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JANSÉNISME, LA RÉSISTANCE DES QUATRE ÉVÈQUES


la grâce, t. iv, p. 245 sq., circulèrent à cette époque parmi les jansénistes.

Malgré les conseils de plusieurs docteurs, les religieuses de Port-Royal refusèrent de signer le premier mandement des vicaires généraux de Paris ; on leur conseilla également de signer le second mandement et on composa pour elles un modèle d’acceptation, mais Pascal désapprouva cette conduite ; sa sœur Jacqueline mourut de douleur « première victime de la signature du formulaire » ; Nicole réfuta Pascal dans Examen d’un écrit sur la signature et Arnauld composa la Défense de la bulle cT Alexandre VII ou De la véritable intelligence de ces mots qui s’y trouvent : Sens de Jansénius, contre ceux qui ont cru qu’ils se peuvent entendre de la doctrine de la grâce efficace. Œuvres, t. xxii, p. 729-758. Domat, avocat du roi au présidial de Clermont et intime de Pascal, prit la défense de son ami, mais Arnauld répliqua. Ibid., p. 759-819 ; Nicole a raconté plus tard (17 juin 1666) cette polémique dans sa Lettre d’un théologien à un de ses amis, p. 79-82.

Arnauld, en particulier, semble avoir pris à tâche de défendie les religieuses de Port-Royal contre les ennemis du dehors et aussi du dedans. Il leur donne des Avis généraux sur la manière de répondre aux questions qui leur seront posées sur la grâce : on ne les a pas instruites sur cette matière et eues n’ont pas à prendre parti. Œuvres, t. xxiii, p. 95-104 ; il compose un Écrit pour justifier les religieuses de ce qu’elles ne prennent point de part à la question sur le fait de Jansénius. Ibid., p. 105-121 ; il leur met entre les mains un Mémoire, Ibid., p. 122-131 ; il calme leurs inquiétudes de conscience, quand elles refusent d’obéir à l’archevêque de Paris, ibid., p. 132-133 ; il fait des reproches à celles qui signèrent le formulaire sans distinction, ibid., p. 139-143 ; il justifie leur conduite en face des violences exercées par M. de Péréflxe, ibid., p. 147-149 ; il leur suggère des Réflexions sur une déclaration que leur a faite l’archevêque de Paris pour expliquer la signature au formulaire qu’il leur demande, ibid., p. 150-163 ; enfin, pour les mettre en garde contre les démarches de l’archevêque de Paris et contre l’intervention de Bossuet, il achève en avril 1665 son Apologie pour les religieuses de Port-Royal du S. Sacrement contre les injustices et les violences du procédé dont on a usé envers ce monastère. Ibid., p. 167-834. Dans cet écrit auquel collabora probablement Nicole, les deux chefs du jansénisme s’appliquent à montrer qu’on n’est pas obligé de se soumettre à la foi humaine et ecclésiastique du fait de Jansénius : ils s’efforcent de justifier la conduite des religieuses à l’égard des mandements des vicaires généraux et des ordres de l’archevêque de Paris ; ils veulent réfuter spécialement les thèses du P. Annat et les 21 exemples qu’il a allégués.

Dans d’autres ouvrages, restés longtemps inédits, Arnauld poursuit le même but jusqu’à la paix de Clément IX en 1669, Œuvres, t. xxiv, p. 1-126 et il donne aux religieuses une direction précise en particulier dans V Éclaircissement de quelques difficultés touchant la signature du formulaire sans distinction. Œuvres, t. xxiv, p. 54-88.

De son côté, Nicole, pour soutenir le courage des jansénistes, achevait de publier ses Lettres sur l’hérésie imaginaire : dans la Ve, (3 février 1665), il montre qu’une excommunication injuste est nulle et unit plus intimement à Dieu ; la VIe (25 juin), attaque le second mandement de M. de Péréfixe ; dans la VI1"(12 juillet), il s’élève contre l’infaillibilité du pape en matière de fait ; dans la VIIIe (12 septembre), il prétend respecter la charité en critiquant la conduite de l’archevêque de Paris ; dans la I.V Cl’t septembre), il déclare qu’en signant le formulaire, on fait un serment téméraire, injurieux à Dieu et contraire à la charité due

au prochain ; enfin dans la X° (20 novembre), il soutient que l’Église ne demande point la croyance au fait de Jansénius qui n’est exigée que par les jésuites.

Aussitôt après (31 décembre 1665), il commençait la publication de ses Visionnaires contre Desmarets de Saint-Sorlin et les sept autres Visionnaires parurent en 1666 pour la défense des religieuses de Port-Royal.

C’est à l’occasion du formulaire imposé par le pape" Alexandre VII, dans sa bulle du 15 février 1665, que les contestations sur le fait de Jansénius prirent le plus d’acuité. Dès le 13 mai 1665, Péréfixe publiait un nouveau mandement pour la signature du formulaire du pape ; il y demande une soumission de foi divine pour les dogmes, et, quant au fait non révélé une véritable soumission par laquelle on acquiesce sincèrement et de bonne foi à la condamnation de la doctrine de Jansénius contenue dans les cinq propositions. »

La résistance des quatre évêques.

Les autres

archevêques et évêques du royaume, à l’exception de quatre, firent un mandement très clair où il n’était point question d’une distinction quelconque entre le fait et le droit.

M. Pavillon, évêque d’AIet, dans son mandement du 1 er juin, s’explique nettement à ce sujet : « La soumission qu’on rend aux décrets de l’Église se renferme dans les vérités révélées et c’est à celles-là seulement qu’elle assujettit entièrement la raison ; les autres vérités n’étant point absolument nécessaires, Dieu ne lui a point donné l’autorité infaillible pour les connaître. Quand l’Église juge si des propositions ou des sens hérétiques sont contenus dans un livre et si un auteur a eu tel ou tel sens, elle n’agit que par une lumière humaine, en quoi tous les théologiens conviennent qu’elle peut être surprise et que, partant, sa seule autorité ne peut captiver notre entendement, quoiqu’il soit vrai qu’il n’est pas permis de s’élever témérairement contre ses jugements vers lesquels on doit témoigner son respect, en demeurant dans le silence, s L’évêque de Beauvais, Buzenval, reproduisit, dans son mandement du 23 juin, celui de l’évêque d’AIet L’évêque d’Angers, Arnauld, et celui de Pamiers, Caulet, renouvelèrent dans leurs mandements, la distinction du fait et du droit, en niant, d’une manière absolue, l’infaillibilité de l’Église en matière de fait ; ils exigent une soumission sincère à la question de droit et demandent un silence respectueux pour la question de fait. Le roi, par un arrêt du Conseil d’État (20 juillet 1665), cassa ces quatre mandements comme contraires à sa déclaration et aux intentions du Saint-Siège.

Le P. Annat attaqua aussi le mandement des quatre évêques, mais les docteurs Arnauld, Nicole et La Lane, retirés à l’hôtel de la princesse de Longueville, et qui avaient déjà collaboré à de nombreux écrits : Apologie des religieuses de Port-Royal, Traité de la foi humaine, lielga perconlalor, Défense des propositions de la seconde colonne, Réponses à Vidée du jansénisme du P. Ferrier, elc…rédigèrent une Réf ulation du P. A n nul contre le mandement de l’évêque d’AIet et composèrent de concert Dix Mémoires sur la cause tics quatre évêques qui ont distingué le fait et le droit. Arnauld, Œuvres, t. xxiv, p. 193-362. Le premier (février ltiiiii). montre, au nom des libertés de l’Église gallicane, l’impossibilité de faire un procès aux évêques par des commissaires nommés par le pape. Il faut dire, en elTet, que le mandement des quatre évêques avait indigne le roi qui demanda aussitôt au pape de désigner douze prélats pour les juger, conformément aux usages du royaume, aucun évêque ne pouvant être jugé par moins de douze de ses pairs. Le pape avait consenti a nommer neuf évêques » avec la possibilité d’en nommer d’autres en la place de ceux qui pourraient avoir quelqu’obstacle ou s’excuser de la