. D’ailleurs il y a d’autres passages de l’épître qui marquent assez nettement la distinction personnelle du Père et du Fils, pour qu’on ne puisse supposer chez son auteur une conception différente de celle qui est exprimée, avec plus de précision, il faut le reconnaître, dans le prologue du quatrième évangile.

Ié>us-Christ est le Fils de Dieu, son Fils unique, I Joa. iv, 9, par qui s’établit la communion entre le Père et les hommes, i, 3. Il y a entre lui et Dieu une communauté de nature telle, qu’être dans le Fils, c’est être en Dieu, v, 20, être uni au Père, c’est êtreuni au Fils, ii, 24, nier le Fils, c’est nier le Père, confesser le Fils, c’est confesser le Père, ii, 22. La divinité du Christ est si pleinement admise que, en plusieurs passages, on ne sait pas très bien si c’est de Dieu qu’il est question, ou du Christ, l’auteur passant sans transition tic l’un ; i l’autre (cf. surtout le c. iii), et que des critiques se sont demandés si la doctrine de la / » Joannis ne serait pas entachée de ce qu’on a appelé

plus tard raonarchianisme ou sabellianisme. Sur ce

point il faut reconnaître que l’épître ne traite pas la question avec précision et rigueur, mais cela doit être dû au caractère de cette lettre qui était avant tout une exhortation pratique, et on n’a pas le droit d’en conclure que l’auteur sacrifiait la distinction des personnes entre le Père et le Fils. Il avait d’autant moins besoin d’insister sur ce point que ce n’était pas sur les relations du Père et du Fils, mais sur la réalité de l’Incarnation que portaient, semble-t-il, les erreurs doctrinales qu’il combattait.

Les docteurs de mensonge contre lesquels saint Jean met en garde ses lecteurs « nient que Jésus soit le Christ, » I Joa., ii, 22, « ne confessent pas Jésus-Christ venu en chair. » II Joa., 7. A ces erreurs s’oppose la confession des vrais croyants : est de Dieu quiconque croit que Jésus est le Christ, I Joa., v, 1, et confesse que Jésus-Christ est venu en chair, iv, 2. Les erreurs ainsi définies et contre lesquelles sont dirigées ces professions de foi, se rattachent sans doute au docétisme, qui ne voyait dans l’humanité de Jésus qu’une apparence, ou à cette forme de gnosticisme qui dénaturait l’Incarnation en l’expliquant par une union transitoire de l’éon Christ avec l’homme Jésus.

. 3. L’Esprit Saint. — C’est l’action de l’Esprit beaucoup plus que sa personnalité qui apparaît dans les épîtres johanniques. D’une part il est un témoin de l’Incarnation, et il rend ce témoignage parce qu’ « il est vérité ». I Joa., v, 7. Mais surtout il est un don de Dieu auquel nous participons, et qui nous est une garantie de la présence de Dieu en nous. Comme on l’a remarqué, on retrouve ici la conception de saint Paul, qui voit dans les manifestations de l’Esprit Saint la preuve de la vie de Dieu en nous, avec cette différence qu’il représente de préférence l’Esprit comme les prémices ou les arrhes du bonheur futur, tandis que saint Jean signala surtout en lui la garantie de la possession présente. Lebreton, op. cit., p. 494. Du point de vue pratique qui est le sien dans les épîtres, saint Jean ne distingue pas nettement entre l’Esprit Saint et ses dons. C’est ainsi que dans les passages où il est question de « l’onction » que les fidèles reçoivent du Christ, I Joa., ii, 20, 27, cette onction qui, dans le langage du christianisme primitif, figure le don de l’Esprit (cf. Act., x, 38), et qui désigne la grâce divine est ici personnifiée en quelque manière ; elle demeure dans les fidèles, elle les instruit en toutes choses, et parce qu’elle est vérité et non mensonge, elle les fait demeurer dans le Christ. (Cf. dans le quatrième évangile, ce qui est dit du rôle de l’Esprit Saint, col. 570 sq.)

Solériologie.

1. Jésus-Christ Sauveur. — Dieu

a envoyé son Fils dans le monde, pour sauver le monde, en y apportant la vie, I Joa., iv, 7 et 14 ; c’est là le résumé de la sotériologie des épîtres johanniques comme du quatrième évangile. Le monde désigne ici l’humanité en général. Mais dans les épîtres plus encore que dans l’évangile, le mot est pris ordinairement dans un sens péjoratif pour désigner l’ensemble des Sommes pervers opposés à Dieu et au Christ. D’après la 7 a Joannis, le monde est plongé dans le mal, v, 19 ; ce qui le caractérise, c’est la convoitise de la chair, la convoitise des yeux et l’orgueil de la vie. u. lt>. Son œuvre propre est le péché, l’iniquité, non pas le péché, que peuvent commettre d’une façon passagère même les enfants de Dieu, i, 8, 10, niais l’étal d’opposition habituelle aux lois de Dieu : par là on relève du diable qui est pécheur depuis le commencement, ni, 8, on est enfant du diable, iii, 10. Mais le Fils de Dieu s’est manifesté précisément pour détruire les œuvres du diable, iii, 8, et pour ôter les péchés, iii, 5. Par la foi en lui, on triomphe du monde, v, 4-5, on est vainqueur du Mauvais, a, 13, l l. Par lui, et par