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JACQUES DE SAROUG


physisme. émerveillé par le crédit du patriarche Sévère auprès de l’empereur. Mais il est vain d’accuser d’ambition un des hommes les plus éloquents de son temps, qui devint évoque à 67 ans et demi seulement et d’un médiocre diocèse. A s’en tenir aux biographies signalées ci-dessus, on pourrait même être tenté de repousser toute idée d’un séjour de Jacques de Saroug à Édesse, et avec d’autant plus de vraisemblance que, suivant la noticede Londres, il grandit à Haurfi ou Hayârâ (les deux manuscrits ont le pluriel HâwârS) de Saroug. Mais Jacques lui-même fournit sur cette particularité de sa vie un témoignage certain : dans sa première lettre aux moines du couvent de Mar Bassus certainement antérieure à son épiscopat, donc au plus tard de 518 ou 510, il raconte que 45 ans plus tôt. donc vers -169-473, il étudiait les saintes Lettres à Édesse, lorsqu’on y traduisit du grec en syriaque les écrits de Diodore. Il ajoute qu’ayant regardé ces livres, il se rendit compte malgré sa jeunesse, de leur danger, et engloba dès lors dans une même aversion les nestoriens et l’École des Perses, qui favorisaient cette traduction. P. Martin, Lettres de Jacques de Saroug aux moines du couvent de Mar Bassus et à Paul d’Édesse, dans Zeitschri/t der deutschen morgent ândischen Gesellschajt, 1876, t. xxx, p. 224 sq.

Rien dans ce texte ne laisse entendre que Jacques ait jamais été dyophysite, mais les historiens nestoriens n’ont pas tort de le mettre en relations avec le patriarche Sévère : les auteurs jacobites, Michel, dans sa Chronique, édit. Chabot, p. 261, trad., t. ii, p. 161 sq. et Barhebræus, Chronicon ecclesiaslicum, t i, col. 189192, déclarent que la doctrine de Jacques fut appnrivée par le célèbre patriarche et aue lui-même en fut bien accueilli La notice de Londres dit plus explicitement encore que Jacques vivait au temps du patriarche Sévère, qu’il se rendit auprès de lui et fut béni par lui.

Nous ne savons rien sur les débuts de Jacques dans la vie monastique ; en 502-503. il était périodeute dans dans cette Haura ou Hawârâ de Saroug, où il avait passé son enfance, lorsqu’il écrivit des lettres d’encouragement aux villes de Mésopotamie, qui tremblaient à l’approche du roi de perse Qawad. The Chronicle of Joshua the Stylile, édit. W. Wright, Cambridge, 1882, p. 51 sq., trad., p. 43 ; Barhebrœus, loc. cit. Enfin, l’an 830 des Séleucides (= 518-519), selon la notice de Jacques d’Édesse, qui seule fournit cette date, Jacques devint évêque de Batnan, ville du canton de Saroug. qui prit ap-ès l’Islam le nom du territoire dont elle était le chef-lieu. La Chronique nestorienne de Séerl. loc. cit., prétend que Jacques fut consacré par Sévère d’Antiocho et Philoxène de Mabboug ; cela supposerait que son élection eut lieu quelques mois plus tôt, car Sévère quitta la Syrie dès septembre 518. Il est assez extraordinaire que ni Jean d’Asie, ni aucun des historiens qui racontèrent les événements decetteépoque troublée, ne mentionne la consécration d’un personnage aussi connu que Jacques. Quoi qu’il en soit, son pontificat dura peu. La notice dit qu’il fut enterré, le 29 Usrïn II 832(= 29 novembre 520). Il avait vécu, ajoute-t-elle, 70 ans au total, dont 67 1/2 avant son pontificat et 2 1 /2 dans l’épiscopat. S’appuyant sur ce chiffre de deux ans et demi de pontificat et sur la correspondance des années établie par l’auteur de la notice, ou le copiste du Vatican syriaque 155 (830 des Séleucides = 519), J. S. Assémani a corrigé dans son édition de ce texte 832 en 833. Cette correction, qui met la notice d’accord avec le pseudo Denys. Vatican syriaque 162 f 97, t en l’année 833 mourut le saint Mar Jacques le docteur, évêque de Batnan de Saroug, doit être maintenue. C’est la date qui s’accorde le mieux avec les circonstances de la mort de Jacques, telles qu’on les trouve rapportées

d’après Jean d’Asie, dans le pseudo-Denys, Vatican syiaque, 162, f.93v°, et dans Michel, Chronique, p. 268 sq., trad., t. ii, p. 175 : Paul, évêque d’Édesse, ayant reçu l’ordre de quitter son siège, désira, avant de s’exiler, revoir l’évêque de Batnan. et lui fit demander de venir à Édesse. Jacques, soupçonnant Paul d’être chalcédonien en son cœur, dit l’auteur monophysite — bien qu’il fût condamné comme soupçonné d’appartenir au parti de Sévère — ou, plus prosaïquement, redoutant de se compromettre en visitant un collègue frappé par ordre de l’empereur, se fit prier. Enfin, il céda aux instances des messagers, mais avant de se mettre en roule, il pria Dieu de ne pas permettre qu’il vît la face de Paul, si vraiment celui-ci était entaché de dyophysisme. Il s’arrêta, pour passer la nuit, au couvent des Perses », à peu de distance d’Édesse, mais il y fut averti par une vision qu’il devait rebrousser chemin. Revenu à sa ville épiscopale, u prédit à son entourage qu’il périrait dans deux jours, ce qui eut lieu. J. S. Assémani, Bibliolheca orienlalis, 1. 1, p. 298 sq., a cru que le Paul dont il est question dans ce récit était le patriarche d’Antioche, successeur de Sévère, Paul II le Xénodoque, surnommé parles monophysites Paul le Juif, et il reproche au pseudo-Denys d’avoir commis un grossier anachronisme, puisque ce patriarche avait dès lors résigné sa charge ; l’erreur est d’Assémani. Paul d’Édesse ne fut définitivement banni qu’en juillet 522 ; dans les derniers mois de 521, il devait déjà être inquiété, et l’on comprend vraiment que Jacques ait eu peu de confiance en sa foi monophysite, car, déposé en même temps que Sévère à la fin de 518, il avait été rétabli sur son siège par l’empereur après un exil de 44 jours seulement à Séleucie. Ce texte, qui faisait difficulté à J. S. Assémani, doit donc être retenu ainsi que la date proposée pour la mort de Jacques. La chronique de l’année 724 (Liber chali/arum de Land) * Dans le même temps, Mar Jacques le docteur, qui mourut l’an 830, » Corpus scriplorum christianorum orienlalium, Scriptores syri, sér. III, t. iv, p. 144, trad., p. 111, ne doit pas faire de difficulté ; il est vraisemblable que le chiffre des unités y a été perdu accidentellement.

Jacques de Saroug est commémoré par les Jacobites de langue syriaque, soit au jour anniversaire de sa mort, soit les 29 juin et 29 juillet. F. Nau. Un martyrologe et douze ménoloqes syriaques, Putrologia Orienlalis, Paris, 1915, t. x, lasc..1, p. 142 ; par les Maronites les 27 janvier et 5 avril, par les Arméniens le 16 hori (25 septembre) Bien que Jacques de Saroug n’ait jamais figuré au martyrologe romain, les Bollandistes l’ont introduit dans les Aria Sanctorum, au 29 octobre ; le P. Matagne lui a consacré une dissertation dans le t. xii d’octobre, Bruxelles, 1884, p. 824831 ; 927-929. Voir N. Nilles, Kalendarium manuale ulriusque ecclesiæ, t. i, p. 227, 461 ; t. ii, p. 682.

IL Œuvres. — Jacques de Saroug a beaucoup écrit, surtout en vers ; Barhebra : us raconte qu’il y avait auprès de lui soixante-dix scribes occupés à copier ses poèmes et l’on supputait qu’il avait composé 763 homélies métriques, sans compter les autres pièces, madrôsô et sùgyôtô, destinées à l’usage liturgique. Aussi lut-il surnommé par ses compatriotes « la flûte de l’Esprit saint et la cithare de l’Église orthodoxe. » Jacques d’Édesse regardait Jacques de Saroug comme un modèle de style poétique avec saint Éphrem, Isaac le Grand et Philoxène de Mabboug

Les homélies métriques, écrites dans le mètre dodécasyllabique, eurent un grand succès ; il en existe plusieurs recueils importants et les Assémani en avaient retrouvé 231 dans les seuls manuscrits du Vatican. Le 1’. Bedjan en a publié 195, malheureuse-