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IMPOSITION DES MAINS


de l’autre, à vous faire communiquer vous-mêmes avec des pécheurs dont les péchés ne seront jamais remis. Epist., lxxiii, 18-19 ; lxxiv, 8 ; i.xxv, 23.

La suffisance ou l’insuffisance de l’imposition des mains pour la justification des hérétiques, voilà donc bien ce qui met aux prises Rome et Carthage. On conteste ici l’efficacité du rite réconciliateur que là on estime suffisant. Mais de part et d’autre on s’accorde sur le fruit à en attendre pour les convertis. Dans la pensée de tous, il est ordonné à leur justification première et positive. Ce qu’ils viennent chercher dans l'Église, c’est-à-dire la rémission de leurs péchés, saint Etienne et saint Gyprien admettent que l’imposition des mains est destinée à le leur assurer. L'évêque de Carthage nie seulement qu’elle y puisse suffire.

Peu importe donc que, au cours de sa démonstration, il compare ce rite avec celui qui fait suite au baptême catholique, Epist., lxxii !, 9, et constitue ce que nous avons appelé la confirmation. Ce rapprochement des deux collations du Saint-Esprit est fréquent aux premiers siècles. Nous en avons signalé quelques exemples. On pourrait les multiplier. Ils posent le problème très délicat de la distinction primitive des sacrements de baptême et de confirmation ; mais ils montrent aussi et surtout le lien étroit qui, dans les esprits, rattachait la rémission des péchés à la collation du Saint-Esprit et, par là même, ils achèvent d’expliquer que l’imposition des mains in pœnitentiam prescrite pour les convertis de l’hérésie ait été interprétée au sens d’une imposition des mains in Spiritum Sanclum.

L’auteur du De rebaptismate, le bouillant adversaire de saint Cyprien, ne l’entend pas différemment. Sur sa position exacte et l’ensemble de sa thèse, voir les articles cités des Recherches de 1914, p. 347 sq. Pour lui aussi l’imposition des mains aux hérétiques se fait à la lois in pœnilenliam et in Spiritum Sanctum. Non seulement, en effet, il la présente comme un abrégé du baptême destiné à produire le même effet qu’en procurerait le renouvellement intégral : Animadverto quæsilum… utrum… lantummodo imponi eis manum ab episcopo ad accipiendum Spiritum Sanctum sufjficeret et hwe manus impositio signum fidei iteratum atquc consummatum eis præstaret, an vero etiam iteratum baptisma his necessarium esset tanquam nihil habituris, si hoc quoque adepti ex intégra non fuissent. Hartel. Op. C.ypriani t. iii, p. 69-70. Hœcquæ in isto ncgotio deprehendimus adunata [baptisma scilicct aquæ cl baptisma Spiritus] videamus utrum possint esse aliquando etiam singulariter disposila, quasi non sint mutila sed tanquam intégra atque perfecta. ra, p. 73 ; cf. c. VI, p. 77. C’est l’opposition des deux thèses et l’auteur soutient la première.

Non seulement il en prouve l’efficacité par l’effet de la rémission des péchés que produit le Saint-Esprit en descendant sur la famille du centurion Corneille, v, p. 75 ; il juxtapose en outre, et à plusieurs reprises, les expressions de pénitence et de Saint-Esprit. La question qui met aux prises les évêques, dit-il dès le début, c’est de savoir, dans le cas où les hérétiques lotis præcordiis pœnilenliam agerent et erroris sui damnul.onem intelligentes auxitium salutis ab ea [Ecclesia] implorarent…, utrum… lantummodo imponi eis manum ab episcopo ad accipiendum spiritum SANCTUM sufficerc. i, p. 69. La conclusion où il veut amener son adversaire, c’est que per solam manus impositioncm episcopi… possit homini pœnilenli atque credenti etiam spiritus SANCTus tribui, iv, p. 74 ; pænitentiam agenlibus correclisque per doctrinam veritatis et per fldem ipsorum, quæ postca emendata est, purificato corde eorum, lantummodo iiaftismate SPIRITALi… subveniri debeat. x, p. 82. La connexion, on

le voit, est constante entre la pénitence et l’imposition des nains. C’est à des pénitents qu’elle a pour but de donner le Saint-Esprit. La condition préalable en est la rectification de la foi, la purification du cœur, l'éloigneinent des souillures précédeniment contractées, abscissa omni lobe prxteritse conversationis. VI, p. 77. Il faut tout cela pour que les convertis de l’hérésie obtiennent le salut par le baptême de l’Esprit indispensable à tout homme : Si recorrigere id potuissenl, non proplerea a salute exciderent, sed quandoquc resipuissent, inlegram spem salutis pœnitendo acciperent, præsertim cum spiritum SANCTUM, quo baptizari unusquisque hominum débet, acciperent. Ibid. Pour qui a présente à l’esprit la manière dont s’exprimaient alors les rapports de la pénitence intérieure avec la réconciliation pénitentielle, l’hésitation ne paraît pas possible : ce sont des rapports de même nature qui sont établis ici entre la pénitence des hérétiques et le rite de leur réconciliation. L’auteur associe en somme dans une même formule deux idées qu’on s’est habitué à considérer comme étrangères l’une à l’autre, et son langage s’unit à sa doctrine pour expliquer l'équivalence des deux expressions in pœnilenliam et in Spiritum Sanctum. Le sens sous-jacent à l’une et à l’autre est que les convertis sont traités en pénitents et que, si l’i 1 position des mains est destinée à leur donner le Saint-Esprit, elle doit le faire comme à des pécheurs qui sont encore à justifier.

Telle est aussi la conception que s’en fait saint Jérôm.e dans son Dialogue contre les lucifériens. Il serait trop long de le prouver en détail, voir les articles cités, p. 356 sq. ; l’affirmation mise sur les lèvres du luciférien peut suffire : saint Jérôme ne la conteste pas ; il y prend au contraire son point d’appui pour amener son interlocuteur à admettre que, comme le laïque, l'évêque hérétique, s’il fait pénitence, peut être adnûs dans l'Église : Ego, dit donc le luciférien. recipio laïcum p.£A’itentem per manus impositioncm eliNVOCATlONEM SPIRITUS SANCTI, sciens ab hæreticis Spiritum non possc conjerri, vi, P. L., t. xxiii, col. 160. Et l’on voit d’abord que les deux idées de pénitence et d’imposition des mains pour le Saint-Esprit sont associées, ensuite que le m.otif invoqué pour donner ainsi le Saint-Esprit aux convertis de l’hérésie est que jusqu’alors ils en ont été totalement dépourvus. L’hérésie ne leur permettait pas de le recevoir dans leur ànie ; on le leur donne en les réconciliant avec l'Église pour qu’il en prenne possession. Ce n’est assurénient pas là avoir en vue l’effet propre de notre sacrement de confirmation.

c) La reconciliation pénitentielle des hérétiques a pour but de leur donner le Saint-Esprit. — Saint Augustin permet en quelque sorte de faire la contre-épreuve. Personne ne conteste qu’il ait attribué à l’imposition des mains confcrc’e aux hérétiques un caractère proprement pénitentiel. Non seulement, elle fait ressortir l'état de péché où ils se trouvaient jusque-là : Manus impositio, si non adhiberetur ab hæresi venienli, tanquam extra omnem culpam esse judicaretur.De baplismo, v, 23, 33, P. L., t. XLUi, col. 193, ce qui est l’assertion classique citée pour prouver la conception pénitentielle qu’en avait saint Augustin ; n ais elle est directen.ent ordonnée à assurer la réii ission des péchés que n’a pas procurée le baptên.e reçu hors de l'Église. Car, avec le docteur d’Hippone, la distinction s’est précisée entre ce que nous appelons la validité et l’efficacité du sacreii ent. Si la première est indépendante de l’union à la véritable Église, la seconde y est très étroiten.ent fiée. Ibid., iii, 22, P. L., col. 149. Ce n’est pas que cette distinction soit encore si claire et si nette, si universellement admise surtout, qu’on puisse, dans la discussion, passer outre aux confusions