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IMPOSITION DES MAINS


quoniam manus est organum organorum in quo scilicel principalius residel potestas operandi. « On voit par là que la conception générale du caractère sacramentel imprimé par tradition d’instrument était admise même de ceux qui paraissent s’en écarter, et ne s’en écartent en fait pour la prêtrise que par une vue subtile et artificielle que personne n’a songé à reprendre de nos jours. " De Guibert, Revue pratique d’apologétique, loc. cit., p. 222.

Or ce consensus Iheologorum s’est maintenu en fait jusqu’au xixe siècle. Les listes dressées par le cardinal van Rossum lui-même établissent que ceux qui excluent le caractère sacramentel de la tradition des instruments pour le réserver à la seule imposition des mains sont en nombre infime comparativement à ceux qui le reconnaissent : 1 contre Il au xve siècle ; 10 contre 31 au xvi « ; 13 contre 115 au xvii « ; 39 contre 78 au xviii « . Encore avons-nous dit dans quelles conditions s'étaient produites les adhésions à la conception plus récente : provoquées par la connaissance acquise du mode d’ordination des Grecs, qui ne comporte que l’imposition des mains ; accomplies en vertu du principe de la fixité absolue des rites sacramentels, elles se sont subordonnées elles-mêmes à la condition qu’il n’j' ait pas eu à Florence, de la part de l'Église, une manifestation authentique de son enseignement doctrinal. Le principe invoqué étant contestable et contesté, la condition surtout, dont on faisait tout dépendre, se trouvant démontrée inexistante par celui-là même qui avait le plus d’intérêt à en constater la réalité, on peut se demander, la valeur qui reste à des adhésions de cette nature.

4. Conclusion.

Dans une doctrine ayant pour elle un consensus Iheologorum tant de fois séculaire, universam fere aciem scholasticorum, pour parler comme Benoît XIV, De synodo diœcesanu, c. viii, 10, 11, qui est exprimée dans les rites les plus solennels et les plus minutieusement réglés de la liturgie et qu’un concile oecuménique a authentiquement proposée comme exprimant « la vérité » en matière de sacrements, comment hésiter à reconnaître la doctrine propre de l'Éghsel

Elle est la seule en tout cas que cette Église ait jamais authentiquement donnée comme sienne ; personne ne cite et ne saurait citer un acte quelconque de cette Église qui en soit le désaveu ou seulement l’abandon authentique. Pour la constitution de Léon XIII sur les ordinations anglicanes, voir plus loin, col. 1420. La réaction qui s’est produite au xixe siècle en faveur de la seule imposition des mains ne saurait avoir ce caractère : le point de départ en est surtout d’ordre historique et elle demeure conditionnée elle aussi par le présupposé reconnu faux du caractère purement disciplinaire ou consultatif du décret de Florence. L'Église d’ailleurs viendrait-elle à poser en faveur de cette opinion un acte dont l’autorité égale ou suporieure à celle du décret de Florence permît de la considérer comme authentiquement adoptée par elle, plutôt que d’y voir la condamnation de la doctrine enseignée par le concile, il y aurait lieu de se demander si une modification si manifeste de sa pensée antérieure n’autoriserait pas à parler une fois encore d’un changenient introduit par elle dans le rite essentiel du sacrement de l’ordre.

En attendant, rejeter comme fausse et erronée la doctrine du concile de Florence, c’est admettre qu’un concile œcuménique, dans un décret doctrinal, approuvé et promulgué comme tel par le pape, a " déclaré » être « la vérité en matière sacramentelle » ce qui en fait est une erreur en matière de foi.

Pour rendre acceptable jjareille hypothèse, c’est vraiment trop peu qu’une opinion théologique, fûtclle la plus hautement recommandée. Le cardinal van

Rossum y croit suffisant que le décret de Florence se rattache au magistère ordinaire de l'Église. Le propre en effet du magistère ordinaire lui paraît être de n’avoir pas la garantie de l’infailhbilité : Christus duplex institua magisteriuminEcclesia : ordinariuu uinun quo vcra auctoritate, a Christo colluta, Cll’RA

TAMEN INFALLIBILITATIS CHARISMA fldcks insti tuuntur utque dacuntur, op. cit., n. 419 ; et comme il explique ainsi, n. 422, la possibilité d’erreur dans les encycliques et autres actes semblables du pape ou dans les décisions des Congrégations romaines rendues et promulguées en son nom, il croit que se pourrait expliquer de même l’erreur commise par le concile de Florence. Nous n’avons pas à apprécier ici cette conception du magistère ordinaire ni à examiner comment elle se concilie avec l’affirmation du concile du Vatican, De flde catholica, c. iii, que le magistère ordinaire peut proposer et imposer lui aussi des vérités de foi proprement dites, voir Église, t. iv, col. 2194, mais, même admise cette conception ; même étant admis que le décret de Florence relève du magistère ordinaire, encore est-il cependant que d’un décret du Saint-Office ou même d’une encyclique à un décret de concile œcuménique solennellement approuvé et promulgué par le pape il y a une certaine différence.

Et il est assurément vrai encore que, pour se trouver énoncée dans un acte conciliaire, une affirmation doctrinale n’est point pour cela même nécessairement définie. Mais l'Église ne ferait-elle donc sienne une doctrine qu’autant et dès l’instant qu’elle en donne une définition proprement dite ? Ce n’est point là, nous semble-t-il, doctrine commune dans l'Église. Et ces théologiens des derniers siècles, qui, pour pouvoir prendre parti contre le décret de Florence, se sont ingéniés à lui trouver un but purement disciplinaire, historique ou consultatif, se seraient-ils ainsi appliqués à en exclure le caractère conciliaire et doctrinal, s’ils avaient cru qu’il fût loisible de contredire une doctrine approuvée et proposée comme « vraie » par un concile œcuménique ? Aujourd’hui du moins que ce double caractère du décret apparaît incontestable, nous croyons qu’ils renonceraient eux aussi à y contredire et à considérer l’imposition des mains comme appartenant encore à la matière propre du sacrement de l’ordre.

Le changement est total.

1. C’est le sens des documents. — Il nous paraît certain, en effet, connue au cardinal van Rossum, que la pensée de l'Église, telle en particulier qu’elle s’est manifestée au concile de Florence, exclut l’imposition des mains du rite essentiel de l’ordination. Les textes cités du Pontifical ne parlent que de la tradition des instruments, et l’on n’aurait pas songé à leur attribuer un autre sens, si l’on n’avait pas cru établie par ailleurs la nécessité de l’imposition des mains. Le commentaire défait qu’en donne l’article cité de saint Thomas, III i', Supplem., q. xxxvii, a. 5, est lui aussi indiscutable ; indiscutable également sa pensée telle qu’elle est exprimée dans son opuscule De Ecclesise sacramentis : pas un mot n’y suggère que pour, le sacrement de l’ordre, contrairement à ce qu’il fait pour les autres sacrements, il se borne à indiquer une partie de la matière et de la forme sacramentelles, et passe sous silence la partie qu’il eût considérée comme la plus importante. Même conclusion pour le décret de Florence. Toutes les suggestions faites pour expliquer que l’imposition des mains, sans y être mentionnée, y est cependant supposée comme matière essentielle, procèdent de la conviction préalable de la nécessité de ce rite et se heurtent à la fois au but proprement doctrinal que poursuit le concile, au texte de saint Thomas qu’il reproduit, et aux paroles mêmes qu’il emploie. Rien n’indique que le concile procède pour le sacre-