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IMPOSITION DES MAINS


PRJESENTIUM QVAM FUTORORUM faciliore docirina sub hac brevissima redigimus formula, Le fait d’avoir pris pour base de son exposé un opuscule de saint Thomas, n’en amoindrit en rien la portée. Les remaniements mêmes qu’il a fait subir au texte de l’opuscule, « en résumant surtout certains développements et en supprimant certaines explications d’allure systématique, » de Guibert, loc. cit., p. 209, et pour les preuves de détail, p. 196-208, en ont, au contraire, accentué encore le caractère doctrinal. C’est bien ainsi d’ailleurs que l’entendirent les Arméniens dans l’acte d’acceptation qu’ils en firent au concile même. La bulle de promulgation Exultate Deo, reproduite in extenso dans les Annales de Raj’naldi, traduit ainsi leur réponse aux Pères du concile : Populo nostro Armenorum traditis… quinto brevem formulam septem sacramentorum Ecclesiæ, videlicet baptismi, etc…. DECLARANDO quee sit cujusUbet sacramenti materia, forma et minister. Ann. 1439, n. IG, édit. Theiner, t. xxviii, p. 291 b. Aussi le décret ainsi rédi, t.'é, encore qu’il ne soit entré que lentement dans la documentation théologique courante (au concile de Trente, il semble avoir encore été inconnu de quelques Pères, de Guibert, loc. cit., p. 85), a-t-il été considéré dès l’abord par tous ceux qui en connaissaient l’origine conciliaire comme revêtu d’une pleine autorité : à Trente, les présidents du concile ne permettent pas qu’on en conteste le caractère conciliaire, et, dans les discussions qui ont eu lieu alors sur les sacrements, il a été l’autorité à laquelle on s’est le plus souvent référé comme à une autorité aj’ant force de chose jugée. Ibid., p. 8( ; -88.

2. Le décret de Florence et la « lex orandi. » — La doctrine du décret est exprimée d’ailleurs dans les livres liturgiques. Le Pontifical romain, dans les rubriques générales mises en tête des ordinations, De ordinibus conferendis, porte expressément que l'évêque doit présenter la porrection des instruments comme étant 1e rite propre de l’impression du caractère sacramentel : Moneat ordinandos quod instrumenta, in quibus characler imprimitur, tangant. Au cours ensuite des diverses ordinations, les rubriques de détail s’inspirent de cette doctrine. Même après avoir reçu l’imposition des mains, diacres et prêtres continuent à être désignes du nom de ordinandi ; aussitôt après la tradition des instruments, ils sont dits ordinati. Aussi bien suffit-il de suivre les cérémonies d’une ordination sacerdotale i)pur se rendre compte de la pensée qui y préside. Ajirès les litanies et la trijjle bénédiction de l'évêque aux ordinands prosternés ; après l’imposition des mains, avec les oraisons et préface qui la suivent ; quand, une fois les ordinands revêtus des vêtements sacerdotaux, l'évêque se retourne vers l’autel, s’agenouille et entonne le Veni Creator afin de procéder ensuite à l’onction des mains et à la porrection du calice, cette introduction solennelle à la dernière phase de la cérémonie donne l’impression très nette qu’on en est arrivé au moment décisif. A qui sait que l’ordination ne comportait jadis que l’imposition des mains, il apparaît évident qu’il y a eu depuis soudure d’un rite nouveau. Mais à qui suit les rites dans leur ordre actuel, tous ceux qui précèdent semblent n’avoir été qu’une préparation à la collation du pouvoir sacerdotal qui se fait alors. Et lorsque, ensuite, on relit l’article de saint Thomas, Sam. theol., II I^ Supplem., q. xxxvii, a. 5, tiré de In IV Sent., t. IV, dist. XXIV, q. ii, a. 3, sur le moment où s’imprime le caractère sacerdotal, la correspondance apparaît si parfaite entre les explications du saint docteur et l’impression produite par la succession des cérémonies qu’on ne peut s’empêcher de conclure à une complète identité de pensée entre la formula credendi et la formula prccandi. Episcopus, écrit saint

Thomas, in collatione ordinum duo facit : prseparat enim ordinandos ad ordinis susceptionem, et ordinis potestatem tradit. Prseparat quidem et instruendo eos de proprio officio et aliquid circa eos operando ut idonei sint ad potestatem accipiendam ; quæ quidem præparatio in tribus consistit, scilicet benediclione, manus impositione et unctione… Sed potestatis collatio fit per hoc quod datur eis aliquid quod ad proprium actum pcrtinet. Et quia principalis actus sacerdotis est consecrare corpus et sanguinem Christi, ideo in ipsa datione calicis sub forma verborum determinata characier sacerdotalis imprimitur.

Il paraît inutile après cela de discuter encore sur le sens doctrinal des rites de l’ordination sacerdotale et sur la pensée de saint Thomas au sujet de la matière propre du sacrement de l’ordre. Le passage que nous venons de citer, joint à celui du De Ecclesise sacramentis, que le concile de Florence lui a emprunté, ne laisse aucun doute sur la doctrine du prince des scolastiques. Du fait qu’il attribue un certain rôle à l’imposition des mains dans l’administration de la confirmation et de l’ordre, Sum. theol., III », q. lxxxiv, a. 4, il ne suit nullement que ce rôle soit celui de la matière du sacrement ; lui-même, 111 » = Supplem., q. xxxvii, a. 5, précise que cette cérémonie n’est que préparatoire à la réception de l’ordre. Tout comme l’onction « consacre » les futurs prêtres, l’imposition des mains leur assure la plénitude de la grâce :. per manus impositionem datur plenitudo gratiæ : mais il est formellement spécifié que l’un et l’autre rite ne sont que pour les rendre idonei ad potestatem accipiendam.

3. Le décret et le a consensus theologorum. » — Il n’est pas douteux non plus que les théologiens aient été unanimes, pendant de longs siècles, à voir dans la seule tradition des instruments le rite essentiel de I l’ordination. Le cardinal van Rossuni, op. cit., s’est appliqué à rechercher ceux qui l’ont reconnu dans l’imposition des mains où il le met lui-même. Pour toute la période des xiii « , xiv « , xve siècles, il en a trouvé sept ou huit en tout. Encore, remarque le P. de Guibert à ce propos. Revue pratique d’apologétique, décembre 1914, p. 221, « quatre, parmi eux, ne traitent-ils pas la question ex professa et ne parlent-ils de l’imposition des mains qu’en passant, sans que de leur texte on puisse tirer une position précise, t Quant aux deux principaux, saint Bonaventure et Pierre de Tarcntaise, le futur Innocent V, ils admettent l’un et l’autre le principe général que le caractère, pour les divers ordres, s’imprime au moment où l’ordinand touche l’instrument qui symbolise le pouvoir reçu : In illo signo exteriori imprimitur character in quolibet ordine in qiio principalis potestas quam respicit ordo signiflcatur tradi ordinato. Ad hanc autem significandam duo concurrunt exterius scilicet tradili alicujus instrumenti et expressio verbi. S. Bonaventure, In IV Sent., t. IV, dist. XXIV, p. ii, a. 1, q. iv. In sacramentorum collatione, per aligna qux ibi fiuntsuscipiens præparatur et disponitur, ut per benedictionem, unctionem, manuiim impositionem et vestium concessionem [on reconnaît l’explication de saint Thomas] ; per unicum vero actum character imprimitur, scilicet per instrumenti traditionem. Pierre de Tarentaise, In IV Sent., t. IV, dist. XX 1 V, q. iii, a. 3. L’un et l’autre font également l’application de ce principe à l’ordination du sous-diaconat et des ordres mineurs et si, pour le diaconat et la prêtrise, ils concluent que la collation en est faite par l’imposition des mains, c’est encore en vertu du même principe : la main étant, d’après Aristote, Vorganum organorum, ils voient dans l’imposition des mains la tradition d’instrument par excellence : Quoniam datur ibi nobilis potestas et excellens, fil manus impositio, non tantum instrumenti tradilio,